Elections régionales et départementales. Un report possible divise les élus

Les maires avaient jusqu’à midi ce lundi pour adresser aux préfets leur avis sur le report ou non des élections régionales et départementales. Certains s'interrogent sur la méthode, d'autres sur la faisabilité du scrutin. Le débat se prolongera ce mardi 13 avril au Parlement.

A la demande du Gouvernement, le message des préfectures est arrivé vendredi dernier dans les boîtes mail de tous les maires bretons. Il leur était demandé d'indiquer "par oui ou par non si les conditions préconisées par le comité scientifique" leur "semblent réunies pour tenir les deux scrutins prévus en juin prochain".

Les maires avaient ensuite 48 heures pour faire connaître leur réponse par mail d’ici midi ce lundi. Le ministre de l'Intérieur, Gérald Darmanin s'est félicité d'une forte participation évaluée à 69 %. Une consultation express car ces remontées sont en effet attendues avant le débat à l’Assemblée nationale et au Sénat prévu ce mardi. Débats qui se conclueront par un vote.

                                                     


Un mail qui surprend

Cette sollicitation de dernière minute a été diversement apprécié chez les maires bretons.

« J’ai répondu par courtoisie au Préfet des Côtes d’Armor, mais je n’ai pas souhaité répondre par oui ou par non au questionnaire. Nous sommes élus mais aussi, en ce qui concerne le vote, agents de l’État. Ce n’est pas à nous de trancher cette question ! »  explique Arnaud Lécuyer, maire (PS) de Saint-Pôtan, petite commune de 600 habitants. L’élu, par ailleurs pressenti pour être le directeur de campagne du président de Région, Loïg Chesnais-Girard, aux prochaines éléctions régionales, a tout de même critiqué dans un communiqué l’attentisme du Gouvernement.

Etonnement affiché également du côté du maire (DVD) de Ploemeur, Ronan Loas qui, dans sa réponse au Préfet du Morbihan, souligne avec ironie :« Je m’étonne de cette concertation si tardive mais j’espère qu’il s’agit d’un précédent  à une coopération plus étroite avec les communes faites de concertations plus régulières à l’avenir. » Celui qui est conseiller départemental sortant a d’ailleurs été jusqu’à publier un petit sondage teinté d’humour sur les réseaux sociaux.

La démarche du gouvernement a été tout de même bien perçue par le maire de Saint-Grégoire, Pierre Breteau, également président de l’association des maires d’Ille-et-Vilaine :  « On râle quand on est pas suffisamment consulté. Là on l’est. Je m’en rejouis » .

 

Les maires en première ligne 

Le maire brétilien souhaite le report des éléctions départementales et régionales : « Si je suis les recommandations exprimées par le Conseil scientifique, moi je ne sais pas faire. Le jour d’une élection, j’ai 180 personnes mobilisées dans les bureaux de vote. Leur mettre 180 écouvillons dans le nez deux jours avant le scrutin, ce n’est possible pour ma commune. Quant à la vaccination des assesseurs, si l’on veut respecter les délais entre les injections, il faudrait l’avoir fait dans une semaine. C’est impossible ! »                        

La réponse de Pierre Breteau, maire de Saint-Grégoire (35) , consulté sur un report ou pas des élections régionales et départementales.

D’autres élus estiment que l’on peut matériellement organiser ces élections en juin. Déjà favorable à des expérimentations de dé-confinement dès le mois de mai, le maire de Ploemeur, Ronan Loas, y croit mais pose des limites. « Je peux garantir la faisabilité du scrutin qu’aux conditions sanitaires telles que nous les avons connues lors du scrutin des municipales. Toute exigence et obligation supplémentaire rajoutera inévitablement des difficultés » précise le maire morbihannais.

« Reporter encore une fois ce scrutin (prévu initialement en mars 2021), c’est discréditer les instances que sont nos départements et nos régions. On a besoin d’avoir du dynamisme. Il faut que les projets progressent » rajoute la maire de Baud (Morbihan), Pascale Gillet interviewée dans le reportage de France 3 Morbihan. 

 

Le vote des parlementaires décisif ?

Ce débat sera au cœur des discussions ce mardi à l’Assemblée nationale et au Sénat. Et cela se conclura par un vote. Car si les élections départementales et régionales sont à nouveau décalées dans le temps, il faudra passer par le vote d’une nouvelle loi.

Le président (LREM) de l'Assemblée nationale, Richard Ferrand, s'est quant à lui prononcé la semaine dernière en faveur d'un report de ces élections au "tout début du mois d'octobre", soutenant une position inverse à celle de son parti. « Nous pourrions ainsi bénéficier pleinement des effets de la vaccination de la moitié de nos compatriotes dès la fin de l'été, comme l'a annoncé le président de la République, et offrir à tous les candidats la possibilité de mener une campagne électorale normale », a-t-il plaidé dans un courrier adressé au Premier ministre, et consulté par l'AFP. « À défaut d'octobre, très subsidiairement, les 20 et 27 juin semblent plus favorables que les 13 et 20 juin », a-t-il ajouté.

Position soutenue par le député LREM d’Ille-et-Vilaine, Florian Bachelier, interrogé par France 3 Bretagne : « Les partis politiques sont en décalage avec les réalités de ce pays. Les français et les élus de terrain sont concentrés sur quatre sujets : la santé, l’emploi, l’école et la sécurité. La priorité n’est pas l’attribution des petits fauteuils et des rentes. Il y a une forme d’indécence dans ce débat » estime le député brétilien qui ne s’offusquerait pas d’un report en 2022 après l’élection présidentielle.

Dans l’opposition, on voit les choses différemment. « Il ne faut pas mettre la démocratie dans le formol. Le Président de la République envisage pour la mi-mai des réouvertures de lieux publics, des reprises d’activité. Pourquoi nous ne serions pas capable de voter un mois plus tard ? » fait remarquer le sénateur communiste costarmoricain Gérard Lahellec. « Douze pays européens ont déjà organisé des élections en pleine crise sanitaire. Pourquoi pas la France ? Et puis la campagne des régionales a déjà commencé. Alors que le match débute pourquoi changer les règles ? » estime le député Marc Le Fur, chef de file de la liste LR dans les Côtes d’Armor pour les élections régionales.

 

Une drôle de campagne ?

Face à un calendrier électoral incertain et déjà sérieusement réduit par le contexte sanitaire, certains parlementaires réclament d’ailleurs dès à présent pour les candidats des autorisations de sortie à plus de 10 km de leur domicile.

« Pas sûr que cela soit très bien percu par nos concitoyens » estime le maire (PS) de Saint-Pôtan, Arnaud Lécuyer. « En revanche, on sait tous que la campagne se jouera sur le numérique et via la presse. Une convention avec les grands médias bretons pourrait d’ailleurs être négociée ».

Après le vote des parlementaires, la balle sera cette fois-ci dans le camp du Gouvernement. Comme le disait à juste titre Pierre Mendès-France: « Gouverner, c'est choisir, si difficiles que soient les choix ».

 

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