Depuis Kiev, où les Rouge et Noir affrontaient le Dynamo Kiev en Ligue Europa, Olivier Létang (aujourd'hui président du Stade rennais mais avant directeur sportif du PSG) s'est dit "profondément choqué et blessé" par les accusations de fichages ethniques au sein du club parisien.
L'enquête a été menée par Mediapart et Envoyé Spécial de France 2 sur la base des documents des Football Leaks. Elle révèle que le PSG aurait fiché, entre 2013 et 2018, de jeunes joueurs en fonction de leur origine ethnique. "Français", "Maghrébin", "Antillais" ou "Africain" : voilà les quatre cases que devaient cocher les recruteurs du PSG qui ont fiché ethniquement des jeunes joueurs scrutés par le club parisien.
Une information confirmée ce jeudi après-midi par le PSG qui dit avoir ouvert une enquête interne. Le club de la capitale affirme que "des formulaires avec des contenus illégaux ont été utilisés entre 2013 et 2018 par la cellule de recrutement du centre de formation, dédiée aux territoires hors Ile-de-France". Et de dénoncer une "initiative personnelle du responsable de ce département". Autrement dit, une initiative de Marc Westerloppe, ciblé par Mediapart, et parti cette année au Stade rennais.
Un critère utilisé contre le recrutement du Rennais Yann Gboho
A l'origine, il y a un footballeur en herbe : Yann Gboho (international français, né en Côte d'Ivoire) qui joue au FC Rouen et tape "dans l'oeil" d'un "recruteur du PSG pour la région Normandie, Serge Fournier", lit-on dans les "Football Leaks". Une "fiche remplie le 2 novembre 2013" mentionne ainsi "antillais". "Le PSG ne voulait pas qu'on recrute des joueurs nés en Afrique, car on n'est jamais sûr de leur date de naissance", lâche M. Fournier, interrogé par Mediapart. "Deux ans plus tard, dans la case origine, il écrit : Afrique noire", selon Mediapart. Le joueur signe finalement à Rennes.
Le nom de Gboho suscite ensuite "bien des remous au PSG, comme le montre le compte rendu interne d'une réunion formation qui s'est tenue le 14 mars 2014", peut-on
lire dans les "Football Leaks". Au cours de cette réunion, Marc Westerloppe déclare, selon ce document : "On ne va pas revenir sur ce sujet. Il y a un problème sur l'orientation du club, il faut un équilibre sur la mixité, trop d'Antillais et d'Africains sur Paris".
Envoyé Spécial, en partenariat avec Médiapart et le consortium de journalistes européens EIC :
Olivier Létang "profondément choqué"
"Les allégations parues dans divers organes de presse aujourd'hui m'ont profondément choqué et blessé, a répondu Olivier Létang depuis Kiev, où Rennes joue en Ligue Europa. Non seulement ces attaques me touchent personnellement mais également ceux qui me sont proches", écrit le président du Stade rennais qui poursuit dans son communiqué :
"Tous ceux qui ont vécu dans des vestiaires, ce qui est ma vie depuis plus de 30 ans, savent parfaitement que le racisme et la discrimination n'ont pas leur place dans le sport", a protesté le président rennais, qualifiant ces "insinuations" de "malveillantes".
"Dans le cadre de mes responsabilités au PSG, les objectifs fixés concernant le recrutement pour le centre de formation n'ont jamais varié : s'attacher les meilleurs
jeunes joueurs dans le but de les faire évoluer à terme avec l'équipe professionnelle. Cela a été ma seule motivation au PSG comme cela a toujours été le cas dans les
clubs ou j'ai oeuvré", a-t-il poursuivi.
"Consternation" de la ministre des Sports
Interrogée par l'AFP, la CNIL rappelle que la loi "interdit (...) de recueillir et d'enregistrer des informations faisant apparaître, directement ou indirectement, les origines "raciale" ou "ethniques"."C'est à l'encontre de l'image, des valeurs, de l'éthique que porte le club depuis longtemps", a aussi regretté auprès de l'AFP le directeur général délégué du Paris SG, Jean-Claude Blanc. "C'est pour ça que le sentiment qu'on a aujourd'hui, c'est un sentiment de trahison."
La Ligue des droit de l'homme (LDH) a en tout cas annoncé son intention de porter plainte, la Licra (Ligue internationale contre le racisme et l'antisémitisme) a évoqué des faits "très graves" et indiqué que sa "commission juridique" était "saisie". Quant à la ministre des Sports, Roxana Maracineanu, elle a fait part de sa "consternation". "Si ces faits de discrimination sont avérés, ils sont passibles de sanctions disciplinaires voire pénales. On ne peut pas tolérer que des personnes soient identifiées, recrutées selon leur couleur de peau ou leur origine", a affirmé la ministre.