C’est un véritable trésor. Des milliers d’ouvrages et de documents sur l’histoire, la littérature et la langue bretonne que la famille Miorcec de Kerdanet vient de déposer au Centre de Recherche Bretonne et Celtique. Des livres que la famille a accumulé et jalousement protégé pendant des siècles seront désormais mis à la disposition des historiens et des chercheurs.
Un jour, il y a une vingtaine d'années, Ronan Calvez voit arriver dans son cours sur la littérature en breton, un jeune étudiant nommé Miorcec de Kerdanet. La famille est connue pour avoir abrité une extraordinaire collection de livres et de textes en tout genre. Mais personne, pas même Anatole Le Braz n’a jamais réussi à avoir accès à leur bibliothèque.
"Depuis la seconde guerre mondiale, on croyait même que le fond avait disparu" explique Marie-Alice Le Corvec, archiviste au CRBC (Centre de Recherche Bretonne et Celtique).
Ronan Calvez interroge quand même le jeune homme. L’enseignant est à la recherche du "Bouffon moqueur", un opéra comique et licencieux écrit en breton par François-Nicolas Pascal de Kerenveyer. Un texte qui a été décrit mais qui demeure introuvable.
"Je ne sais pas répond l’étudiant, téléphonez à mon oncle", suggère le jeune homme.
Ronan Calvez compose aussitôt le numéro. "Je crois que j’ai quelque chose qui ressemble à ce que vous cherchez", lui répond alors Jacques Miorcec de Kerdanet.
Un trésor incroyable
Au début du XIXème siècle, Daniel-Nicolas Miorcec de Kerdanet et Daniel-Louis Miorcec de Kerdanet, tous deux avocats sur la région de Lesneven dans le Finistère commence à collecter des ouvrages et des documents sur le droit, l’histoire de la région, la littérature, la langue bretonne.
Ils amassent des centaines de pièces, la plus vieille date de 1252 et pendant deux siècles, la famille conserve précieusement et jalousement ce trésor.
En 2005, Ronan Calvez découvre donc le "Bouffon moqueur" et le fait rééditer. Un lien s’est tissé avec la famille Miorcec de Kerdanet, il ne sera plus jamais rompu.
Des années plus tard, Jacques Miorcec de Kerdanet invite Ronan Calvez à venir voir le fond.
"Je ne savais pas ce que ça allait devenir après moi, indique-t-il. Je souhaitais que ça serve et que ce soit utile. Quand je vois tout ce qu’on peut faire à partir d’un livre quand on se penche dessus, c’est fabuleux."
Une mine d'or pour les chercheurs
Il a donc déposé l’incroyable collection au Centre de Recherche Bretonne et Celtique. Plus de 1 000 volumes en français, en latin, en breton. Des manuscrits originaux du XVIème siècle, des ouvrages jusqu’ici inconnus, des documents sur le droit, des pièces uniques tous dans un excellent état de conservation.
Marie-Alice Le Corvec a découvert notamment un petit cahier secret qui servait à recevoir les dénonciations qui recense les filles-mères à Lesneven au XVIIème siècle.
"Tous ces ouvrages vont nous permettre d’étudier la société médiévale, celle de l’Ancien-Régime, la vie quotidienne, la seigneurie se réjouit" Yves Coativy, directeur du CRBC. "Les textes écrits en breton sont très rares, le français et le latin étaient les langues officielles, le breton était marginalisé."
Tous ses documents ont trouvé refuge dans une salle spécialement dédiée au don de la famille. Les plus précieux et les plus fragiles vont être numérisés.
Tous seront consultables dès la rentrée à la faculté de Brest.