Premières messes post-confinement: "Ce que Dieu veut, c'est l'homme debout, l'homme vivant"

Après plus de deux mois d'interruption, les célébrations religieuses peuvent reprendre dès ce week-end dans le respect des règles sanitaires. Un décret l'autorisant est paru ce samedi soir. En Bretagne, les paroisses se préparent à organiser de nouveau des messes dans les églises.


"C'est une très grande joie pour les chrétiens et pour tous ceux qui pratiquent une religion en France !", s'exclame le Père Serge Kougnandé, curé de la communauté pastorale Notre Dame des Sources dans les Côtes-d'Armor.

Dès dimanche matin, il célèbrera l'une des deux messes prévues sur la communauté qui regroupe quatre paroisse (celles de Quintin, Plaintel, Ploeuc-sur-Lié et Chatelaudrun). "Il y en aura une à 10h30 à Mélo et moi-même, je serai à la basilique Notre-Dame de Délivrance à Quintin."
Voilà plus de deux mois que le Père Kougnandé attend cela. La dernière fois qu'il a célébré une messe devant une assemblée, c'était le 14 mars. Le soir même à minuit, toutes les célébrations religieuses étaient interdites. 

"Avec notre équipe de coordination pastorale [soit une dizaine de laïcs bénévoles], nous avons échangé toutes les semaines pour préparer le déconfinement".
 

Une répétition générale


Autant dire que la reprise est rodée: comité d'accueil à l'entrée de l'église pour distribuer du gel hydro-alcoolique aux paroissiens par ailleurs invités à venir masqués (c'est obligatoire), un espacement d'un mètre entre chaque place et un banc sur deux neutralisé. "Nous prévoyons un espace dédié pour permettre aux familles de rester ensemble mais en séparant bien chaque famille". Pas de chorale ni d'enfant de choeur, une liturgie adaptée avec, notamment, une seule personne pour assurer les lectures "afin que le livre ne passe pas de mains en mains". D'autres mesures comme renoncer provisoirement au geste de paix (serrement de mains), vider les bénitiers avaient déjà été mises en place fin février.

Pour être certains de ne rien laisser au hasard, et parce que "la santé de son prochain, y'a pas à marchander", le Père Kougnandé et l'équipe d'animation paroissiale ont organisé une répétition générale ce samedi après-midi "histoire de bien délimiter les emplacements de chacun et vérifier les plans de circulation dans nos églises."
 

Pour autant, le clerc ne s'attend pas à voir l'assemblée des grands jours dès ce week-end. "A la basilique de Quintin, la capacité habituelle de 500 fidèles a été rabaissée à 150-200. Je pense qu'il n'y aura pas autant de monde. Beaucoup de paroissiens vont se déconfiner progressivement et attendre de voir les jours prochains."
 

L'homme est fait pour s'adapter et on va s'adapter


Impatient et heureux de reprendre, le curé admet toutefois que tout ne sera pas parfait dès le premier jour. "Il y aura des réflexes, c'est sûr. Et puis nous ne sommes pas habitués à nous voir tous avec un masque. Mais l'homme est fait pour s'adapter et on va s'adapter." C'est d'ailleurs un message que le Père compte marteler au début et à la fin de l'office. "Les générations passées ont connu la guerre, dans d'autres pays, ce sont des catastrophes naturelles. A chaque fois, il a fallu faire avec. C'est notre tour de modifier nos habitudes." Avec un mot d'ordre: ne pas déroger aux règles sanitaires parce que "ce que Dieu veut, c'est l'homme debout, l'homme vivant". 
 

Pas de précipitation


Soulagement et prudence. C'est également ce qui résume la réaction de Monseigneur Denis Moutel, évêque du diocèse de Saint-Brieuc et Tréguier.

"L'autorisation de la reprise des cultes nous réjouit surtout à l’approche de la grande fête de la Pentecôte que nous préparons activement, explique-t-il. Même si des messes sont célébrées dès ce week-end dans le diocèse, il nous reste une semaine pour nous retourner. Il n'est pas question de s'engager sur des ouvertures d'églises pas ou mal préparées."
Et Monseigneur Moutel de rappeler que la tradition de l'Eglise catholique, c'est d'abord de veiller à son prochain. "Nous nous devons d'être exemplaires. Et si les conditions ne semblent pas réunies dans un lieu, tant pis. La liberté, ici de culte, s'accompagne toujours d'une responsabilité."

Pour aider les curés à remettre la machine en route, le diocèse a adressé à chaque paroisse un document rappelant quelques dispositions pratiques à adopter. Ainsi, pour l'Eucharistie, dans la mesure du possible, il est demandé au célébrant de se déplacer pour remettre l'hostie aux fidèles "ce qui est préférable à une procession qui traverse l'église".

Lundi, le diocèse recevra du gel hydro-alcoolique en quantité pour le distribuer aux paroisses qui en manquent. 
 

Une préparation spirituelle


"S'il y a des églises à préparer, nous devons aussi prendre le temps d'une préparation spirituelle", note Monseigneur Moutel. "Aller à l'église, ce n'est pas comme acheter un bien de consommation (...) Certains auront pu éprouver un manque à ne pas pouvoir communier pendant tout ce temps. Ce peut être une bonne chose et l'occasion de réfléchir sur ce que cela nous apporte vraiment à nous, chrétiens."
   

Le problème des églises trop petites


La reprise peut toutefois s'avérer plus compliquée dans certaines petites paroisses.

Ainsi à Combourg, en Ille-et-Vilaine, le curé reconnait avoir encore besoin d'un peu de temps pour remettre des offices en place.
"Notre paroisse compte 13 clochers, souvent de toutes petites églises (Lanhélin, Lanrigan, Tressé, Saint-Pierre de Plesguen...) dans lesquelles il sera impossible de réduire encore le nombre de places", explique le père Jean-Pierre Djihounouck. Habituellement, une messe dominicale est célébrée dans l'une de ces communes à tour de rôle. "Là nous allons devoir nous concentrer sur les églises de Combourg, Bonnemain et Meillac qui sont plus grandes". 

Un peu perdu, le prêtre dit attendre des consignes précises du diocèse. "On va informer les gens de venir avec leurs masques mais comment faire si certains se présentent sans ?", interroge-t-il. "Nous avons bon nombre de personnes âgées dans nos communautés, sauront-elles se plier aux contraintes ? Certaines ont déjà fait savoir qu'elles attendront avant de revenir à l'église."
 

Et les mariages, baptêmes ?


Autre question en suspend: quand sera-t-il possible de reprendre les cérémonies avec sacrement qui imposent un contact physique comme le baptême avec l'eau ou encore le mariage ?

Voilà plus de deux mois que ces célébrations sont interdites... autant de quêtes qui n'ont pas eu lieu non plus. Et pour bien des paroisses, la trésorerie est au plus bas. "D'autant que les charges fixes restent", rappelle le Père Djihounouck. 
 
Pas de fête de l'Aïd dans les mosquées ni de Pentecôte juive dans les synagogues
Ne pas courir de risque pour sa vie dans sa pratique religieuse est aussi un principe de l'Islam et du judaïsme.

L'Aïd El Fitr, marquant la fin du Ramadan dimanche 24 mai, ne pourra pas être célébré dans les mosquées en Bretagne. 
"Avant d'accueillir du monde de nouveau, il nous faut tout désinfecter (locaux, tapis...)", explique Mohamed Zaidouni, président du Conseil Régional du Culte Musulman en Bretagne. 
 "La fête pour la fin du Ramadan 2020 se déroulera donc dans les familles en petits comités."

Pas de célébration non plus de Chavouot, la "Pentecôte juive" les 29 et 30 mai, dans les synagogues. La communauté juive ne prévoit pas de réouverture des synagogues avant le mois de juin, sans fixer de date précise. "Notre communauté est constituée à 80% de personnes âgées. Nous ne voulons leur faire courir aucun risque", explique une représentante de l'Association Culturelle & Cultuelle Israélite de Rennes.
 
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