En janvier 2021, une intervention de sauvetage de la SNSM tourne mal dans le Calvados : le Breiz, un coquiller, coule lors de son remorquage, faisant trois victimes. Le procureur a requis un an de prison avec sursis et deux ans d'interdiction de naviguer à l'encontre du patron du canot. Par solidarité, la SNSM de Loguivy-de-la-mer maintient ses bateaux à quai.
La station SNSM de Loguivy-de-la-mer, dans les Côtes-d'Armor, est indisponible pour une durée indéterminée. "À la lumière des risques judiciaires encourus en cas d'accident en intervention, et en soutien à notre collègue Philippe Capdeville, patron bénévole à la station d'Ouistreham, les patrons de sortie de la station de Loguivy-de-la-Mer ont décidé d'exercer leur droit de retrait et de ne plus embarquer jusqu'à nouvel ordre", explique Charlotte Spillemaecker, sauveteuse embarquée et radio-navigatrice à la SNSM de Loguivy-de-la-mer.
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Le navire coule en plein remorquage
Un mouvement qui fait écho à un fait divers : le 14 janvier 2021, au large d'Ouistreham (Calvados), le Breiz, un navire de pêche à la coquille, se trouve en difficulté dans le mauvais temps. Lors d’une opération de remorquage conduite par un canot tous temps de la SNSM, le navire chavire et coule instantanément, avec trois marins pêcheurs à son bord, qui mourront noyés.
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"Un bénévole de la SNSM devant la justice, c'est du jamais vu"
Un drame qui prend une tournure judiciaire. Philippe Capdeville, le patron du canot de la SNSM d'Ouistreham, jugé pour négligence, a dû s'expliquer début avril devant le tribunal maritime du Havre sur la nuit du 14 janvier 2021. Le procureur a requis un an de prison avec sursis et deux ans d'interdiction de naviguer, à l'encontre du sauveteur bénévole depuis 37 ans, qui compte pas moins de 900 interventions à son actif, a rappelé son avocat. Le jugement a été mis en délibéré au 4 juin.
"Un bénévole de la SNSM devant la justice, c'est du jamais vu. Nous ne demandons pas une immunité qui serait illégitime, il est évident que personne ne doit être exonéré de ses responsabilités. Cependant, les sauveteurs embarqués ne devraient pas avoir à assumer devant la justice celles qui ne sont pas de leur ressort, comme la vétusté du bateau secouru, les qualifications de son équipage, le non-respect de la réglementation, etc.", poursuit Charlotte Spillemaecker.
"Nous souhaitons que chacun, au-delà des articles de presse relatant partiellement le naufrage et le procès, prenne connaissance du rapport du BEA Mer qui apporte un éclairage complet sur les circonstances de cette tragédie", ajoute-t-elle.
Nous, notre problématique, c'est le statut juridique des patrons de sortie. Ce qui nous inquiète, c'est que l'on n'a aucune protection.
Charlotte SpillemaeckerSNSM de Loguivy-de-la-mer
Charlotte Spillemaecker tient à bien préciser les choses : "Nous, notre problématique, c'est le statut juridique des patrons de sortie. Ce qui nous inquiète, c'est que l'on n'a aucune protection, à l'inverse des pompiers par exemple. On aimerait un statut plus favorable. Certains de nos patrons sont marins professionnels en exercice, et ne peuvent prendre le risque de se voir retirer leurs brevets et de perdre leur emploi".
"Chacun d'entre nous — y compris les sauveteurs les plus expérimentés, comme Philippe – peut malheureusement participer à une intervention difficile qui tourne mal, et le drame du Breiz est là pour nous le rappeler. Nous sommes de tout cœur avec Philippe, ses proches, et les équipiers d'Ouistreham ; et nos pensées vont évidemment aux familles des trois jeunes marins disparus du Breiz", conclut-elle.
Pour l'heure, en Bretagne, la station SNSM de Loguivy-de-la-mer est la seule à avoir exercé ce droit de retrait. Les stations SNSM d'Ouistreham, Deauville et Trouville sont, elles aussi, indisponibles jusqu'à nouvel ordre.