Canicule. Pour éviter de suffoquer, comment les villes vont devoir s'adapter

Alors que la Bretagne subit une nouvelle vague de canicule précoce, des solutions existent pour limiter les effets d'îlots de chaleurs dans les villes : il faut repenser l’urbanisme et l’architecture des villes, végétaliser les espaces, etc. Les villes du sud de l’Europe peuvent être de bonnes sources d’inspiration.

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Alors que la Bretagne subit une nouvelle vague de canicule précoce, certains territoires de la région sont plus durement touchés que d’autres : les villes. "La nuit, des différences de température peuvent aller jusqu’à 6 degrés entre les milieux urbains et la campagne", explique Vincent Dubreuil, géographe climatologue et enseignant à l’université Rennes 2. 

C’est justement le cas de Rennes, qu’il étudie depuis 20 ans avec son équipe. Ils ont mis en place des mesures de suivi des différents îlots de chaleur dans la métropole rennaise. Avec 30 stations et une centaine de capteurs connectés ils ont cartographié la ville et repéré des îlots de chaleur dans les différents quartiers. 

Ces îlots "dépendent essentiellement de la densité des bâtiments dans ces quartiers".  Il y a un "effet Canyon"  avec des rue étroites et encaissées qui empêchent la circulation des vents et favorisent la stagnation des masses d’air. Autre élément essentiel : La présence ou plutôt l’absence de végétation. Ces cartes révèlent des "ilots de fraicheurs dans Rennes, notamment dans des endroits avec plus de végétation comme autour du parc des Gayeulles ou des prairies Saint-Martin". 

Gagner un ou deux degrés

Ces zones végétalisées, nous assure le climatologue, aident à faire diminuer la température d’un ou deux degrés. Un atout précieux quand on sait que les phénomènes caniculaires ont vocations à se multiplier dans les prochaines années. "Il y a le seuil de la nuit tropicale qui se situe à 20 degrés, explique-t-il. Si la température ne descend pas en dessous, nous avons une nuit tropicale. Pendant les vagues de canicules, la température est la même entre la ville et la campagne. La nuit en revanche, la température baisse autour de 17 degrés à la campagne mais reste à 22, 23 voire 25 degrés en villes. Si notre organisme est capable de supporter 40 degrés pendant la journée, il a besoin d'une phase nocturne de récupération autour de 18 degrés." 

Des solutions à la pelle

Côté solutions, "il faut déjà faire preuve de réalisme. Il faut loger les gens et prendre en compte les contraintes fortes de préservation des bâtiments historiques". Pas question pour lui de repeindre en blanc l’opéra de Rennes. Mais les solutions sont nombreuses et variées.

On peut jouer "sur la couleur des sols et sur la nature des matériaux", avance-t-il. Lors de la rénovation ou la construction de bâtiment "le choix des matériaux de façades est primordial, explique Marie Volodos, Architecte. Il faut privilégier des matériaux avec un albédo élevé : le blanc c’est mieux que le noir. Il conserve moins la chaleur, comme pour vos vêtements. L’inertie du matériau a aussi son importance, il faut une inertie faible. Le bois « stocke » moins la chaleur que du zinc ou du bitume." 

Pour elle, il est primordial de privilégier "les architectures bioclimatiques : Il faut bien concevoir le logement (exposition, protection solaire, ventilation, organisation spatiale, isolation). Cela permet de limiter, voir supprimer, l’utilisation de la climatisation". 

"Il faut également privilégier le low-tech plutôt que le high-tech. Cela permet de limiter les énergies nécessaires à l’utilisation de matériel, ça limite la chaleur émise par les machines. C’est plus respectueux de l’environnement, moins coûteux et meilleur pour la planète."

La végétation et la perméabilité des sols ont un rôle essentiel pour les villes de demain.

Marie Volodos- architecte

Côté urbanisme, il y a aussi y a des choses à faire. Plus de parcs, plus de surfaces végétalisées. En effet, "les sols perméables favorisent l’évaporation, détaille Marie Volodos. Et la transpiration des végétaux rafraîchit l’air. La végétation et la perméabilité des sols ont un rôle essentiel pour les villes de demain. Et ça se réfléchit aussi à l’échelle d’une parcelle. Chacun à un rôle à jouer : limiter la construction ensurface au sol, privilégier la hauteurdans la mesure du possible. En privilégiant une végétation et la perméabilité de son jardin, on peut contribuer à limiter l'effet d'ïlot de chaleur urbain." Attention à ne pas bétonner son jardin !

Mais attention à ne pas planter tout et n’importe quoi ! "Il faut prendre garde aux espèces introduites, prévient Vincent Dubreuil. Il faut des arbres tolérants au climat actuel et aux température futures. Le climat sera plus sec et chaud. Il faudra gérer l’eau aussi. Sans eau, l’arbre ne transpire pas." Un peu de bon sens ne fait pas de mal non plus : "c’est bien de planter mais c’est surtout essentiel de préserver quand c’est possible. Il faut faire attention ne pas enlever les arbres déjà présents."

L’exemple du sud de l’Europe

"On remarque bien que les villes sont pensées différemment entre le Sud et le Nord, s’enthousiasme Marie Volodos. Au Sud, on privilégie des rues étroites pour limiter l’apport de soleil qui chauffe les rues et les façades. C’est bien sûr plus facile à appliquer pour un nouveau quartier ou un lotissement mais cela n’empêche pas de s’en inspirer. Il existe aussi des système de protection solaire avec parfois des installations plus ou moins éphémères dans les rues. Au Portugal ou en Italie, des communes installent des toiles de couleurs qui vont d’une façade à une autre."  Les points d’eau aussi peuvent aider à rafraichir l’air : fontaine, mur d’eau etc.

"Il y a beaucoup de choses à faire au niveau du réchauffement climatique, conclut Vincent Dubreuil. Mais pour cela il faut un vrai engagement." A ce propos, les collectivités peuvent aller voir les notices de l’ADEME. Elles proposent de nombreuses solutions pour les élus. 

Les petites villes aussi devront s’y mettre 

Le littoral est plutôt épargné par le phénomène. "Dans ces ville côtières, le rafraîchissement est favorisé par l'effet tampon de la mer et l’océan, explique M. Dubreuil. Mais toutes les autres villes sont touchées par le phénomène d’îlot de chaleur, peu importe leur taille. Vitré est aussi touchée. Nous y avons observé des îlots de chaleur de 4 degrés. Dans des villes de 5000 habitants, c’est moins fréquent, moins fort mais pas inexistant." 

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