Le collectif de soutien aux victimes des pesticides et un syndicat dénoncent un conflit d'interêt entre Nutrea-Triskalia et un assesseur du tribunal des Affaires sociales de Saint Brieuc, dans plusieurs affaires liées aux pesticides.
C'est Claude Le Guyader, un chauffeur livreur ex-salarié de la coopérative Nutréa-Triskalia de Plouisy, victime des pesticides, qui a tiqué à la lecture du délibéré de son jugement. Il se rend compte alors que le visage de l'un des assesseurs du tribunal des Affaires sociales ne lui est pas inconnu, mais il ne sait pas où il a vu cette personne.
Il avait d'ailleurs croisé cet assesseur par le passé au tribunal de Saint-Brieuc, mais cette fois lors du délibéré d'une autre victime décédé, Gwénaël Le Goffic.
Présent aux côté de l'épouse de Gwénaël Le Goffic, lors de différentes étapes judiciaires, le visage de cet assesseur l'avait déjà interpellé. Tout comme les décisions rendues par le tribunal de Saint-Brieuc concernant ces dossiers.
Claude Le Guyader, intoxiqué par des pesticides en 2010, demandait que soit reconnue la faute inexcusable de son employeur dans la maladie professionnelle dont il est atteint. Sa demande avait été rejetée par le pôle social du tribunal judiciaire de Saint-Brieuc le 10 décembre 2020.
Le 3 septembre 2015, le tribunal des Affaires de sécurité sociale de Saint-Brieuc avait requalifié le suicide de Gwenaël Le Goffic en accident du travail.
Le 27 septembre 2018, ce même tribunal n'avait pas reconnu la faute inexcusable de l'employeur. Edith le Goffic, son épouse avait donc décidé de faire appel de cette décision, accompagnée par le collectif de soutien aux victimes des pesticides et l'Union régionale Solidaires de Bretagne.
C'est lors de discussions au sein du collectif que Claude Le Guyader s'est rendu compte qu'il connaissait cet assesseur, et que "ce dernier aurait dû se déporter pour permettre au tribunal de statuer en toute indépendance et éviter un conflit d’intérêt manifeste puisqu’il est adhérent sociétaire de la coopérative Triskalia".
En faisant des recherches, le collectif et le syndicat Solidaires se sont rendus compte que "sur des précédents procès concernant la coopérative Nutréa-Triskalia, cette situation contraire au droit avait déjà été observée."
Ils ont écrit un courrier en ce sens aux préfets du département et de la région, ainsi qu'au premier président de la Cour d'appel de Rennes.
Ils demandent aux autorités destinataires "de prendre les mesures nécessaires pour faire en sorte que le pôle social du tribunal judiciaire de Saint-Brieuc ne connaisse plus de conflit d'intérêt et que les justiciables concernés par ces faits soient rétablis dans leurs droits".
René Louail a également relevé que "de nombreux dossiers avaient été rejetés à Saint-Brieuc", avant que ces décisions ne soient finalement infirmées par la cour d'appel de Rennes.
La justice de ce département n'est pas indépendante. On le dit avec émotion et colère
Dernier exemple en date: la cour d'appel de Rennes a reconnu mercredi la faute inexcusable de l'employeur après le suicide de Gwénaël Le Goffic sur son lieu de travail, chez Nutréa-Triskalia, une demande qui avait été rejetée en première instance en 2018 à Saint-Brieuc.
Le collectif et le syndicat Solidaires espère que le ministre de la Justice, Éric Dupont Moretti, attaché à la liberté et à l'indépendance la justice, s’inquiétera du fonctionnement du tribunal de Saint-Brieuc.