La Brestoise et gardienne de l'équipe de France de handball, Cléopâtre Darleux, raconte dans un livre son parcours de mère, et de sportive de haut niveau. "On a besoin de témoignages pour montrer que c'est faisable" de conjuguer les deux, clame-t-elle dans un entretien.
Entre Brest et l'équipe de France, Cléopâtre Darleux raconte dans un livre son parcours jusqu'au titre olympique à Tokyo ainsi que sa maternité: "On a besoin de témoignages pour montrer que c'est faisable" de conjuguer les deux, clame-t-elle dans un entretien..
"Vivre selon ses valeurs comme Cléopâtre Darleux", à paraître le 10 octobre aux éditions Leduc, propose un format original mêlant récit biographique et routines alimentaires, sportives ou de loisirs, au croisement du témoignage et du guide.
Vous évoquez longuement votre maternité dans ce livre, pourquoi est-ce important pour une sportive de haut niveau de témoigner ?
"On est un peu dans une période de transition. Longtemps, concilier maternité et carrière sportive n'a pas semblé possible. Il y a encore cinq ans, c'était moins fréquent. Désormais, de plus en plus de sportives mères reviennent vite au plus haut niveau. On a besoin de témoignages pour montrer que c'est faisable. Avant, on avait peu d'exemples, d'abord, parce qu'on connaissait moins de sportives et aussi parce que les conditions dans lesquelles on exerce notre métier ont changé. Même si ça reste hyper compliqué pour les femmes par rapport aux hommes. Nous, c'est un an d'arrêt et tu ne sais pas trop comment l'annoncer au club".
Est-ce aussi une force dans une vie de joueuse
"Il y a un côté positif. Certes, c'est dur quand tu es absente mais quand tu es là, c'est génial. J'ai une vie hyper épanouie. Je n'ai pas le temps de penser au hand en dehors. Si ça s'est mal passé sur le terrain, j'ai ma fille, mon mari, plein de choses à faire. A la différence des joueuses étrangères de mon club de Brest qui tournent en rond dans leur appartement à ressasser parfois. Moi, j'ai un équilibre, vraiment".
Votre livre montre que la vie affective des sportives, notamment moins rémunérées que les hommes, est plus difficile à gérer avec les changements de club...
"Chacun a une carrière plus ou moins stable. Mais quand les hommes changent de club, les femmes les suivent plus facilement. Pour les femmes qui rejoignent un autre club, souvent leur relation se transforme en relation à distance. C'est plus compliqué. C'est pour ça qu'il y a quand même peu de joueuses avec une vie plutôt stable, avec des enfants, par rapport aux joueurs".
Venir d'une famille nombreuse a-t-il forgé votre caractère de sportive ?
"On était cinq frères et sœurs et nous avions aussi quatre demi-frères. C'était un peu la compétition pour exister. Le fait d'être nombreux oblige à se démarquer. Chacun a son caractère. Moi, j'en avais un sacré. J'étais au milieu intercalée entre mes deux grandes sœurs et mes deux petits frères, ils étaient souvent alliés chacun par paire".
On apprend aussi que vous avez traversé des mois de blues après le sacre olympique de Tokyo l'an passé...
"J'ai eu un vrai contrecoup après les JO. Déjà, ça a été une année très angoissante avec des tests tout le temps, des salles vides. Et comme c'était à la fois la saison de l'Euro-2020 (en décembre, ndlr) et des JO, j'ai voulu me donner à fond.
J'ai été hyper performante en équipe de France mais aussi en club. On a aussi fait une super saison à Brest (sacré en championnat et finaliste de la Ligue des champions, ndlr). Mais après la saison de club, on n'a pas eu de coupure: on a enchaîné directement avec la préparation de l'équipe de France.
Et après ces deux mois en bleu jusqu'à la médaille d'or, on a eu que huit jours d'arrêt avant de reprendre en club. Tu remplis ton objectif d'une vie, gagner les JO, et tu n'as pas le temps de profiter. J'ai d'abord continué sur l'euphorie puis je n'ai plus eu envie du tout".
Est-ce le Championnat du monde en décembre 2021 qui vous a relancée ?
"Avant le Mondial, il y a eu trois mois pendant lesquels j'ai vraiment eu envie d'arrêter le hand. A la veille de partir en stage de préparation, je pleurais parce que je ne voulais pas partir. J'y suis allée quand même et j'ai souvent vu le psychologue de l'équipe de France (la Fédération en compte un depuis 2016, ndlr). En essayant de travailler sur ça chaque jour, petit à petit, j'ai retrouvé l'envie. Pour vraiment être très, très performante, cela demande un état d'esprit et de l'énergie à tous les niveaux, jusque dans l'alimentation".