Depuis le 10 juillet, les Français qui désirent voyager en Angleterre et en Ecosse ne sont plus obligés de subir une quatorzaine à leur arrivée sur le sol britannique. La réciproque est vraie. Pour autant, les touristes britanniques sont pour l'instant aux abonnés absents en Bretagne.
Le site est habituellement prisé des Britanniques. Huelgoat avec son lac, son chaos de rochers granitiques, sa place entourée de commerces croquignolets a tout pour séduire les touristes d'outre-Manche.
D'ailleurs, depuis plusieurs années, certains ont fait de la petite cité finistérienne leur deuxième chez eux. Nombre d'Anglais ont acheté des maisons pour passer leur retraite ou pour les transformer en B&B. Le jeudi, lors du marché hebdomadaire, on entend plus souvent parler anglais que français.
"Habituellement, l'été, les Britanniques constituent 40% de ma clientèle, explique Maud Duguéperoux, propriétaire de l'Hôtel-restaurant du Lac, l'un des deux hôtels du bourg. Ils viennent passer quelques jours de vacances, voir leurs proches ou chercher une maison".
Mais cette année, c'est à pleurer. Toutes les réservations du printemps ont été annulées et en ce moment, les rares Anglais présents ne logent pas à l’hôtel. Ils viennent juste déjeuner ou diner et sont très peu nombreux.
Même constat à l'Hôtel de Bretagne où la clientèle britannique est davantage une clientèle de passage.
"Ils réservent généralement une nuit sur la route du sud ou de l'Espagne. D'habitude ils représentent à peine 5% de ma clientèle," confie Patrick Le Scraign, le patron qui admet que cette année, le chiffre est plutôt proche de zéro. Aucune réservation en juin, quasiment pas cet été même si Patrick Le Scraign compte sur les réservations de dernière minute.
"Il reste de la place fin juillet et en août et l'arrière-saison est souvent propice à l'arrivée des seniors" ajoute-t-il.
A condition que la COVID bien sûr, ne refasse pas une apparition remarquée, décourageant les touristes les plus téméraires. D'ailleurs, Patrick le Scraign préfère tomber le masque lorsqu'il est à la réception.
"C'est un signe négatif pour les clients, ça peut les faire fuir même si les gestes sanitaires sont respectés par le personnel dans les chambres et dans la salle de restaurant."
Les Français bien présents
Par chance, la clientèle française, elle est bel et bien au rendez-vous ce qui permet de compenser pour tout ou partie, l'absence des Britanniques. Baladez-vous dans la forêt et vous entendrez que la très grande majorité des promeneurs sont Français. Même si quelques Allemands, Belges, Suisses et Hollandais s'aventurent aussi parfois au milieu des rochers.
Sur l'aire de camping-car, la plupart des véhicules sont immatriculés dans le grand ouest, Bretagne, Normandie et Pays de la Loire et à l'Office de tourisme, Jocelyne Guillaume, l'une des chargées d'accueil, le confirme :
Cette année, les Français sont les plus nombreux.
Elle tient d'ailleurs des comptes très précis. "Depuis début juillet, l'Office de tourisme a reçu la visite de 947 nationaux, bien loin devant les Belges, 16 visiteurs, les Allemands, 13 ou les Suisses, 10."
Quant aux Anglais, c'est à peine si on les voit puisque seuls 8 Britanniques ont franchi le pas de porte en treize jours.
Huelgoat compte plusieurs chambres d'hôtes qui sont tenues par des compatriotes de sa Très Gracieuse Majesté comme Laura's ou d''habitude, les Britanniques représentent six vacanciers sur dix. Cette année, Tanisha Cope, la gérante n'a enregistré qu'une seule réservation pour le mois d'août. Du jamais vu depuis que le B&B a ouvert ses portes en 2007. En revanche, il affiche complet grâce aux Français qui chez elle aussi, ont réservé en force. Ce qui va peut être permettre à Tanisha de sauver sa saison.
L'absence des Britanniques catastrophique
Mais l'absence des Anglais représente tout de même un important manque à gagner pour certains commerçants.
Gemma Rognan tient avec son mari, l'une des deux boulangerie-pâtisserie de Huelgoat. "Pour nous, c'est catastrophique, raconte-t-elle dans un français impeccable. Les touristes britanniques ont plus d'argent que les Français et ils n'hésitent pas lorsqu'ils viennent à la boulangerie - qui fait aussi salon de thé - à prendre un grand café, une ou deux pâtisseries. Ce que ne font pas les Français et encore moins les Espagnols."
Conséquence, des revenus en moins en juin pour les boulangers qui s'inquiètent de l'avenir.
La famille de Gemma qui vit dans la banlieue de Londres aurait du venir en France au printemps. Mais la Covid a changé leur plan. Si tout va bien, ils devraient venir en septembre, mais seulement un week end. Une visite express qui préfigure peut être l'attitude de nombre de Britanniques qui avaient prévu de séjourner en France cette année.
D'ailleurs, la Brittany Ferries, dont les liaisons maritimes ont repris le 29 juin dernier, compte transporter 240 000 passagers cet été contre 780 000 habituellement. Mesures sanitaires oblige, le taux de remplissage ne dépasse pas les 50% afin de pouvoir respecter les mesures sanitaires. Même si 85% des passagers sont britanniques, ils seront forcément beaucoup moins nombreux en France cet été, et par conséquent en Bretagne.
Rappelons que même si le nombre de touristes venus d'outre-Manche a chuté de 13% l'an passé en raison du Brexit, les Britanniques restent nos premiers visiteurs étrangers.