La sobriété énergétique s'invite dans les fêtes de Noël. Certaines communes ont annoncé font l'impasse sur les guirlandes et les sapins brillants de mille feux. D'autres, comme Locronan ou Trevarez, qui en ont fait un atout touristique, mettent en avant la faible consommation des leds. [Publié le 28 septembre 2002].
Un Noël sans illuminations ? À La-Roche-Jaudy, dans les Côtes-d'Armor, les élus municipaux ont tranché la question : la commune sera décorée, mais pas illuminée. "Nous n'attendons pas que l'on nous dise d'éteindre pour nous positionner, déclare le maire Jean-Louis Even. La magie de Noël ne se résume pas à des lumières".
La municipalité a fait son calcul : l'économie réalisée avoisinera les 30 000 euros. Une somme qu'elle entend réinjecter dans l'achat groupé de récupérateurs d'eaux de pluie à destination des habitants. De même prévoit-elle une aide pour l'acquisition de poêles à bois, "de 800 euros pour les foyers qui ont un quotient familial inférieur à 1 400 euros et 400 euros pour les autres" précise le maire.
"Il y a des choix à faire"
Dans cette bourgade, qui compte 2 700 habitants, l'éclairage public a lui aussi été réduit. L'extinction des feux est fixée à 20h30. "Noël, ce n'est qu'un aspect minime de ce que nous faisons ici pour abaisser nos consommations d'énergie et mener une politique plus solidaire, souligne Jean-Louis Even. À quoi bon illuminer les rues si les lumières ne scintillent plus dans les yeux des gens parce qu'ils ne peuvent pas payer leur facture d'électricité, parce qu'ils n'arrivent plus à joindre les deux bouts ? Ce serait un sacré paradoxe de continuer à dépenser à gogo quand d'autres doivent se serrer la ceinture".
Depuis quelques années, le maire de La-Roche-Jaudy s'interroge sur la pertinence des illuminations à Noël. La crise énergétique lui offre l'occasion de régler le dossier. Et de dégager une source financière pour ne pas avoir à rogner sur le reste. "Il y a des choix à faire et je préfère maintenir les aides sociales plutôt que les illuminations, dit-il. La magie des fêtes de fin d'année, elle est toute relative selon que vous êtes malade, seul, au chômage, etc. Alors, Noël, croyez-moi, ce n'est pas l'urgence".
A Locronan, pleins feux sur la magie de Noël
A Locronan, dans le Finistère, le maire est catégorique : "Nous ne changerons rien !" déclare-t-il. Antoine Gabrielle n'a pas l'intention de priver le village et ses habitants de l'esprit de Noël. Non pas qu'il balaie la crise énergétique d'un geste mais pour lui, "il n'y a pas de débat". Locronan revêtira donc ses habits de lumière au mois de décembre, comme d'habitude.
La commune, réputée pour ses illuminations qui attirent la foule chaque année, n'a, selon lui, pas attendu la crise pour gérer sa consommation en énergie. "Vous savez combien coûte notre fête de Noël en électricité ? 260 euros !" affirme l'élu qui rappelle que, depuis 2018, l'éclairage public est produit par des LED - tout comme les illuminations - et que "pendant la période , il n'est même pas allumé. On réduit ainsi notre facture de 10 000 euros par an" précise-t-il.
Pour Antoine Gabrielle, ne pas allumer les guirlandes dans les rues à Noël relève davantage de "l'acte symbolique". "D'autant que cela ne consomme rien du tout" ajoute-t-il.
Un lave-linge consomme plus qu'un projecteur
Benoît Quéro
Sur cette question de la consommation en énergie des illuminations et autres sons et lumières de Noël, Benoît Quero parle lui aussi "de combat de symbole". Sa société, Spectaculaires-Allumeurs d'Images, assure le mapping vidéo au Château de Trévarez et à Quimper durant les fêtes de fin d'année. "Le téléviseur, les appareils électroménagers sont bien plus consommateurs que nos éclairages, assure-t-il. Surtout que nous travaillons depuis longtemps avec du matériel éco-performant et éco-responsable, comme le LED".
Et de dérouler les éléments de comparaison. Les projecteurs de lumière LED consomment 100 à 150 watts. "Comparativement, un four ménager consomme 1 000, 2 000 ou 3 000 watts selon le modèle, une machine à laver, 2 000 watts, etc. Nous n'utilisons plus de source halogène qui chauffait plus qu'elle n'éclairait. Le LED requiert moins de câblages, donc moins de fret pour le transporter. Et, en plus, il ne brûle pas les insectes".
Dire que le spectacle consomme démesurément, c'est passer à côté des vrais sujets comme l'éclairage public et les enseignes lumineuses la nuit.
Benoît QueroSociété Spectaculaires
Pour la cathédrale de Quimper, sur une période de vingt jours, à raison de trois spectacles de 20 minutes par jour, "la consommation totale est de 2 000 kWh environ, soit l'équivalent de la consommation d'un particulier par an, remarque Benoît Quero. Il faut également noter que l'éclairage public est éteint pendant le spectacle, ce qui économise un certain nombre de KWh, et que nos installations ne sont pas allumées en permanence".
Le patron de Spectaculaires-Allumeurs d'Images a engagé son entreprise dans une démarche 'green-light'. C'est même elle, en 2009, qui a entrepris le projet d'une scène entièrement basse consommation aux Trans Musicales de Rennes. "Je veux bien débattre, souligne-t-il, mais sachons de quoi nous parlons au lieu d'administrer de la peur à la ronde. Dire que le spectacle consomme démesurément, c'est passer à côté des vrais sujets comme l'éclairage public, les enseignes lumineuses la nuit, les plafonds des supermarchés parfois ouverts à tous vents".
Du côté de Trévarez, le spectacle aura bien lieu, comme les autres années. "La dimension de la consommation d'énergie est évidemment intégrée à la réflexion autour de l'événement" assure le Département du Finistère qui dévoile, ce 23 septembre, le thème de Noël au Château : le tour du monde en 51 jours de James de Kerjégu et Jules Vernes.