Née dans l’esprit audacieux et inventif d’un mathématicien finistérien, il y a 30 ans, le Domespace s’est installé depuis un peu partout dans le monde, séduisant par ses formes rassurantes, la chaleur du bois, sa conception et son fonctionnement écologique.
"Quand j’ai aperçu depuis la route ce bois de chêne, en pente qui surplombait la rivière, je me suis dit, ce serait pas mal un Domespace ici." C’était il y a 15 ans, Loïc Le Gall et son épouse, tout juste retraités, avaient décidé de quitter le centre de Quimper pour trouver une habitation plus écologique. Ce dôme, inventé 15 ans plus tôt par Patrick Marsilli, les avait séduits. "Ce qui nous plaisait, c’est que c’était en bois, très lumineux" précise Loïc Le Gall. "Un cocon dans lequel toute la famille s’est tout de suite sentie bien". Et puis, il y a la proximité de la nature environnante, visible depuis les quatre baies et toutes les fenêtres de toit, sans oublier ce poêle central que Loïc alimente… "C’est aussi une cabane dans les arbres, au milieu des mésanges, des sitelles torchepot, des écureuils" ajoute-t-il. "On nous a vu comme des originaux, c’est sûr, mais c’est une belle expérience" résume Thérèse Le Gall.
Une maison tournée vers le soleil
Le Domespace, c’est une structure entièrement en bois lamellé-collé, qui rayonne autour d’un mât central, une structure initialement isolée de liège et recouverte ensuite avec des tuiles de red cedar. Le tout est monté sur une couronne équipée de roulements à billes, entrainée par un moteur, pour pouvoir être orienté selon le soleil. "C’est un rêve d’enfant réalisé à l’âge mûr" nous confie Patrick Marsilli. En 1988, ce passionné de mathématiques sacrées, qui avait étudié les nombres d’or, multipliait alors les croquis de la maison idéale. Encouragé par son épouse, il matérialise sa création à Scaer dans le Finistère. Une maison ronde qui tourne avec le soleil.
On peut se dire que c’est dans l’innovation, à la pointe d’un certain nombre de recherches et d’un autre côté, c’est assez ancestral par les matériaux employés, par les formes. La forme sphérique est partout dans l’univers, des planètes jusqu’à l’infiniment petit, c’est une des grandes constantes.
Pourtant, le modèle étonne, interpelle. Conscients de l’engouement suscité, le couple décide de se lancer dans l’aventure entrepreneuriale pour faire profiter d’autres familles de ses recherches et du confort de leur habitation. Mais, rien n’est simple alors.
"À la fin des années 80, le terme de développement durable n’existe pas encore et nous étions très en retrait. Un des grands problèmes de notre civilisation, c’est que ce qui est nouveau a du mal à exister car il y a la force de l’habitude. Il faut être tenace pour se lancer dans l’innovation". Outre les quolibets, il faut surmonter les freins financiers, institutionnels pour que l’entreprise puisse être viable. Difficile dans certaines communes par exemple d’obtenir un permis de construire… "C’est une aventure familiale heureusement, justement pour dépasser les difficultés liées à l’innovation, aux habitudes dures à contrer. Travailler en famille, ça donne une persévérance, une force supplémentaire" décrypte Morgann Thoby, la fille de Patrick Marsilli, elle aussi embarquée dans l’entreprise avec son mari.
Aujourd’hui, 200 dômes ont été construits en France, près de 50 à l’étranger. Et les Marsilli poursuivent les recherches technologiques pour que leur structure soit toujours plus écologique. La nouvelle génération sera à énergie passive, avec des caissons entièrement préfabriqués intégrant les isolants, assurant l’étanchéité imposée par les normes passives et facilitant le montage. "Avec quelques autres, on participe à faire bouger les lignes. Et quand on voit les matériaux disponibles aujourd’hui, c’est grâce à ceux qui ont voulu aller de l’avant alors qu’il n’y a avait rien pour eux" explique Benjamin Thoby, gendre des Marsilli et président de Bois et Courbes Constructions. Le prix de cette nouvelle version se veut comparable à celui d’un modèle classique passif de superficie équivalente. Comptez 264 000 euros clé en main pour un modèle de 150m² utiles, fixe et 350 000 euros pour un rotatif. Pas de mur porteur, donc pas de contrainte d’aménagement sur ces modèles de 40 à 400m2. Pour alléger le prix, il est possible de choisir l’auto-construction accompagnée, ou le montage hors d’eau-hors d’air sans le second œuvre.
"Toutes ces recherches technologiques permanentes, c’est passionnant. J’ai autant de passion sur le concept qu’au moment où il a été lancé il y a 30 ans. Parce qu’il y a plein de données nouvelles, plein de possibilités qu’on n’avait pas à l’époque." s’enthousiasme Patrick Marsilli qui n’a pas fini de rêver, il imagine des dômes autonomes, producteurs d’énergie, par exemple, regroupés au sein d’éco-villages. Il pense aussi à des maisons de retraite ou des crèches adoptant cette forme sphérique. "Une idée peut aller aussi vite en deux ans que pendant les trente années précédentes. C’est une question de maturité".