"Bon voyage, mon grand". Abattu par la tempête Ciaran, ce chêne de 400 ans va servir à la restauration d'un manoir

Quand la tempête Ciaran a soufflé sur le manoir de Pen-ar-Voas, à Lopérec, les propriétaires ont bien cru que le ciel leur tombait sur la tête. Sous la violence du vent, le chêne qui trônait depuis 400 ans dans le vaste jardin a été arraché. L'arbre, emblématique des lieux, s'apprête à retrouver une seconde vie : son bois sera utilisé pour la rénovation d'un autre manoir finistérien.

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"Pour débarquer un arbre de cette taille, il fallait que le vent soit très violent". Cette nuit du 2 au 3 novembre 2023, Aude Sengelé ne l'oubliera pas de sitôt. La propriétaire du manoir de Pen-ar-Voas dit même qu'elle est toujours dans l'hébétude. La tempête Ciaran, qui a balayé la Bretagne, s'est également chargée d'abattre le chêne trônant majestueusement depuis 400 ans sur cette propriété de Lopérec, dans le Finistère.

L'arbre avait immédiatement  tapé dans l'œil de cette ancienne salariée de l'aéronautique, laquelle, à la faveur d'une reconversion professionnelle, a acheté le manoir en 2019 pour y ouvrir un gîte et des chambres d'hôtes. "Un chêne magnifique, au port incroyable, qui contribuait au charme des lieux" souffle-t-elle.

Chagrin

Quatre mètres de circonférence, 22 mètres de haut, l'arbre faisait partie du paysage depuis le XVIe siècle et la construction du manoir. "Il avait été planté à un endroit précis pour marquer la source qui passe sous la propriété, explique cette férue d'histoire locale. Le nom du lieu "Penn-ar-Voas", "tête de la source" en breton, vient d'ailleurs de là".

Aujourd'hui, ne demeure qu'une souche énorme dans le jardin, aux racines apparentes. "C'est d'une tristesse infinie" se désole la quinquagénaire qui rembobine le film de cette soirée dantesque.

Après le passage de la tempête, Aude Sengelé et Jean-Luc, son mari, découvrent, au petit matin, les dégâts. Ils savent déjà que le chêne n'a pas résisté à la force du vent. Car, en pleine nuit, quand ils tentent de mettre leurs animaux à l'abri, Jean-Luc annonce à sa femme que l'arbre est à terre. "J'ai crié, raconte Aude. J'ai cru que je faisais une crise cardiaque. Quand je l'ai vu ensuite, à la lumière du jour, au sol, j'étais anesthésiée par le chagrin".

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Seconde vie

La propriétaire du manoir de Pen-ar-Voas a du mal à se remettre de la perte de son arbre, "ce géant, témoin de l'histoire des lieux". Elle décide de lui offrir une seconde vie. "Pas question qu'il devienne du bois de chauffage, explique-t-elle. Je voulais qu'il serve à valoriser le patrimoine". Elle lance un appel auprès des menuiseries bénéficiant du label EPV (Entreprises du patrimoine vivant).

LIRE : "Sur 200 hectares, 115 sont par terre". Après la tempête Ciaran, les forêts vont mettre de longues années à se relever

C'est finalement le sculpteur François Breton qui se manifeste. Son fils restaure le manoir de Coat-Tan à Plouguerneau et recherche du bois pour la charpente. "Ils sont venus voir le chêne et je leur en ai fait don" relate Aude Sengelé.

Début janvier, les tronçonneuses se mettent à l'œuvre. Le chêne de 400 ans est débité sur place. Avant qu'il ne quitte la propriété, Aude lui donne une petite tape amicale et lui chuchote : "bon voyage, mon grand".

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