Dès ce samedi matin 5h, une quatorzaine est imposée à tous ceux qui se rendront au Royaume-Uni depuis la France. La décision, annoncée hier par le gouvernement britannique, a pris au dépourvu les milliers d'Anglais en vacances en Bretagne et porte un nouveau coup au trafic maritime transmanche.
17h: le navire Armorique largue les amarres avec à son bord 900 passagers, la jauge maximale en ces temps de Covid-19. Ils débarqueront à Plymouth, en Angleterre, à 20h, heure locale: ils seront les derniers à avoir pu quitter Roscoff sans être obligés d'observer une quarantaine de quatorze jours à leur arrivée en territoire britannique.
Judith est soulagée: ses enfants et petits enfants, qui doivent retourner au travail et à l'école lundi, ont réussi à décrocher leur place à bord in extremis: "hier, quand on a essayé, c'était complet, et ce matin, on est retourné sur le site internet et par miracle, il y avait de la place" raconte-t-elle. "S'ils avaient dû passer 14 jours chez eux, ils auraient perdu 14 jours de salaire, c'était la panique!"
Des passagers pris au dépourvu
Tous n'ont pas eu cette chance: Fran et Derek étaient prêts à écourter leur séjour d'une semaine afin d'éviter la quatorzaine, bien qu'ils soient à la retraite: "on voulait voir notre famille en rentrant, et ne pas passer 14 jours isolés chez nous," regrettent-ils. Mais ils ont dû rebrousser chemin.Comme eux, des milliers de Britanniques en vacances en Bretagne ont été pris de court par l'annonce de leur gouvernement hier soir, imposant une quatorzaine à partir de demain matin 05h00 (heure française). Sur le site de la Brittany Ferries, qui assure plusieurs liaisons de passagers et de fret avec la Grande-Bretagne, les ferries de ce vendredi ont immédiatement été pris d'assaut. L'Armorique, qui ne comptait encore que 450 réservations hier, est parti complet...
Coup de semonce pour le transport transmanche
Pour la Brittany Ferries, cette nouvelle mesure de quatorzaine est un coup de massue. L'année s'annonçait d'ores et déjà catastrophique, après 4 mois d'interruption du trafic passager pour cause de confinement et un début d'été très morose puisque la compagnie n'a enregistré que 95 000 passages en juillet contre 300 000 en juillet 2019.
Le directeur général de la compagnie estime que même si la mesure devait être assouplie prochainement, de toute façon, "le mal est fait: les gens n'ont plus confiance, la dynamique des réservations est cassée."On avait déjà un genou à terre, on vient de nous mettre le deuxième
La question de la survie de la compagnie se pose
La question se pose maintenant de la survie de la société: "on est vraiment en danger! On va avoir besoin d'aide après un coup comme ça: l'entreprise va devoir être soutenue pour rebondir," affirme-t-il. "On sait qu'on a un avenir mais on est otage de décisions politiques qui ne sont pas forcément rationnelles, quand les gouvernements ne sont plus dans un esprit de coopération mais de confrontation," déplore-t-il.Le gouvernement britannique justifie sa décision d'imposer une quatorzaine aux voyageurs provenant de France par la recrudescence de cas de Covid-19 dans l'Hexagone.
"Les données montrent que nous devons retirer la France, les Pays-Bas, Monaco, Malte, Turks et Caicos et Aruba de notre liste des 'couloirs de voyage' afin de contenir les taux d'infection. Si vous arrivez de ces destinations au Royaume-Uni après 04h00 (heure britannique) samedi, vous devrez vous isoler de vous-mêmes pendant 14 jours," précise le secrétaire d'État aux Transports britannique.Data shows we need to remove France, the Netherlands, Monaco, Malta, Turks & Caicos & Aruba from our list of #coronavirus Travel Corridors to keep infection rates DOWN. If you arrive in the UK after 0400 Saturday from these destinations, you will need to self-isolate for 14 days.
— Rt Hon Grant Shapps MP (@grantshapps) August 13, 2020
La France promet d'ores et déjà d'appliquer la même mesure aux voyageurs en provenance du Royaume-Uni, comme l'a annoncé Clément Beaune, secrétaire d'Etat chargé des Affaires européennes, dans un tweet:
Une décision britannique que nous regrettons et qui entraînera une mesure de réciprocité, en espérant un retour à la normale le plus rapidement possible @Djebbari_JB https://t.co/6pA0qDQun6
— Clement Beaune (@CBeaune) August 13, 2020
Cet échange de bons procédés entre les deux pays avait déjà eu lieu en mai dernier et avait duré jusqu'au 10 juillet, date à laquelle le Royaume-Uni avait levé sa mesure de quatorzaine. La compagnie de transports maritimes, dont le siège se situe à Roscoff dans le Finistère, n'avait pu reprendre ses rotations que le 29 juin, au ralenti: afin d'appliquer les règles de distanciation physiques, un bateau tel que l'Armorique n'emporte que 900 passagers maximum, au lieu de 1500 habituellement.