Ce vendredi 1er mars 2024, une cuve à lisier s'est rompue sur le site d'une exploitation agricole située à Plogonnec (Finistère). Selon la préfecture, 1 400 mètres cubes se seraient répandus. Le bilan exact des dégâts reste encore à déterminer. L'association Eau et Rivières de Bretagne annonce avoir déposé une plainte.
Vers 12h15, ce vendredi 1er mars 2024, les pompiers du SDIS 29 ont été appelés pour intervenir sur une exploitation agricole, située sur la commune de Plogonnec (Finistère). En cause, la rupture d'une cuve, d'une capacité de 2 000 m3 contenant du lisier.
Dix porcs sont morts dans l'incident
Dix sapeurs-pompiers ont été déployés dont une équipe spécialisée dans les risques chimiques. Ils ont constaté sur place une "atteinte à la structure du bâtiment de la porcherie" ainsi que le décès de dix cochons. Le SDIS a mis fin à l'intervention en milieu d'après-midi, vers 15h.
Un accident lié aux conditions météorologiques
Également présent sur les lieux suite à l'incident, Gilbert Saligoux a pu constater de ses yeux les dégâts. Le président de l'Association agréée de pêche et de protection des milieux aquatiques (AAPPMA) de Quimper a vu que la "situation était stabilisée" avec "tellement de gens avec des pelleteuses, qui ont curé les côtés et le long de la route. Ils ont récupéré une grande partie du lisier qui n’avait pas atteint l’eau."
Selon lui, la rupture de la cuve trouverait son origine dans les conditions météorologiques, particulières cette année : "À cette époque de l'année, le lisier est déjà épandu, au fur et à mesure dans les champs. Mais compte tenu de la situation météo, les agriculteurs ne peuvent pas le faire et doivent stocker leur lisier. La cuve se remplit jusqu’à ce que ça explose. C'était un véritable tsunami."
Des dégâts encore à constater
"Tsunami" : le terme a également été employé par Jean-Paul Cozien, vice-président de Quimper Bretagne Occidentale en charge de l'eau : "Il y a clairement eu du lisier dans le Steïr. Les deux tiers du lisier ont coulé dans des fossés sous la départementale, pour atteindre le fleuve."
D'après la préfecture du Finistère, 1 400 m3 de lisier se seraient épandus suite à la rupture de la cuve. Les services de l'État précisent que "l'épandage d'une partie des effluents a été réalisé sur une pâture par l'exploitant."
Jean-Paul Cozien est aussi président du syndicat mixte SIVALODET sur le bassin-versant de l'Odet. Décision a été prise de stopper immédiatement, en aval, la production de la prise d'eau du Trohéir, qui alimente la ville de Quimper en eau potable. "On n’a pas attendu le résultat des analyseurs pour arrêter. La production a été arrêtée pendant sept heures et a repris hier vers 20h", poursuit Jean-Paul Cozien. "On a vu le pic d’ammoniac monter et on l’a vu redescendre. On a atteint des valeurs 150 à 200 fois supérieures à la normale."
Selon le vice-président de QBO, il faut considérer "la matière, très soluble, du lisier" et "la qualité de l’eau brute : ce n'est pas un non-phénomène, mais un épiphénomène. Il faut regarder ces 1 200 m3 rapportés au débit du cours d'eau, qui est de 64 000 m3 par heure."
Il ne faut pas que ça se renouvelle.
Jean-Paul CoziouVice-président de Quimper Bretagne Occidentale en charge de l'eau
Toujours d'après Gilbert Saligoux, impossible pour le moment d'établir un bilan exact des dégâts : "C'est difficile d’observer à cause de la force et de la couleur des eaux, très foncées à cause des grandes quantités de pluie. On ne peut pas voir quels sont les dommages pour la faune, les poissons, les invertébrés qui sont en dessous."
En été, l'incident aurait été beaucoup plus important.
Gilbert SaligouxPrésident de l'Association agréée de pêche et de protection des milieux aquatiques (AAPPMA) de Quimper
Jean-Paul Coziou indique que le syndicat mixte SIVALODET "s'apprête à déposer plainte. Il faut que l'instruction suive son cours et que des mesures préventives puissent être prises, et il ne faut pas que ça se renouvelle." Il tient à préciser : "On ne veut pas culpabiliser qui que ce soit, et surtout pas le propriétaire des installations".
La préfecture indique que "le procureur a été saisi, une procédure judiciaire est en cours." Contacté, le parquet de Quimper n'a pas donné suite à nos demandes.
Plainte de l'association Eau et Rivières de Bretagne
Dans un communiqué, Eau et Rivières de Bretagne annonce, ce lundi 4 mars, s'être constituée partie civile et avoir déposé une plainte. "Nous nous réservons la possibilité de demander la réparation du préjudice écologique comme le permet le Code civil. Nous voulons représenter les rivières accidentées" réagit Nicolas Forray, secrétaire général d’Eau et Rivières.
L'association relève que cette pollution du Steïr "n'est qu'un épisode d'une longue litanie. Une nouvelle fois, une rivière finistérienne est asphyxiée, détruite par l'irruption de lisier". "Le nombre de pollutions ne semble pas fléchir alors que notre gouvernement veut alléger le poids des normes environnementales pesant sur l’agriculture. Quel contre-exemple !" analyse Nicolas Forray.