Le glyphosate est l'herbicide à large spectre le plus utilisé au monde. Selon des chercheurs de Rennes 1, l'exposition régulière à cette molécule modifie le cerveau, la flore intestinale et le comportement des rats.
Utilisé depuis 1974, le glyphosate entre dans la composition de très nombreux pesticides. C'est actuellement l'herbicide le plus couramment utilisé au niveau mondial.
Son effet sur la santé fait débat, notamment concernant le développement de cancers.
Le glyphosate au coeur de diverses études
En février 2019, une vaste étude américaine menée par trois institutions et parue dans Mutation Research, a démontré que l'exposition à cette molécule augmenterait de 40 % le risque de lymphome non hodgkinien (cancer qui se développe à partir de certains globules blancs, les lymphocytes).
D'autres études suggèrent que cet herbicide pourrait aussi affecter le cerveau et le comportement. C'est ce que viennent d'explorer des travaux menés à l'Institut de recherche en santé, environnement, travail - Université de Rennes1 et en collaboration avec le laboratoire Micalis (INRA/AgroParisTech/UPSaclay). Cette étude est parue dans Journal of Neuroendocrinology (7 mai 2019).
Cette étude montre que le glyphosate, "sous forme active seule ou bien sous la forme d'un herbicide commercial", influence le cerveau, le comportement maternel et le microbiote communément appelé "flore intestinale".
Au cours de la gestation (grossesse) ainsi que pendant leur allaitement, les rattes ont ingéré une dose identique de glyphosate (5mg/kg/jour) introduite dans des gaufrettes vanillées.
Des modifications de la communication entre les neurones
"Les chercheurs ont observé que le comportement de léchage des mères, indispensable au développement du jeune, était significativement plus élevé chez les mères traitées au Roundup 3+", rapporte Thierry Charlier, professeur à l'Université de Rennes 1, membre de l'Irset.
L'analyse du cerveau de ces rattes a montré, dans l’hippocampe et le cortex préfrontal, des modifications de la communication entre les neurones (synapses).
Enfin, des modifications du microbiote intestinal ont été mises en évidence. Or, "de nombreuses études suggèrent qu'une altération de certaines communautés bactériennes (...) était liée à diverses troubles et pathologies tels qu'Alzheimer, Parkinson ou trouble du spectre autistique", note encore le Pr Charlier.
Le rôle des adjuvants aux herbicides
Détail important; cette étude interroge également sur le rôle joué par les adjuvants.
En effet, les chercheurs ont noté des effets différents entre glyphosate utilisé seul (et jamais utilisé tel quel comme herbicide) et le produit commercial. "Les versions commerciales contiennent toutes une série de composés adjuvants, (...) qui permettent notamment la pénétration du glyphosate dans la plante. Ces molécules telles quelles pourraient avoir un effet sur les vertébrés mais pourraient également interagir avec le glyphosate pour impacter le microbiote, la physiologie du cerveau et/ou le comportement."
Enfin les chercheurs concluent sur le fait que les conséquences à long terme ne sont pas encore connues.
"Il reste ainsi de nombreux travaux à réaliser afin de pouvoir déterminer comment les différents pesticides à base de glyphosate pourraient impacter la santé."