Louis Pautrel, maire de Le Ferré, agressé par un habitant de sa commune : "on n'est jamais préparé à ça"

Lundi 12 octobre, un habitant de Le Ferré en Ille-et-Vilaine a physiquement agressé le maire, Louis Pautrel. Si son agresseur a été condamné en comparution immédiate, l'élu a du mal à s'en remettre.

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"C'est quelque chose qui a été violent et qui est très perturbant. Je ne souhaite pas m'exprimer sur le sujet".

Il n'a pas vraiment envie d'en parler, Louis Pautrel. Des faits, de la peur qu'il a ressentie et de la sidération qui le tenaille toujours, 5 jours après avoir été agressé par un habitant de sa commune. C'était le lundi 12 octobre. Au téléphone, on entend dans sa voix que le maire de Le Ferré en Ille-et-Vilaine ne s'en remet toujours pas.

Agressé en pleine réunion


Alors qu'il est en réunion à la mairie, celui qui a entamé son cinquième mandat en mars dernier est pris à partie par un habitant d'une quarantaine d'années.
Excédé par le bruit fait par les bouteilles qui se brisent en tombant dans le container à verres situé à proximité de son logement, l'homme, sous l'emprise de l'alcool et d'autres substances illicites, finit par s'en prendre physiquement au maire.
 

Quand ça vous arrive, vous êtes sonné.

Louis Pautrel, maire de Le Ferré



Il le plaque sur une table et menace de le frapper. Louis Pautrel doit de ne pas être blessé aux personnes alors présentes qui maîtrisent l'agresseur.

Les communes rurales ne sont plus épargnées


"Quand ça vous arrive, vous êtes sonné, finit-il par accepter de raconter. On n'est jamais prêt à être plaqué sur la table du conseil municipal. Et je ne connais pas un élu qui soit préparé à ça. Et que ça arrive dans une petite commune rurale comme Le Ferré n'est plus exceptionnel".

Le Ferré est en effet une commune rurale d'un peu moins de 700 habitants, située au nord-est de Rennes en Ille-et-Vilaine. 
 
Et Louis Pautrel sait de quoi il parle : il est conseiller départementtal et président de l'association des maires ruraux d'Ille-et-Vilaine. Un ancrage territorial local qui lui donne une vision précise de ce qu'il appelle "un phénonmène de société. Ce sont des situations auxquelles les élus des petites communes sont de plus en plus confrontés. Ca devient compliqué. Et ça s'est aggravé avec la crise sanitaire, le confinement, le déconfinement et la restriction de certaines libertés."

Mais difficile d'avoir des chiffres et des témoignages. Les maires de communes rurales qui ont été agressés par l'un de leurs administrés et que nous avons contactés ne souhaitent pas revenir sur le sujet. Soit par peur de représailles, soit pour "oublier toute cette histoire".
 

Un rejet des institutions


Vincent Denby Wilkes, lui, veut bien nous raconter l'agression dont il a été victime fin 2019 et pour laquelle il a porté plainte. Mais "je ne peux pas trop vous en dire. Il y a une procédure en cours. Le Parquet de Saint-Malo a fait appel du jugement de première instance : l'auteur des faits n'avait pas été condamné".
 

Jamais je n'aurais pensé être un jour agressé. Jamais.

Vincent Denby Wilkes, maire de Saint-Briac



Peu après minuit, le 13 décembre 2019, il est "violemment" frappé à plusieurs reprises dans le dos par un habitant de Saint-Briac. Vincent Denby Wilkes est le maire de la commune depuis 2014, réélu au premier tour lors des municipales de mars 2020 : 
 
L'agresseur présumé a un contentieux depuis plusieurs années avec la municipalité. "Clairement, cette agression, c'était pour faire céder les services municipaux en sa faveur, explique l'élu. S'attaquer à un maire, c'est remettre en cause le rôle de l'élu et la collectivité qu'il représente. C'est rejeter l'Institution. L'élu prend des décisions en fonction de règles collectives et légales. Le point de vue personnel n'entre pas en ligne de compte. Mais pour être sincère, jamais je n'aurais pensé être un jour agressé. Jamais".
 

On constate une dureté grandissante dans les échanges. On sent parfois que ça peut vite aller plus loin.

Vincent Denby Wilkes, maire de Saint Briac



Saint-Briac est une commune à la fois rurale et littorale. Dans cette station touristique du nord de l'Ille-et-Vilaine, vivent 2000 habitants à l'année. "Mais l'été, on a jusqu'à 15 000 habitants".
 
Jamais la commune n'avait connu de faits similaires à ceux de décembre 2019. Pourtant, Vincent Denby Wilkes s'inquiète : "on constate une dureté grandissante des échanges entre les gens et les élus et même les agents municipaux. On lutte contre ça et heureusement, c'est le fait une petite minorité. Mais on sent parfois que ça peut vite aller plus loin, explique-t-il. Il y a une absence de limites dans l'expression qui est liée à une forme de liberté que donnent les réseaux sociaux. Pouvoir écrire des choses brutales sans aucun filtre sur un réseau social mène à ce que les gens se comportent ensuite brutalement et sans filtre dans la vie réelle."

"Inacceptable"


Un point de vue partagé par Louis Pautrel , le maire de Le Ferré : "quand on voit l'attaque du commissarait de Champigny-sur-Marne...Aujourd'hui, on ne respecte plus l'autorité. Les gens se défoulent d'abord sur les réseaux sociaux. Puis certains, qui sont peut-être psychologiquement fragiles, en arrivent à une violence physique réelle".

Cette agression, Jean-Luc Chenut, le président du conseil départemental d'Ille-et-Vilaine, l'a qualifiée d' "en tous points inacceptable" dans un communiqué publié sur son compte Twitter
 

 

Comparution immédiate 


Comme Vincent Denby Wilkes, Louis Pautrel a porté plainte. Pour violences sur un officier public.
 

Jeter l'éponge, ça aurait été donner raison à ceux qui se comportent comme ça

Louis Pautrel, maire de Le Ferré



Son agresseur, déjà connu de la justice, vit depuis une dizaine d'années à Le Ferré. Il a été jugé en comparution immédiate mercredi 14 octobre. Et condamné à 8 mois de prison avec sursis probatoire de 2 ans, à l'obligation de se soigner, l'obligation de travailler et à l'interdiction de s'approcher du domicile du maire.

"On m'a demandé si je voulais assister à l'audience. J'ai dit non, avoue Louis Pautrel. Honnêtement, je ne me sentais pas capable d'y aller. Pourtant, je ne suis pas quelqu'un de peureux de nature".

Et à la question de savoir si cette agression a en cause son engagement de maire, il réagit tout de suite : "certainement pas ! Je ne veux pas donner raison à ce genre de gestes. Et jeter l'éponge, ça aurait été donner raison à ceux qui se comportent comme ça".

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