La Bretagne est restée fidèle à elle-même : européenne, centriste. Le Rassemblement National y progresse relativement moins. Les écologistes confirment leur percée et la droite (LR et UDI) dégringole. Les élections se suivent et ne se ressemblent pas. N’empêche, les municipales arrivent...
Même si la Bretagne a de nouveau largement voté pour la liste LREM/Modem emmenée par Nathalie Loiseau (25,62%), confirmant l'avance enregistrée par le parti d'Emmanuel Macron lors de l'élection présidentielle (dix points au dessus de la moyenne nationale), les prochaines élections municipales ne sont pas gagnées d'avance.
Les points faibles de LREM pour les municipales
En effet, le scrutin local valorise généralement les réseaux, l'ancrage d'une personnalité et les élus sortants. Autant de caractéristiques qui font souvent défaut aux candidats LREM.
Cela étant, en arrivant en tête dans les quatre départements bretons avec un score à chaque fois supérieur à 24%, la majorité présidentielle s'avère capable de rallier des candidats modérés qu'ils soient originaires de droite ou de gauche.
Le Breizh Lab, laboratoire d'idées progressistes créé par Jean-Yves Le Drian, devrait assurément oeuvrer en coulisses en ce sens au cours des huit prochains mois.
Les écologistes tiennent la dragée haute
On savait les électeurs bretons particulièrement sensibles à l'écologie et le mouvement bénéficie traditionnellement du scrutin européen. La nouveauté, c'est que ses électeurs l'associent désormais à un vote utile. Plus de quarante communes bretonnes ont ainsi placé EELV en tête.
Aujourd'hui, les écologistes représentent la première force politique de gauche dans la région. C'est vrai dans les principales villes bretonnes comme Vannes, Saint-Brieuc, Lorient et surtout Rennes ainqi que Brest. Dans les deux métropoles bretonnes, EELV siège déjà dans la majorité municipale. Les scores obtenus le 26 mai aux Européennes bousculent le rapport de forces.
Forts de cette nouvelle donne, les écologistes envisageront plus facilement de conduire leur propre liste en tenant la dragée haute aux élus socialistes. La prise d'une ville comme Grenoble en 2014 s'avère un scénario envisageable pour 2020.
Cela n'a pas échappé à Pierre Breteau, maire centriste de Saint-Grégoire (Ille-et-Vilaine), conseiller régional et leader de l'opposition à Rennes Métropole, qui analyse ainsi les résultats de ces Européennes: "Les Verts et leurs alliés constituent la première force politique d'opposition à Rennes et sont donc fondés à nourrir, comme à Grenoble, des espoirs pour les élections municipales.(...) Malgré le soutien unanime de tout le "système politique local" (Madame la Maire de Rennes, le Président de la Métropole de Rennes, le Président du département d'Ille-et-Vilaine, le Président de la région Bretagne, etc...), la liste conduite par M.Glucksmann est en 3ème ou 4ème position. Cela démontre la perte de crédibilité des élus des différentes majorités locales."
Rassemblement national: quel enracinement en Bretagne ?
Partout en Bretagne, le mouvement de Marine le Pen renfonrce son socle électoral en arrivant en deuxième position à 17,31%, soit un score équivalent à celui des dernières Européennes. Bien que très en dessous de la moyenne nationale, il engrange de nouveaux suffrages.
Mais les prochaines municipales feront figure de test quant à son réel enracinement en Bretagne. Capter la colère dans le cadre d'un scrutin national est une chose, se voir confier les clés d'une collectivité locale en est une autre...
Une droite bretonne au bord du divorce ?
Les Républicains totalisent un score historiquement bas (7,83%) alors que l'UMP était arrivée en tête aux Européennes de 2014 avec 18,41% et que François Fillon talonnait Jean-Luc Mélenchon au premier tour de la Présidentielle en 2017. Dégringolade aussi pour l'UDI qui tombe à 2,57%.
A ce niveau, on se demande comment l'opposition régionale pourrait partir à nouveau unie aux élections régionales, en 2021. L'appel à voter pour la liste LREM de conseillers régionaux centristes, comme Bernard Marboeuf, Isabelle le Bal, Pierre Breteau ou Stéphane Roudault, a validé un peu plus un divorce sans doute irréversible.
Majorité régionale: des secousses en perspective
En avril dernier, de passage à Saint-Brieuc pour le congrès des maires, Emmanuel Macron avait tenté d'obtenir du président de la Région Bretagne qu'il rallie la liste Renaissance. En vain. L'élu breton a finalement choisi la fidélité et la liste conduite par le PS et Raphaël Glucksmann.
La majorité plurielle au Conseil régional pourrait donc connaître quelques secousses. Car il se joue en coulisses un duel entre Richard Ferrand, député LREM du Finistère, et le ministre des Affaires étrangères, Jean-Yves Le Drian. L'actuel Président de l'Assemblée nationale militerait à la Région pour la constitution d'un groupe LREM autonome. Jean-Yves Le Drian, lui, souhaite préserver l'alliance avec les élus socialistes de la région.
Il faudra donc suivre attentivement le choix de Loïg Chesnais-Girard pour remplacer son vice-président, Pierre Karleskind désormais nouvel eurodéputé LREM. Ce choix devrait donner quelques indications sur la stratégie que suivra le président de la Région.