Le maire de Plouha, Xavier Compain, a annoncé avoir saisi la justice administrative pour dénoncer le non-respect par l'Etat des droits fondamentaux de la personne dans les Ehpad publics. Les ùaies, dont une quinzaine font partie de la saisine, sont responsables de la gestion de ces Ehpad, qui souffrent d'un manque de moyen.
C'est un nouvel épisode dans le bras de fer, mené en Bretagne, entre les communes gestionnaires d'Ehpad et l'Etat. Ces derniers souffrent de sous-financement chronique. Une situation que dénoncent une quarantaine de maires bretons depuis des années. En août dernier, ils avaient décidé de ne plus payer les factures d'électricité de leurs établissements.
En septembre 2023, une centaine de maires réunis dans un collectif se réunissait à Bégard, dans les Côtes d'Armor, menaçant une action en justice contre l'Etat.
Le gouvernement avait apporté 5 millions d'euros d'aide d'urgence en juillet dernier, qui étaient jugés insuffisants.
Tribunal administratif
Ce jeudi 16 mai, les dossiers ont été envoyés au tribunal administratif de Rennes et remis à la ministre déléguée chargée des personnes âgées Fadila Khattabi, lors d'une rencontre au ministère où se sont rendus plusieurs élus bretons, maires et présidents de conseils départementaux, a expliqué Thierry Compain.
Les demandes d'indemnités préalables pour tous ces dossiers s'élèvent à sept millions d'euros, selon le maire.
Les dossiers, divers selon les mairies (Plouha, Plouaret, La Roche-Jaudy...) et établissements, dénoncent un non-respect des droits fondamentaux de la personne, évoquant par exemple des "toilettes de résidents faites plus rapidement, des soins buccaux-dentaires reportés, le fait qu'on soit passé de l'alimentation normale à du mouliné, etc.", a détaillé M. Compain.
Les élus estiment à "10 à 12 milliards d'euros par an" l'enveloppe nécessaire pour "remettre à flots les Ehpad" au niveau national et "les maintenir en état de fonctionnement", selon M. Compain.
Ils demandent aussi un financement de la cinquième branche de la Sécurité sociale et une loi sur le grand âge pour avoir "une vision à long terme".
Des "territoires en résistance pour le grand-âge"
Lors de la réunion, les élus ont estimé ne pas avoir reçu de réponses concrètes de la ministre, qui selon eux a indiqué que la création d'une nouvelle cotisation n'était pas exclue et qu'elle entendait se tourner vers le Cese (Conseil économique, social et environnemental) sur la faisabilité d'une loi sur le grand âge.
"Le défi pour nous dans ce rapport de force est d'avoir un mouvement d'ampleur national. L'objectif est de passer de 15 à 50 dossiers ou plus, afin d'avoir un effet de masse", a souligné M. Compain.
Ces maires font partie du mouvement "Territoires en résistance pour le grand-âge", qui réunit désormais quelque 350 collectivités, en majorité bretonnes, et qui sera établi en association le 23 mai, à l'occasion d'une réunion à Plouha pour le premier anniversaire du mouvement.
Contactée par l'AFP, Mme Khattabi a rappelé que "la part de l'Etat dans le financement des Ehpad, y compris bretons, n'avait cessé d'augmenter ces dernières années". En 2019, la branche autonomie de la Sécurité sociale y participait à hauteur de 8,5 milliards par an, une somme qui atteint aujourd'hui 12,5 milliards, a-t-elle dit.
"Il n'en demeure pas moins que des difficultés subsistent", d'où la décision récemment annoncée d'augmenter de 5% les dotations annuelles des ARS (agences régionales de santé) aux Ehpad publics, a-t-elle expliqué.
Elle a également rappelé le lancement d'une "expérimentation avec 20 départements volontaires pour que l'Etat renforce son rôle dans le financement des Ehpad": "C'est un jalon important pour résoudre durablement ces difficultés", a-t-elle affirmé, en estimant que "toutes ces avancées récentes auront un impact positif sur les finances des Ehpad bretons".
(Avec AFP)