Grâs de Douarnenez : ceinture en 2021 et Grâs double en 2022

La mort dans l'âme mais avec humour, le comité des Grâs de Douarnenez s'est résolu hier à annuler l'édition 2021. "Une victime de plus du Coronavirus" a-t-on pu lire immédiatement sur les réseaux sociaux où l'annonce n'est pas passée inaperçue. 

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"Ça veut dire que la bamboche c'est terminé?"

Hier soir, le comité des Grâs de Douarnenez a annoncé "avec une grande tristesse" l'annulation de l'édition 2021 qui devait se tenir du 13 au 17 février prochain. "Ca veut dire que la bamboche, c'est terminé? Quelle tristesse! Quel désespoir! " a commenté avec humour la présidente, Mickaelle Jadé. " C'est une grande déception pour tous  mais on se rattrapera, ça c'est sûr" a-t-elle ajouté dans son post Facebook à grand renfort de vidéos et de photos des précédentes éditions.

"Nous avons pris les devants car entre le confinement et l'état d'urgence, nous avons accumulé trop de retard dans la fabrication des chars et du Den Paolig, le bonhomme carnaval, précise Mickaëlle Jadé. Et nous ne pourrons pas rattraper ce temps perdu. Et puis faire la fête avec les copains, dans les rues, les restaurants et les bars s'ils rouvrent, ce n'est pas imaginable en cette période de pandémie. Quand au célèbre défilé du dimanche qui rassemble plus de 5000 personnes, participants et visiteurs, c'est impossible".  

Un coup dur pour les finances du comité des fêtes. "Cela nous prive de nos recettes". Ce sont 17 à 18 000 euros qui ne rentreront pas dans les caisses de l'association, contrainte de faire une croix sur les prochains Grâs et après l'annulation de la fête de l'été dernier.

Pour payer les 1000 euros de loyer mensuel du hangar loué par le comité, la présidente a indiqué qu'elle solliciterait une subvention exceptionnelle de la mairie de Douarnenez qui s'est engagée à l'étudier "avec bienveillance", selon Jocelyne Poitevin, la maire. Pour renflouer les caisses, le comité a également décidé d'imprimer l'affiche 2021 avec la mention annulée et de la vendre au prix de 6 euros. Et même de ressortir l'affiche de l'année précédente. En dernier recours, Mickaëlle Jadé n'exclut pas de lancer une cagnotte participative. "Il faut anticiper pour être en capacité de proposer quelque chose dès que ce sera possible". 
 

"Ce n'est pas une surprise", soupire Nolwenn, Penn Sardin pur jus, qui en 2019, partagea la vedette avec Corinne. Den Paolig en 2019, les deux soeurs,  inséparables carnavalières depuis qu'elles sont toutes petites, font leur deuil de ce rendez-vous manqué.

"Aucun festival, aucune fête n'a pu se tenir depuis le printemps dernier. Alors, évidemment, on ne va pas risquer de faire un cluster à Douarnenez pour les Grâs! Et sans la rue, sans les bars, sans les gens, aucun intérêt. Certains disent qu'ils viendront aux Grâs coûte que coûte. Pour nous, ça n'a pas de sens. Faire une soirée déguisée, en catimini, à la maison, non merci! Ce n'est pas du tout dans l'esprit douarneniste." 

 

Le comité des Grâs a douché les espoirs des douarnenistes et de tous les habitués de ce rendez-vous festif déguisé. De mémoire de carnavaliers, les Grâs se sont toujours tenus à l'exception des deux guerres mondiales.

"Même pendant la guerre du Golfe, Douarnenez a été la seule ville en France à maintenir son carnaval" se souvient, Jean-Pierre Poënot, consacré Den Paolig l'année dernière. "Cette année-là, la neige s'est invitée. Le défilé avait été reporté d'une semaine. Mais pas le samedi soir. Du coup, on a fait la fête deux semaines de suite!"
Tel le Phénix, le fils Poënot, figure historique des Grâs, va donc renaître de ses cendres puisqu'il restera le dernier Den Paolig en titre.  


"Peut-on se déguiser en barrière pour respecter les gestes?"

Patrice Goyat, autre inconditionnel de cette fête populaire et traditionnelle, est prêt à défaillir. "Sur notre derrière que nous sommes avec ces annonces spontusses. Mais les malles de déguisements ne resteront pas fermées. Sinon ça va sentir le "Kontommé", "le touf", le renfermé quoi!" explique avec malice, ce spécialiste du parler douarneniste.


"Méchance que l'on aura quand même à tarzer ( à rigoler en français dans le texte! ) avec des Grâs confinés. A 60 ans, je n'ai jamais raté une édition. Je comprends la décision du Comité mais je ne pourrai pas m'empêcher de sortir au moins une heure, en talons et en tailleur le samedi 13 février 2021, quitte à aller ainsi faire mes courses et dans le respect de la légalité." Mais il lui manquera l'essentiel: "Jouer un personnage, interagir avec les autres."Avant de conclure: " Une question épicurienne me vient à l'esprit : est-ce que l'on aura le droit de lichouser avec le kouign des Grâs même si l'édition 2021 est annulée ?"
 

Moment de défoulement collectif, de lâcher-prise, les Grâs auraient été une sacrée soupape en ces temps si difficiles. Mais dans le contexte actuel, cela aurait pu être aussi un méchant casse-tête pour les cafetiers, fermés pour l'instant.
 
"Les Grâs, c'est 5 jours de fête et une grosse partie de notre chiffre d'affaire de l'année. Si l'on a repris notre activité en février, comment faire respecter les gestes barrières aux carnavaliers, comment éviter les débordements? "s'interroge Morgane, la propriétaire du Café des Halles, lieu incontournable du Carnaval, presque soulagée par l'annulation.
"Déjà avant ce deuxième confinement, nous passions notre temps à faire le gendarme pour suivre le protocole sanitaire et nous risquions en permanence une fermeture administrative. C'est très compliqué et intenable dans ce genre de fête" ajoute la jeune femme. 
 

"Je ferai les Grâs parce que les Grâs ont toujours été une transgression. Et bien, je transgresserai!"


Ce commentaire posté sur Facebook soulève une question: comment empêcher les Penn Sardin de s'adonner à leur sport favori ?


"Wait and see, commente la maire Jocelyne Poitevin. Personne ne sait dans quel état sanitaire sera le pays en février prochain. Il est bien trop tôt pour se prononcer sur un éventuel dispositif" explique la première édile, sans écarter l'idée que les autorités puissent imposer un couvre-feu pour cette période, si cela s'avérait nécéssaire.

Ne pouvant se résigner à une année sans Grâs, certains planchent pourtant sur une version inédite. "Avec les copains, on a pensé à faire un relais entre la Rue Neuve, au bout du Pont de Tréboul et le Bolomig, en haut des Halles. Chacun son tour, à défiler...Déguisés, evel just! C'est ce que faisaient les Anciens, des allers et retours d'un côté et de l'autre du trottoir, pour montrer leurs habits neufs" rigole Patrice Goyat. Il ne sera sans doute pas le seul à marquer le "non-événement". 

La présidente du comité promet elle aussi de porter perruque et fourrure juste pour aller chercher son pain le samedi des Grâs," ce jour-là, c'est sacré!"Elle non plus n'a jamais manqué à l'appel depuis qu'elle est gamine, même lorsqu'elle vivait en Afrique avec ses parents. "Et dès qu'on y sera autorisée, on fera la fête. Une course de caisses à savon, une pétanque déguisée, un bal en plein air, enumère Mickaëlle Jadé. Plus que jamais on a besoin de se retrouver en famille, entre amis, en respectant les consignes sanitaires".

Une chose est sûre conclut Patrice Goyat: "Si cette année, on fait des Grâs allégés, ce sera Gras double en 2022!" 

 
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