"Avantages accordés à sa fille", gestion "anormale" de l'argent des résidents : une ex-directrice d'Ehpad dans le viseur de la justice

La Chambre régionale des comptes étrille de nouveau la commune de Plouha, mais cette fois pour la gestion de son Ehpad. Seule aux commandes et laissée sans contrôle, l'ancienne directrice de l'établissement est soupçonnée de "dérives graves" dans sa gestion.

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Plouha, 4.560 habitants, ses écoles, son collège, son Ehpad,et son début de scandale financier. En février, la Chambre régionale des comptes alertait, dans son rapport consacré aux finances de la commune, sur des "dérives", "de sérieux problèmes de probité" de la part d'agents municipaux, "dans un contexte de défaillance du pilotage et de l’encadrement". Un constat sévère qu'encaisse le nouveau maire de la commune, Xavier Compain, élu en décembre 2021, qui avait lui-même alerté sur des anomalies.

Des recettes municipales non encaissées, ajoutées à des dépenses de personnel en forte hausse, et c'est toute la trésorerie de la commune qui a fondu depuis six ans, d'après l'instance régionale de contrôle des comptes publics.

"Une gestion empreinte de conflits d’intérêts"

En se penchant sur les comptes de la commune, l'organe de contrôle régional s'est naturellement intéressé à l'un de ses établissements : l'Ehpad "Les genêts d'or", accueillant 76 résidents et dont les charges s'élèvent à 2,8 millions d'euros par an. Une maison de retraite en grandes difficultés financières.

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La Chambre des comptes pointe en particulier "l’absence de contrôle et des carences", au niveau du centre communal d'action sociale (CCAS), gérant l’Ehpad en régie, "qui ont créé des dérives et irrégularités" de la part de l’ancienne directrice, en poste pendant 15 ans, de 2007 à 2022.

Favoritisme, avantages indus, privilèges

Les griefs contre l'ancienne cadre de l'Ehpad, aujourd'hui retraitée, s'accumulent : comme le fait d'avoir favorisé l'embauche de sa fille en faisant financer sa formation universitaire par l'Ehpad, avant de la placer directement à un poste d'adjointe.

Un soupçon de favoritisme pèse également sur sa relation avec un fournisseur de l'Ehpad, une entreprise dont les commandes sont multipliées par quatre sous sa direction et qui finira par embaucher la fille de la directrice, démissionnaire de la maison de retraite.

Seule aux commandes, la directrice s'est octroyé un versement au titre du compte épargne temps (CET), pour près de 25 000 euros. De plus, elle aurait présenté au président du CCAS des plannings d’heures supplémentaires fictifs, pour alimenter ce dispositif, selon le rapport de la Chambre régionale des comptes.

"Anomalies" dans la gestion de l'argent des résidents

En outre, elle "gérait irrégulièrement et de façon non contrôlée" les deniers des personnes âgées, via un compte de l’association de résidents.

L’association des résidents, à l’origine exclusivement administrée par ces derniers, s’est vue peu à peu investie par la direction et le personnel de l’EHPAD. S'ensuivent des mouvements d'argents suspects, entre les comptes de la maison de retraite, celui de l'association de ses usagers et un compte personnel de la directrice.

Des sommes relevant de l’Ehpad ont transité par les comptes de l’association, la gestion des deniers des résidents majeurs protégés a été assurée au mépris de la réglementation, et sans preuve de leur reversement intégral aux bénéficiaires, des flux financiers ont eu lieu entre les comptes bancaires personnels de l’ancienne directrice et ceux de l’association

Chambre régionale des comptes

Structurellement déficitaire depuis 2016, la maison de retraite de Plouha subit également les conséquences "d'une gestion budgétaire et comptable non rigoureuse, voire insincère"  souligne encore la Chambre régionale des comptes, qui déplore le manque de contrôle par les élus de la commune depuis de nombreuses années.

"Ne pas jeter l’opprobre sur les gestionnaires de maisons de retraite"

"Ça fait beaucoup" déplore Xavien Compain, le maire de Plouha, qui estime que les révélations sur les malversations à l'Ehpad ne doivent pas masquer le manque de moyen auquel il est confronté. "Cela ne doit pas jeter l’opprobre sur les gestionnaires de maisons de retraite"

"C'est surtout l'année 2022 qui a été difficile" pendant l'enquête de la Chambre des comptes sur les finances de la commune et sur celles de l'Ehpad, se remémore le maire. Élu en décembre 2021, il avait été aussi premier adjoint de juin 2020 à fin 2021. "Il y avait les soupçons, la population qui s’interrogeait... Au moins, l'intervention de la Chambre régionale des comptes vient clarifier les choses".

Pour ce qui est des agents municipaux mis en cause (dans la gestion de la salle de spectacle ou du marché de Plouha), 4 fonctionnaires ont reçu des sanctions disciplinaires : deux suspensions (de 6 mois pour l'un et de 2 ans pour l'autre), et deux autres ont été révoqués.

Pour la gestion de l'Ehpad, Xavier Compain compte sur la justice pour établir les responsabilités. Le procureur de la République à Saint-Brieuc s'est saisi des faits et a ouvert une enquête préliminaire.

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