Un club de plage déplacé provoque des tensions à Penvénan dans les Côtes d'Armor. Un riverain, victime de nuisances sonores, demande réparation et la justice l’entend.
Selon les résidents, le calme du quartier de Roc'h Gwen à Penvénan, dans les Côtes-d'Armor, est troublé par des cris. Ceux des enfants du "club de plage" déplacé sur un site voisin, au grand désespoir de Jean-Paul XXX, qui, après plusieurs plaintes, a saisi la justice. Ce 22 octobre 2024, la cour administrative d'appel de Nantes a vu la rapporteuse publique préconiser une condamnation de la commune, poussée à indemniser ce résident pour les nuisances subies.
Le club de la plage des Dunes déplacé
L'affaire remonte à l'été 2020, en pleine pandémie. Alors que le club de plage habituel de Penvénan, situé sur la plage des Dunes, devait rester fermé en raison des restrictions liées au Covid-19, la maire fraîchement élue, Denise Prud'homm, a décidé de déplacer les activités pour enfants vers le site de Roc'h Gwen. Ce déménagement temporaire est devenu permanent, au grand dam du voisinage.
Le calme perdu
Jean-Paul XXX, qui venait d'acheter une maison dans le secteur cet été-là, ne s’attendait pas à ce voisinage bruyant. "Des projectiles atterrissent régulièrement sur ma propriété, les cris d'enfants dépassent largement les normes acoustiques", raconte-t-il. La rapporteuse publique a confirmé l'ampleur des nuisances sonores, s'appuyant sur des constats d'huissier, des photos, et un rapport de la Socotec, le bureau de contrôle technique sollicité par la commune elle-même. Le voisinage direct du club de plage "ne pouvait être qualifié de ponctuel", même si ces nuisances se concentrent sur la période estivale.
Malgré ces alertes répétées, aucune mesure concrète n’a été prise par la municipalité pour atténuer le problème. Aucune haie, palissade anti-bruit, ou autre solution n’a été mise en place pour contenir les débordements sonores.
Une situation floue
Mais les nuisances sonores ne sont qu'une partie du problème. Le cœur du litige repose sur une question juridique complexe, soulevée par le requérant : le club de plage, désormais implanté sur le site de Roc'h Gwen, doit-il être considéré comme un "accueil de loisirs sans hébergement" (ALSH) ou comme un établissement d’activités sportives (EAPS) ?
L'enjeu est crucial pour la commune, car si le site est considéré comme un ALSH, la maire, Denise Prud'homm, encourt une sanction pénale, six mois de prison et 3 750 € d’amende, pour ne pas avoir fait la déclaration nécessaire.
La situation est floue : les activités proposées vont des olympiades sportives à la peinture sur coquillages. "Des établissements peuvent se retrouver simultanément sous les deux régimes", a expliqué la magistrate, signalant une zone grise juridique. Toutefois, elle a estimé que les activités n’ont pas évolué au point de nécessiter une déclaration préfectorale. La maire s’en sortirait donc sans condamnation sur ce point, mais la question reste délicate.
Une indemnisation partielle, un voisin fatigué
Si la municipalité échappe à une lourde sanction pénale, elle n’échappe pas à la responsabilité des nuisances sonores. La rapporteuse publique a recommandé une indemnisation à hauteur de 11 500 € pour Jean-Paul XXX, estimant que la mairie aurait dû user de ses pouvoirs de police pour garantir la tranquillité publique. En plus de l’absence de mesures anti-bruit, la commune a refusé à M. XXX la possibilité de planter une haie, sous prétexte de protéger une zone humide, accroissant encore la frustration du plaignant.
Le climat local ne s'est pas apaisé pour autant. Jean-Paul XXX se dit victime d'attaques sur les réseaux sociaux après que son identité a été dévoilée. La présence de gendarmes chez lui pour une affaire de photos d’enfants prises depuis sa propriété n’a fait qu’aggraver son sentiment d’être stigmatisé.
L’affaire est donc loin d’être résolue. "La commune a passé son temps à le dénigrer et à lui mettre des bâtons dans les roues", s’est insurgé son avocat, qui n’écarte pas la possibilité que son client vende sa propriété dans les mois à venir. La cour rendra son jugement définitif dans les prochaines semaines, mais l’avenir du club de plage, lui, reste suspendu aux décisions des juges.
avec Guillaume Frouin de PressPepper