Finistère : les émissions de particules fines du transport maritime passées à la loupe

Quelle est la pollution produite par les navires de transport de passagers? C'est la question à laquelle va répondre le projet CAPNAV. Pendant une semaine, le ferry reliant Ouessant et Molène au continent accueille ce projet scientifique qui vise à identifier le type de particules émises.

Sur le port de Brest, alors que les derniers passagers s'empressent de récupérer leurs billets, l'équipage de la Penn Ar Bed arrime quelques conteneurs. Scène ordinaire pour ce bateau qui relie quotidiennement les îles d'Ouessant et Molène au continent. Pourtant, sur le pont cheminée du Fromveur II, un étonnant trio s'affère autour d'un mystérieux cube.

Ni marins, ni passagers, ils sont enseignant-chercheur, future ingénieure en stage et technicien. Le but de leur présence à bord : calculer et identifier le type de particules fines émises par les échappements du navire lors de la navigation.
 


Dans le cube étanche spécialement construit pour l'occasion, des instruments de mesure extrêmement fragiles, normalement destinés aux laboratoires. Le chef des opérations, Benoît Sagot, professeur à l'ESTACA (Ecole supérieure des techniques aéronautiques et de construction automobile), dirige le projet CAPNAV.

Tous les jours pendant une semaine, l'ingénieur et sa petite équipe vont parcourir la mer d'Iroise à bord de Fromveur II. Malgré les 54 noeuds de vent du week-end dernier (environ 100km/h), ils maintiennent leur cap : déterminer un protocole de mesure et d'expérimentation dans les conditions d'opération.

Car si la pollution à l'oxyde de soufre et à l'azote par le transport maritime est désormais connue, la production de particules fines par les navires n'est pas encore bien documentée (contrairement à celle des voitures).


Mesurer les particules fines en temps réel

En quittant le port, la cheminée du bateau crache une fumée noire. "Les particules lourdes ne sont pas si nocives que ça, car elles sont arrêtées au niveau des fosses nasales. Les particules plus fines vont descendre plus loin dans les poumons" explique Benoît Sagot. Mais qu'en est-il en dehors des manoeuvres, lorsque le bateau poursuit sa vitesse de croisière ? Les particules de suies émises sont-elles identiques par gros temps ou quand la mer est calme ?

Pour le savoir, une sonde pour mesurer la vitesse de la fumée et des filtres sont placés dans la cheminée du bateau. D'autres appareils récupèrent et quantifient les échappements émis. "On prélève les particules fines pour connaître leur nombre, leur taille et leurs masse en temps réel". Car pour être arrêtées par le nez, elles doivent au moins mesurer 10 microns (environ 30 fois plus petit qu'un acarien). 


Diminuer la pollution et faire des économies

La compagnie de transport Penn Ar Bed, qui accueille la campagne de mesure, a facilité l'installation et l'organisation de l'expérimentation. L'entreprise finistérienne espère mieux connaître ses moteurs et entend ajuster ses pratiques pour diminuer la pollution mais aussi faire des économies. "On peut s'adapter en jouant sur les régimes moteur en fonction de l'exploitation, des manoeuvres de la route libre, de tout ce qui consiste à l'exploitation du navire" explique Arnaud Le Campion, le directeur technique de la Penn Ar Bed. 

"L'autre avantage pour la compagnie est d'avoir assez d'éléments pour des choix ultérieurs en matière de moteurs, lorsque la question du renouvellement se posera" détaille Benoît Sagot de l'ESTACA. 

Mais avant de renouveller ses moteurs, la Penn Ar Bed prévoit d'ajouter au gasoil de ses navires, un additif qui permettra de réduire la pollution émise. Cet été, en juillet, l'équipe de l'ESTACA reviendra pour effectuer une autre campagne de mesures, cette fois-ci sur un Fromveur II naviguant avec du gasoil et de l'additif. Les séries de mesures seront alors comparées. 

Et l'expérimentation ne s'arrête pas là. Car Benoît Sagot et son équipe examineront en 2022, les pollutions émises par un navire de la Brittany Ferries circulant au gaz naturel liquéfié (GNL). Cette fois-là, c'est le taux de méthane qui sera scruté de près.

En matière de pollution du transport maritime, les champs d'étude ne manquent pas. La recherche et l'ingénierie risquent de s'y intéresser de plus en plus, l'école d'ingénieur ESTACA proposera dès septembre une nouvelle filière d'ingénierie navale.

 

Le projet CAPNAV a été lancé en 2019, il dispose de 250 000€ de budget dont 70% ont été financé par l'Agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie (ADEME) et 30% par l'ESTACA. Une première campagne de mesure a été effectuée en décembre 2019. Les expérimentations sur le terrain ont été suspendues au plus fort de l'épidémie de Covid. CAPNAV est le fruit d'un consortium entre scientifiques, industriels et armateurs. 

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