Les premières conclusions d'une double enquête, suite à la suspension de deux professeurs suspectés de pédophilie, dont un à Orgères(35) ont été dévoilées ce lundi, par le Ministère de l'Education nationale.
Le Ministère de l'Education nationale a rendu ses premières conclusions, après la suspension de deux professeurs suspectés de pédophilie : l'un en Isère, l'autre en Ille-et-Vilaine. Parmi les constats provisoires : les informations concernant les poursuites et condamnations n’avaient pas été transmises au ministère. Cette constatation laisse apparaître des dysfonctionnements en termes de communication, entre l'autorité judiciaire et l'institution scolaire. En cause ? La transmission d’informations judiciaires de nature pénale se heurte au respect du secret de l’instruction et de l’enquête.
Rappel des faits
Un professeur de sport dans un collège d'Orgères, a été suspendu en mars. Il avait été condamné en 2006 pour détention de l'image d'un mineur présentant un caractère pornographique. Rien n'a permis de conclure à d'éventuelles agressions d'élèves. L'homme est actuellement mis en examen pour agression sexuelle de mineur de moins de 15 ans "dans le contexte familial".
Ce que les investigations publiques révèlent sur ce dossier
Le 27 mars 2015, l'ex-compagne de cet enseignant prévient l'Education nationale que son ancien compagnon a été condamné en 2006, pour des faits de pédopornographie. Le procureur de Rennes a confirmé l'existence de cette condamnation. A l'époque, l'enseignant est condamné à 2 ans d'emprisonnement avec sursis, et mise à l'épreuve pendant 3 ans. Le magistrat rapporte également que des poursuites sont en cours depuis 2011 pour "atteinte sexuelle sur mineur de 15 ans par ascendant et détention d'images pédorpornographiques en récidive". Au rectorat et avant cela, le dossier administratif ne comporte aucune mention d'un avis donné les autorités judiciaires, sur ces deux affaires.Une fois la condamnation révélée, le rectorat procède à des recherches. Des courriels datant de 2011 établissent que le principal du collège d'Orgères a été informé d'une garde à vue de l'intéressé. Le principal en rend alors compte au DASEN (Directeur académique des services de l'Education nationale) soulignant que "la situation personnelle de l'intéressé est complexe". Quelques jours plus tard pourtant, le chef d'établissement renvoit un autre message au DASEN, indiquant que selon l'enseignant, c'était son fil qui avait porté plainte contre lui et que la police lui avait interdit de quitter le département et d'assurer des colonies de vacances au cours de l'été. Le DASEN estimant alors qu'il s'agit d'un différend familal, ne fait pas remonter l'affaire au rectorat.
Une information perdue
Plus tard en 2013, des échanges informels ont encore lieu entre le principal du collège et les services de police. L'enseignant demande en effet une attestation de moralité, suite à sa séparation avec son ex-compagne. Le fonctionnaire de police contacté évoque "un très bon client vue l'épaisseur du dossier" et rapporte "qu'il avait été jugé pour une partie des faits mais que ce n'était pas terminé" et "qu'il fallait être prudent surtout concernant sa condamnation pour téléchargement pour images pédophiles". Suite à ces éléments, le DASEN fait cette fois suivre un courriel du principal au rectorat, lequel ne sera pas traité immédiatiement. Résultat : l'information s'est "perdue", sans avoir été communiquée ni au directeur des ressources humaines, ni au cabinet du recteur ou au recteur lui-même.Une condamnation qui aurait due être transmise
Lors de l'exécution de la première condamnation de l'enseignant, l'Education nationale n'a pas été prévenue, alors que par deux notes datant de 1994 et 2001, le procureur de la République de Rennes de l'époque avait rappelé à ses services la nécessité de prévenir les administrations des poursuites et condamnations concernant leurs agents.Bientôt une loi obligeant la Justice à transmettre les condamnations à l'administration
Suite à ces différentes affaires, la ministre de l'Education nationale a donc décidé de prendre des mesures. Une loi va obliger la Justice à transmettre à l'administration les condamnations de ses agents exerçant une activité en contact avec des mineurs. Elle vise à transmettre les condamnations mais aussi à informer l'administrationdes procédures judiciaires en cours d'instruction ou en cas de mise en examen, dans le respect de la présomption d'innocence, a souligné Mme Taubira. Cette disposition législative sera introduite à l'occasion de l'examen, le 1er juin à l'Assemblée nationale, du projet de loi relatif à l'adaptation de la procédure pénale au droit européen. L'objectif est que le dispositif soit opérationnel à la rentrée.