Partir en vacances en compensant l’éventuel retard pris à l’école pendant le confinement : c'est le but de l’opération "vacances apprenantes". Un séjour où loisirs et apprentissages vont de pair, suivi cette semaine à l’Ile-Tudy par douze enfants des Mureaux (Yvelines).
"Pourquoi c’est un crustacé ?" lance Marie Verne, leur enseignante pour la semaine. "Parce qu’il a huit pattes" répond en coeur le petit groupe d’enfants, en scrutant l’araignée de mer desséchée sur le sable. Depuis lundi, Zeïna, Bakari, Ismaïl et les autres parcourent l’estran et retiennent les leçons apprises au bord de mer. Ils ont entre 8 et 11 ans et le monde maritime n’a rien d’évident pour ces enfants des Mureaux, en région parisienne. "Qu’est-ce que c’est que ça ?" demande un jeune garçon, en exhibant un bigorneau, arraché à son caillou.A l’Ile-Tudy, le groupe fait connaissance avec les crabes, moules et autres patelles découverts par la marée basse. Munis de gants, ils s’intéressent également aux intrus : déchets plastiques, restes de filets de pêche, mégots de cigarette et même un masque en tissu abandonné sur la plage... une moisson peu ragoûtante mais très instructive.
Elle sert de base pédagogique à l’enseignante.
On a des phases à l’extérieur où on va découvrir, et des phases en classe où on va faire le bilan, par écrit, de manière plus scolaire
"Allez, on va étudier tout ça !" dit-elle à son petit groupe en traversant le bourg. Marie, qui habite l’Ile-Tudy, leur parle de "penty" en passant devant une maison traditionnelle au toit pentu et de "boued" l’appât au bout de l’hameçon pour aller pêcher. Des termes bretons que les petits Franciliens retiennent d’un jour sur l’autre.
Direction la salle de classe du centre nautique. Tables, chaises et tableau noir : les élèves prennent place comme à l’école. L’occasion de travailler sur la pollution des océans. La maîtresse distribue un dessin qui détaille la durée que met un objet à se dégrader dans la nature. Quelques semaines pour un trognon de pomme, de un à trois ans pour les mégots, cinquante ans pour une boîte de conserve, quatre siècles la bouteille plastique. Le morceau de filet de pêche récolté mettra six cents ans à disparaître. De quoi ouvrir grands les yeux ! Marie explique aux enfants les conséquences pour les animaux marins et la biodiversité en général.
"Pas du soutien scolaire"
A la colo apprenante, on s’instruit, mais pas question de faire du français ou des maths. Marie est formelle. "Pour moi, les vacances apprenantes, ça ne doit pas être du soutien scolaire qui existe déjà sur les stages de remise à niveau, en début et fin de vacances. Ça doit être différent. Je le vois plutôt comme l’utilisation du milieu dans lequel les enfants viennent en vacances. Apprendre sur ce qu’on a autour de soi."
Les enfants semblent apprécier leur séjour pédagogique. "L’école, c’est plus dur. Ici c’est un peu dur" explique Zeïna, 8 ans, en souriant. "On est à la fois en vacances et à l’école. On apprend en s’amusant" renchérit le groupe. Ismaïl lui ne regrette pas d’être venu.
C’est la mairie qui a demandé à mes parents si on voulait aller apprendre des trucs en colonie de vacances. Mon père a répondu oui. Ma mère était d’accord. Ma sœur et moi, on avait hâte.
Au cours du séjour, le jeune garçon apprend aussi la vie en collectivité. "Je fais des choses que j’ai pas l’habitude de faire chez moi : manger des légumes, attendre que tout le monde ait fini avant de se lever, débarrasser la table..."
Le directeur de la colo voit l’évolution des enfants au fil de la semaine. "On observe une transformation très intéressante en quelques jours" précise Michel Krezel. "Rien qu’en terme de noms, de grammaire, de capacité à retenir les mots, être dans la nature permet de bien lier vacances et apprentissages."
Après les enseignements du matin, les journées se poursuivent par des activités ludiques d'une colonie de vacances classique : sorties en mer, parties de pêche...
Les enfants terminent leur séjour demain. Comme eux, ils seraient un million en France à pouvoir bénéficier des "vacances apprenantes" promues en juin par le gouvernement. 2015 places sont disponibles cet été en Finistère.