La Bretagne est classée en situation de crise sécheresse. L'absence de pluie a forcément des conséquences sur l'alimentation en eau potable. En Ille-et-Vilaine, on puise déjà dans les réserves pour éviter les coupures au robinet. Ailleurs, ce n'est pas mieux. La ressource se fait rare. Et chacun scrute le ciel, en espérant que les prochaines pluies seront suffisamment "efficaces" pour sortir du rouge.
L'étang des Bougrières, près de Rennes, est une ressource de secours pour la métropole. Depuis une semaine, 10.000 m3 d'eau y sont prélevés chaque jour pour alimenter l'usine de traitement de Villejean et éviter ainsi une pénurie d'eau potable. Autrement dit : face à la sécheresse qui a considérablement abaissé les niveaux des nappes souterraines, des barrages et des rivières, on tape dans les réserves.
"On n'est pas encore à sec, précise Antoine Deconchy, directeur du syndicat mixte de gestion de l'eau de l'Ille-et-Vilaine (SMG 35), mais les niveaux dans les barrages devraient être bien plus hauts qu'ils ne le sont actuellement. Dans les secteurs de Saint-Malo, Vitré ou encore Janzé, l'inquiétude est plus grande. Le risque, s'il ne pleut pas, est d'avoir des barrages vides dans les semaines et les mois qui viennent. ".
5 à 6 mois de stock
Des mesures ont pourtant été prises dès le printemps pour enrayer le phénomène. La collectivité Eau du Bassin rennais, qui fournit l'eau potable à 75 communes, a passé la gestion de ses 17 ressources en mode "sécheresse". "Le niveau baisse rapidement dans les barrages de la Chèze et surtout celui de Rophémel dans les Côtes-d'Armor qui alimente aussi le bassin rennais, indique Stéphane Louaisil, responsable du pôle production et qualité de l'eau. On a donc décidé de réduire la production depuis Rophémel et d'augmenter celle de Villejean. Le 8 août, la préfecture d'Ille-et-Vilaine a autorisé le pompage de l'étang des Bougrières".
Sauf que d'autres ressources, comme les rivières, ne sont aujourd'hui plus disponibles. Les prélèvements y ont été stoppés. "Avec le barrage de la Chèze, nous n'avons que cinq à six mois de stock devant nous" constate Stéphane Louaisil. La situation est donc critique et seules des pluies dites efficaces (celles qui ne s'évaporent pas) pourraient permettre de regonfler les nappes et avec elles les cours d'eau.
Des pluies pas efficaces
La Bretagne est confrontée à un déficit pluviométrique depuis huit mois. En temps normal, c'est entre octobre et mars que les nappes phréatiques se remplissent. "Mais il a très peu plu, mis à part en octobre 2021 et en juin 2022 où les pluies ont été excédentaires, souligne Bruno Mougin, hydrogéologue à la direction régionale du BRGM (Bureau de recherches géologiques et minières). Nous sommes partis avec des niveaux très bas qui n'ont fait que baisser avec la sécheresse".
Le BRGM édite chaque mois un bulletin de situation des nappes bretonnes. Sur la carte, beaucoup de secteurs sont en rouge. "Sur les 52 capteurs dont nous disposons pour réaliser nos mesures, 9 sur 10 sont à des niveaux inférieurs à la moyenne des mois de juillet, explique l'hydrogéologue. Ce qu'il faudrait, c'est une succession de pluies tous les jours. Mais depuis mars, ces pluies efficaces sont elles aussi bien inférieures à la normale".
Economies d'eau
L'inquiétude porte également sur l'année 2023, dans l'hypothèse où l'hiver prochain serait aussi sec que le précédent, empêchant ainsi les ressources de se reconstituer. "Les économies d'eau sont donc essentielles pour éviter tout scénario de rupture d'alimentation en eau dans les prochains mois" prévient Eau du Bassin rennais.
La Bretagne est classée en crise sécheresse. Ce qui veut dire que l'utilisation de l'eau y est désormais très réglementée. Dans le Finistère, la préfecture rappelle que "dans ce contexte de sécheresse durable, les précipitations du week-end dernier et celles attendues dans les jours à venir n'auront à ce stade aucun effet significatif sur la situation hydrologique du département. La visibilité globale en matière d'alimentation en eau potable reste limitée à cinq semaines".
A la pointe bretonne et dans les trois autres départements, les restrictions sont drastiques, pour les particuliers comme pour les collectivités.
Préserver la ressource en adoptant les bons gestes devient urgent : par exemple, limiter sa douche entre 3 à 5 minutes par jour, couper l'eau lors du brossage des dents et le lavage des mains ou encore faire tourner son lave-linge et lave-vaisselle à plein.