10 jours de procès pour essayer d'éclairer la mort de l'étudiant breton Clément Méric

Cinq ans après la mort de Clément Méric, trois skinheads d'extrême droite comparaissent à partir de mardi aux assises de Paris. Ils vont devoir répondre des coups portés contre le jeune-homme de 18 ans tué lors d'une bagarre en plein Paris.

Le 5 juin 2013 vers 18H00, des "skins" et des "antifas" se retrouvent à la même vente privée de vêtements, dans une boutique du quartier Saint-Lazare à Paris. L'enseigne est prisés des jeunes issus des deux extrêmes. Ils se toisent, s'invectivent.

Quarante minutes plus tard, une rixe éclate au pied de l'église voisine Saint-Louis d'Antin: Clément Méric, étudiant brestois inscrit à Sciences-Po, qui se remet tout juste d'une leucémie, s'écroule. Son décès sera prononcé le lendemain. Cinq ans après, on ne connait toujours pas les circonstances exactes de son décès.

 
©France 3 Bretagne
 

10 jours de procès


Rencontre fortuite ou guet-apens? Bagarre qui tourne mal ou volonté de tuer ? La question sera au coeur des dix jours du procès, qui s'ouvre ce mardi 4 septembre aux assises à Paris. Tandis que les militants antifascites dénoncent un "assassinat politique" et que les accusés invoquent la légitime défense.
 

Haine ancienne et tenace


Les rixes ne sont pas rares entre ces groupes ennemis, mais, pour la première fois depuis longtemps, il y a un mort: un jeune-homme engagé, décrit par beaucoup comme brillant et frêle, dont ses amis de l'Action antifasciste Paris-Banlieue affirment qu'il n'était "pas violent" mais "ne baissait pas les yeux".
 

Le spectre des violences de l'extrême droite


Sa mort fait ressurgir le spectre des violences de l'extrême droite, dont les rangs s'étoffent à la faveur des manifestations contre le mariage homosexuel. Une mobilisation qui nourrit alors les tensions entre les deux camps.

Le gouvernement promet de punir "les assassins" puis dissout plusieurs groupuscules identitaires et racistes, dont étaient proches certains accusés, à l'instar de Troisième Voie et de son service d'ordre, les Jeunesses nationalistes révolutionnaires, dirigées par une figure tutélaire de la mouvance, Serge Ayoub. Sur la clé USB de l'un d'eux, les enquêteurs retrouvent plusieurs références nazies, notamment quatre photos d'Adolf Hitler dont une accompagnée d'un drapeau français et de ce slogan: "Nous voulons un Hitler français".
 

Jusqu'à 20 ans d'emprisonnement 


Au terme de l'enquête, les juges concluent à une rencontre imprévue qui a dégénéré en bagarre mais écartent l'intention de tuer chez les principaux mis en cause: Esteban Morillo et Samuel Dufour, 25 ans, sont donc renvoyés aux assises pour des violences "ayant entraîné la mort sans intention de la donner", commises en réunion et avec arme -en l'occurence un poing américain. Ils encourent jusqu'à vingt ans de réclusion criminelle. Après plusieurs mois de détention provisoire, ils comparaissent libres.

Un troisième skinhead, Alexandre Eyraud, 29 ans, sera lui, jugé pour des violences aggravées passibles de cinq ans d'emprisonnement et de 75.000 euros d'amende.
 

"Meurtre politique" ?


Esteban Morillo a très vite reconnu avoir frappé Clément Méric mais toujours nié avoir fait usage d'un poing américain, circonstance aggravante aux coups mortels.

"Nous souhaitons que M.Morillo soit jugé strictement sur les faits: il a frappé deux fois, lors d'une bagarre, point", a déclaré à l'AFP un de ses avocats, Antoine Maisonneuve.

Quant à Samuel Dufour, il "n'a porté aucun coup à Méric", selon son avocat Antoine Vey, qui attend "une juste répartition des responsabilités".
 

Les principaux enjeux du procès 


Qui est à l'origine de la rixe ? A-t-il effectivement été fait usage d'un poing américain ? Ce sont les principaux enjeux du procès qui s'ouvre ce mardi 4 septembre à Paris.

Concernant, l'usage éventuelle du poing, les expertises médicales se contredisent. Les témoignages aussi. Certains témoins ont vu Esteban Morillo armé, d'autres pas. En garde-à-vue, Esteban Morillo affirme que Dufour frappait les antifascistes à l'aide d'un poing américain. Et le soir-même, Samuel Dufour envoie des SMS à un ami: "J'ai frappé avec ton poing américain", "On les a défoncés".

Les récits s'éccordent sur l'atmosphère électrique de la rencontre: "Les nazis viennent faire leurs courses", a lancé un antifa aux skins arborant tee-shirts "White power" ou "100% pure race". Dans la rue, chaque camp accuse l'autre d'avoir frappé le premier.

Pour Serge Ayoub, alias Batskin, qui accueille les accusés, le soir-même dans son bar, les antifas "ont attendu "les petits fachos": malheureusement, on peut être agresseur et en mourir, ça arrive".

Dans les rangs de l'action anfasciste, on redoute une "dépolitisation": "Si Clément a été tué, c'est parce qu'il était antifasciste. C'est un meurtre politique, par une bagarre entre bandes. Si le procès doit avoir un moment de vérité, c'est ça."
 

Des rassemblement en marge du procès


Leur réponse à la mort du jeune militant a été la création d'un Comité pour Clément avec la volonté de "ne pas laisser la rue" à l'extrême droite. Plusieurs rassemblements sont prévus à Paris autour du procès.


De son côté, le jury a dix jours pour se forger une conviction. Le procès doit s'achever vendredi 14 septembre.
 
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