Des projets de production de masques sont identifiés en Bretagne avec notamment l'envie de relancer l'usine de Plaintel. L'envie est commune mais la manière d'y parvenir voit désormais une scission entre les différents acteurs impliqués.
La relance d'une usine de masques dans les Côtes d'Armor laisse apparaître des scissions. Alors qu'un projet collectif est en cours, un autre semble émerger, porté par Marc Le Fur et l'ancien directeur de l'usine Jean-Jacques Fuan jusque là investi dans le premier mouvement.
Une difficile concertation
Une usine produisait des masques à Plaintel. Fermée en 2018 après avoir été rachetée par un groupe américain, la situation de crise actuelle a poussé plusieurs acteurs à envisager sa relance. Sauf que la concertation n'a pas l'air au rendez-vous.
Selon la Région : "Un projet coopératif est en cours de réflexion pour permettre une production durable de masques sur le territoire de Saint-Brieuc Agglomération. De taille modeste (20 millions de masques par an), ce projet s’appuie sur d’anciens collaborateurs de l’usine de Plaintel et agrège des acteurs bretons du domaine de la santé, du médico-social et des filières de l'agroalimentaire, du bâtiment et de la naval." Ce projet pourrait démarrer d'ici quatre à six mois et créerait une dizaine d'emplois. Guy Hascoët, ancien conseiller régional, a été missionné par la Région pour suivre sa faisabilité et accompagner ceux qui le portent.
Rebondissement le 28 avril alors que le député des Côtes d'Armor Marc Le Fur et Jean-Jacques Fuan (ancien directeur de l'usine à Plaintel) annoncent l'entrée d'un nouvel investisseur via un communiqué, "un véritable industriel pour mener le projet". Il s'agit d'Abdallah Chatila, homme d'affaires libano-suisse, connu pour avoir fait fortune dans les diamants et l'immobilier. Il aurait signé une lettre d'intention "pour l’achat de 25 000 m² situés dans les anciens établissements Chaffoteaux" à Ploufragan. Il compte investir 15 M€, afin de produire 250 millions de masques par an, début 2021. Ce projet emploierait jusqu’à 120 personnes.
"Tous les anciens de Plaintel sont avec nous. Cela va très vite, on avance", explique Marc Le Fur joint par téléphone. Quand on lui demande pourquoi Abdallah Chatila vient dans ce secteur, il répond : "Parce qu'il y a une équipe déterminée et motivée, il y a ici des compétences." Il ajoute : "On est dans une logique d'activité sur le long terme, sur de la production de massse." Il analyse : "Maintenant le vrai obstacle à lever, c'est la commande d'Etat. Elle est indispensable." Lorsqu'on l'interroge : y'a t-il un ou deux projets pour Plaintel ? Il affirme qu'il n'y en a qu'un.
Du côté du Conseil régional, Loïg Chesnais-Girard, son président, remarque : "Notre mobilisation depuis plusieurs semaines a permis de générer de nombreuses marques d’intérêt d’investisseurs de Bretagne et d’ailleurs. Je suis étonné de la capacité d’engagement de cet industriel qui aurait signé la reprise de Chaffoteaux sans prendre aucun contact avec nous. Mais bien entendu si ce projet est viable et qu’il permet le développement de l’emploi en Côtes d’Armor, il sera regardé très positivement."
"C'est une attitude de trahison" résume Guy Hascoët à propos des annonces de Jean-Jacques Fuan. "Il a le droit de croire qu'il décide de tout, tout seul dans son coin. Il a pris cette initiative dans le dos de tout le monde ce qui fait que maintenant il y a deux projets. Nous échangeons depuis des semaines et il se sert de ces informations pour bâtir autre chose. Quand on veut fédérer les gens, on les respecte."Il crée un climat de défiance, alors que ça travaillait bien. Guy Hascoët à propos de Jean-Jacque Fuan
"15 millions d'euros ? A quoi ça sert ? Le capital sera réparti comment ? Pour un projet qui se décrit comment ? Qu'est-ce qui nous garantit que cet investisseur ne va pas filer ? Une telle somme engagée nécessite une forte rentabilité. Il faut partir beaucoup plus modeste."
"Moi je vais faire mon job, je vais présenter un dossier et on verra. Je préfère avoir des acteurs du territoire. J'ai déjà des engagements d'entreprises bretonnes qui représentent une dizaine de métiers. Rendez-vous dans quinze jours, conclut Guy Hascoët
Joint à plusieurs reprises, Jean-Jacques Fuan n'a pas donné suite à nos appels.
Juillet 2020, des lignes de production de masques FFP2 sur un site de production de couches à Ploërmel
Un projet est lui plus avancé dans la région, porté par le groupe Intermarché, en cours sur le site de production de couches de Ploërmel. Le groupe a investi dans cinq lignes de production de masques FFP2 et chirurgicaux. Une commande d’Etat est déjà validée.135 millions de masques sont attendus à l’année, dont 74 millions en FFP2 et 61 millions en chirurgicaux.
La production doit démarrer en juillet 2020 avec 50 salariés.