Covid 19. Y-a-t-il trop d'usines de masques en Bretagne ?

Avant la crise du Covid, il n’y avait plus aucune usine de masques en Bretagne. Depuis, elles sont cinq dans la région. A elles cinq, elles fabriquent près de 30 millions de masques par mois. Certaines embauchent et continuent à augmenter leur production. D'autres connaissent de réelles difficultés.

Chacune de ces cinq usines implantée en Bretagne a ses spécificités, ses modes de fonctionnement et ses ambitions. L'une veut produire 70 millions de masques et voudrait arriver à 200 000 millions rapidement. L'autre veut rester sur un marché local et jouer la fibre militante. Une autre fournit essentiellement des salariés et les magasins Netto et Intermarché.

Toutes misent sur un fort développement

Alors que les marchés sont toujours tendus et que la concurrence asiatique est très forte, elles parient sur les appels d'offre en cours dans les administrations et les hôpitaux. Selon le président du syndicat des fabricants de masques, des stocks de masques asiatiques très importants avaient été faits lors de la pénurie, ces stocks sont quasi épuisés, et offrent de nouvelles perspectives aux fabricants français, à condition que les pouvoirs publics jouent le jeu du masque français. 

Dans ce supermarché de Mélesse, les masques installés en tête de gondole sont fabriqués à quelques kilomètres. A Québriac. Ce sont les masques de la société MP Tec. Dans cette grande surface, il s’en écoule plus de 250 boîtes par semaine. Ces clientes, Amélie et Catherine rencontrées devant en bout de rayon, savent qu'elles achètent des masques locaux et reconnaissent un prix correct et une qualité à la hauteur. 

Pour le patron de MP Tec, Pascal Lecointe, les grandes surfaces de la région jouent le jeu. Il en reste beaucoup à convaincre, mais on trouve de plus en plus facilement de masques français.

Aujourd'hui, dans les supermarchés qui vendent du masque français et qui continuent à vendre du masque chinois, la proportion est d'environ 20% d'achats de masques chinois 

Pascal Lecointe, patron MP Tec

Ils misent sur la qualité et aussi sur la mode avec des couleurs et des motifs de saison

MP Tec fabrique des masques avec des matières premières achetées en France ou en Europe, depuis novembre 2020. 5 millions par mois, ¼ part pour les grandes surfaces.

La boîte de 50 coûte 4 euros 95, entre 2 à 3 fois plus cher que le masque chinois. L’entreprise mise sur une plus grande qualité. Pierre-Marie Fleury, directeur commercial de MP Tec, ces masques sont effectivement de meilleure qualité que ceux qui viennent d'Asie.

"Il y a eu des problèmes d'odeur dans les masques asiatiques, vous ne trouverez jamais ça dans les nôtres. La barre nasale est aussi de meilleure qualité, elle évite la buée sur les lunettes". Chez MP Tec, ils jouent aussi sur les couleurs, les tendances… Pour les fêtes de fin d'année, ils viennent de sortir un masque avec des motifs de Noël. 

A chaque annonce gouvernementale, les commandes augmentent

L'entreprise de Québriac a vu ces commandes augmenter de 30% depuis la dernière annonce du gouvernement et "on sait que les augmentations vont se poursuivre dans les semaines qui viennent", explique Pascal Lecointe.

Des perspectives pour toutes les entreprises de la région.  La Coop des masques, proche du dépôt de bilan, il y a quelques mois, semble avoir retrouvé un peu de trésorerie. Elle fabrique aujourd’hui 70 000 masques par jour et a écoulé ses stocks.

Chez Diwall, dans le Finistère, l’entreprise joue sur le côté militant avec le nom Diwall (Se protéger en breton) et le triskell, imprimés sur chaque masque. Et ça marche, avec une boîte à 18 euros, les 50 masques et des matières premières qui viennent d’Asie.

Une deuxième ligne a été installée il y a quelques mois, mais l’entreprise n’a pas vocation pour autant, à s’industrialiser davantage, et veut répondre aux besoins locaux seulement. Pour les responsables de Diwall, les particuliers et les entreprises locales sont les clients principaux. Ils ne visent pas les administrations.

 

Des entreprises automatisées pour rester compétitives

Chez m3 Sanitrade, à Ploufragan, ce n'est pas le directeur du site qui nous reçoit, mais le directeur industriel du groupe franco-suisse. m3 Sanitrade est une entité franco-suisse de m3Groupe qui fabrique des solutions de protection sanitaire innovantes.

L’usine a été entièrement automatisée. C’est l’une des plus grandes de la région. Elle est installée sur l'ancien site de Chaffoteaux et Maury : 25 000m2, 3 lignes de production (1 pour les masques chirurgicaux, 2 pour les masques FFP2), une 4ème pour les masques chirurgicaux, à venir. Elle emploie 36 salariés.

Leur capacité de production est de 70 millions de masques annuels, ils visent les 200 millions par an d'ici 2023.

Eux aussi ont eu un pic de commandes ces dernières semaines. "Nous sommes passés en 3/8, 5 jours sur 7, et allons probablement activer les équipes du week-end pour servir le plus rapidement possible nos clients", expliquent leurs responsables. A cette cadence, une machine produit 120 000 masques jour. 

En revanche, la fabrication du masque FFP2 tourne au ralenti, faute de commandes. 

Fabriquer les filtres des masques pour être autonomes

m3 Sanitrade fournit le secteur de la santé, (milieux hospitaliers pharmaceutique et vétérinaire), celui des industries et des zones de passage, du type, gare, aéroport etc. 

Dans un des bâtiments, un chantier est en cours de finition, m3 Sanitrade installe une machine qui va fabriquer en continu le meltblown, ce matériau textile non tissé, qui est le filtre du masque. Un investissement de près de 12 millions d'euros, pris en charge à 30% par l'Etat. Elle devait fonctionner dès cet été, elle pourrait être opérationnelle dans quelques semaines.

Elles ne tournent pas à plein régime

Dans la région, une usine fabrique déjà ces filtres. Lydall, elle est installée à Melrand (Morbihan). Elle aussi a investi, et a reçu des subventions de l’Etat. Mais aujourd’hui, elle ne fonctionne pas à plein régime. Les dirigeants sont déçus par le niveau d'activité. Parmi les cinq usines de masques bretonnes, trois se fournissent chez eux.

Les dirigeants de Lydall s'étonnent aussi des prix pratiqués par l'Asie, au vu de l'augmentation des coûts des matières premières et du transport. 

A quelques kilomètres de Lydall, à Ploërmel, une autre usine de masques fonctionne à plein. Celluloses de Brocéliande. Depuis octobre 2020, l'usine située à Ploërmel dans le Morbihan, fabrique des masques FFP2 et chirurgicaux. Les masques chirurgicaux sont accessibles à tous dans les rayons des Intermarché et des Netto, propriétés du groupe auquel appartient aussi l'usine des Celluloses de Brocéliande.

Il y a une place pour tout le monde

Selon les interlocuteurs rencontrés, ces cinq projets peuvent parfaitement coexister. Ils se disent sur un marché extrêmement vaste, où il a de la place pour tout le monde d'autant que les ancrages sont différents, les terrains de jeux également. Ils affirment être en concurrence surtout avec les produits qui viennent d’Extrême-Orient et d’Asie, de Chine. 

Pour Christian Glaenzer, de m3 Sanitrade, il y a un pôle de compétences en Bretagne. Il propose de parler avec tous les interlocuteurs et d'essayer de voir comment ils peuvent harmoniser leurs fabrications. 

Je pense qu’il y a de la place pour tout le monde sur un marché très important. Il ne faut pas oublier que, rien que sur le marché de la santé, on parle d’une consommation de 100 millions de masques par semaine, donc ce sont des volumes gigantesques.

Christian Glaenzer, directeur industriel de M3 Sanitrade

L'espoir : des stocks qui se vident et des appels d'offre en cours

Le syndicat des fabricants français de masques estime que les administrations se sont fournies à 95% en Asie. Or les stocks faits au moment de la pénurie se vident.

Pour les prochains appels d’offre, les entreprises bretonnes espèrent que le prix ne sera plus le critère numéro 1 et qu’une clause de préférence européenne sera rapidement adoptée.

Ils pensent aussi que ces besoins en masques existeront toujours. "Ce réflexe de porter le masque, va perdurer au-delà de la pénurie " selon Christian Glaenzer. 

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