"Le grand débat de Macron, on n'y croit pas": A Paimpol dans les Côtes-d'Armor, le grand débat national n'intéresse pas les "gilets jaunes" qui ont choisi de consulter eux-même la population pour recenser les "vraies questions" des Français.
Dans quelques jours, les Paimpolais et habitants de communes proches pourront donner leur avis dans un questionnaire d'une page avec une vingtaine de questions classées par thèmes. Est-il "important", "très important", "pas important" de revaloriser les retraites et les pensions, d'augmenter le SMIC et les salaires, de rétablir l'ISF ?
Pouvoir d'achat, fiscalité, représentativité politique... les "gilets jaunes" lancent une consultation qui sera ouverte jusqu'au 16 février.
Nous n'avons aucune illusion
"On ne fuit pas le débat, on est dans le débat, mais on mène le nôtre", explique François Garcia, un "gilet jaune" de Paimpol rencontré mercredi par l'AFP, à l'issue d'une permanence du comité local réuni à huis clos dans une salle à quelque encablures du port pittoresque. Dans un coin de la salle sont empilées des urnes jaunes en carton, prêtes à être distribuées.
Le débat, "on le mène pour ne pas qu'on puisse dire que nous sommes des gens qui ne voulons pas débattre, mais nous n'avons aucune illusion sur ce que ce gouvernement peut faire dans ce débat. Il est pipé dès le départ", estime François Garcia.
Localement, les "gilets jaunes" assurent que leurs revendications mobilisent et rappellent que 300 personnes ont assisté à la première réunion publique des "gilets jaunes" à la salle des fêtes de la commune le 10 janvier. "On a essayé de relever les demandes des gens (...) on ne s'est pas contenté de prendre cela sur un plan purement politique", affirme Rénald Prevost, 57 ans.
"Parce que lui (NDLR: Emmanuel Macron) il n'a pas les mêmes relations que nous. Nous, on a discuté avec des gens de la base et les gens de la base pour la majeure partie, voilà ce qu'ils relèvent", souligne ce retraité de la SNCF.
L'initiative ne vient pas du haut
"En définitive, l'initiative ne vient pas du haut, l'initiative vient de nous", souligne Régine Le Louarn, 72 ans, une participante. Loin de la crise de défiance qui, ailleurs, frappe les élus de la République, le maire UDI Jean-Yves de Chaisemartin, 40 ans, se targue d'avoir réussi à instaurer un dialogue direct avec les "gilets jaunes".
Une salle mise à disposition par la mairie
Au début du mouvement le 17 novembre, l'élu a choisi de "passer un contrat moral" avec eux. "Je leur ai dit, soit vous êtes là pour bloquer et on ne va pas s'entendre, soit on discute et on peut vous donner les moyens", explique l'édile qui dirige Paimpol depuis dix ans.
Très vite une salle est mise à disposition, début décembre un cahier de doléances en mairie est ouvert aux Paimpolais, 13 rendez-vous sont programmés, dont cinq permanences "Ty gilets jaunes" et aussi une réunion publique animée par le journaliste Jean-François Kahn, souligne le maire.
Deux mois plus tard, parmi la centaine de contributions rédigées sur place, arrivées par courrier et internet, on trouve "un florilège de propositions", souligne l'élu. "Surréalistes, farfelues, comme le rétablissement de la peine de mort, l'interdiction de la franc-maçonnerie" et "de façon unanime la demande de démission du président de la République", note le maire.
Une personne a demandé de pouvoir mettre le 15 du mois un peu plus de beurre dans son kouign-amann (gâteau breton)
Mais aussi les revendications plus générales: référendum d'initiative populaire, ISF, pouvoir d'achat, carburant, indexation du smic et du minimum vieillesse.
"Une personne a demandé de pouvoir mettre le 15 du mois un peu plus de beurre dans son kouign-amann (gâteau breton)", relève aussi l'élu. Les habitants de Paimpol ont jusqu'au 26 janvier pour contribuer aux doléances. Elles feront l'objet d'une synthèse débattue en conseil municipal le 31 janvier; qui sera remise au préfet et au député LREM des Côtes-d'Armor Éric Bothorel.
Les "Gilets jaunes" de Paimpol présenteront leur propre synthèse le 16 février.