Documentaire. "Pour deux centimes de plus...", le défi fou de la Coop des masques

Lors de la pandémie 2020, la Coop des Masques voit le jour près de Guingamp. L’entreprise portée par un groupe local de citoyens costarmoricains veut répondre à la pénurie de masques et assurer sa pérennité sous le modèle d’une société coopérative. Le réalisateur Simon Coss a suivi pendant un an ce pari fou.

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En 2018, l’usine de masques de Plaintel située dans les Côtes-d’Armor, ferme ses portes et se délocalise en Tunisie. En pleine crise sanitaire et pénurie de masques, un collectif de citoyens se constitue pour créer une SCIC, Société coopérative d’intérêt collectif. En quelques mois, ils se mobilisent  pour relancer la production de masques sur un nouveau site et avec une nouvelle équipe. Pour Patrick Guilleminot, directeur général de la Coop c'est un gros défi car "il y a tout à construire, tout à écrire."

Malgré un bon départ, ils doivent faire face à de nombreuses difficultés, mais leur motivation les pousse à les surmonter.

Le documentaire : pour deux centimes de plus

Un pari fou à relever

Dès 2018, la délocalisation de l’usine de masques de Plaintel qui fonctionnait depuis 44 ans est un coup de massue pour les Bretons. Lors de la pénurie de masques en 2020, une idée émerge, pourquoi ne pas ouvrir une entreprise afin de produire des masques.

Si on ne se mobilise pas en tant que citoyen, il ne se passera rien. Il faut proposer un nouvel outil industriel, une coopérative ouvrière

Serge Le Quéau, militant syndicaliste

Le projet prend vie avec le soutien de Guy Hascoët, ancien secrétaire d’Etat à l’économie solidaire, partisan des coopératives. Sa notoriété politique lui permet de créer la rencontre entre le collectif de citoyens et le président du département des Côtes-d’Armor, Alain Cadec, ainsi que le président de la région Bretagne, Loïg Chesnais-Girard.

C’est un projet coopératif hors du commun car il rassemble des personnalités de partis politiques différents, des citoyens sociétaires, accompagnés par des partenaires publics et privés. L’objectif : produire assez de masques pour couvrir l’ensemble des besoins en Bretagne.

En huit jours, l'aventure est lancé. Les décisions sont prises rapidement car la demande de masques est importante en France : "il fallait aller très très vite puisqu’on savait très bien que le manque de masques était maintenant" confie Patrick Guilleminot, directeur général de la Coop.

Juin 2020, tout s’enchaîne, création du conseil d’administration, investissement de plus de 1000 citoyens dans le projet coopératif, installation et rénovation des locaux, lancement de la production, recrutement des salariés.

Mais qu’est-ce qui fait la force de La Coop des Masques dans sa construction aussi rapide ?

Une organisation bretonne forte portée par les citoyens

La Coop des Masques est portée par des Bretons animés par une même envie, relancer la production. Les citoyens qui rejoignent le projet "n’attendent pas de retour sur investissement, ils ont un vrai sens de l’intérêt général" revendique Serge Le Quéau. L'équipe dirigeante part de rien, les premiers moments de vie au bureau sont chaotiques. Pas de connexion internet, l’entrepôt est en pleine rénovation, tout le monde est poussé à son maximum pour commencer le plus tôt possible.

La particularité de cette entreprise : les citoyens sociétaires. Avec la SCIC, tout le monde est associé à toutes les avancées du projet, personne n’est laissé à l’écart "pour moi être sociétaire, c’est prendre des décisions, être investie" explique une salariée.

De plus, l’entreprise cherche à appliquer la mixité dans le recrutement de ses employés, et ceci malgré un nombre de candidatures élevées, 200 pour 20 postes. Le directeur exprime ainsi sa "volonté d’une mixité sociale, de donner la chance à ceux qui ne l’avait pas". Au sein du personnel, il y a 30% de personnes reconnues en situation de handicap.

Malheureusement, les ennuis s'accumulent : retards de livraison des machines, leur mise en route laborieuse et le refus de certification des masques décalent le début de la production et donc de la vente. Mais la motivation et l’endurance de tous leur permettent de ne pas baisser les bras. Des efforts récompensés par le lancement de la production en janvier 2021.

Autonomie française face à une concurrence forte de la Chine

L'entreprise tient à produire des masques français et dans un contexte écologique. Afin d’être cohérent, la Coop fait le choix de se fournir dès que possible en France. Si ce n’est pas possible, elle se tourne vers des pays d’Europe. Ne pas se fournir en Chine est une règle de base pour aller au bout de sa démarche.

Or la législation française est plus stricte qu’en Chine. La Coop fait tout pour respecter les critères sociaux, écologiques et économiques imposés. Malheureusement, la désillusion frappe les salariés de plein fouet. Les hôpitaux, premiers consommateurs de masques chirurgicaux, continuent à acheter des masques en Chine. La raison ? Leur prix moins élevés dus à des salaires très bas et des contraintes écologiques inexistantes.

C’est un "vrai parcours du combattant" explique Jessica Le Badezet, responsable communication. Il faut écouler le stock de masques face à une concurrence déloyale subie et sans aide de l’Etat qui prône pourtant le consommer français.

Le modèle économique de la Coop des Masques se base sur une volonté de pérennité de l'activité : produire de manière juste, sans faire de profit mais gagner assez pour continuer à faire vivre l’entreprise sur les années à venir.

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