Une ancienne détenue de la prison de Rennes a demandé ce 6 décembre 2024 au tribunal administratif de Rennes de condamner l'État à l'indemniser des "fouilles intégrales" abusives pendant son incarcération à la prison des femmes de Rennes. Elle y avait été écrouée de 2007 à 2013, après avoir été reconnue coupable de l'assassinat d'un riche septuagénaire à Paris en 2005.
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Elle avait été condamnée par la cour d'assises d'appel de l'Essonne pour avoir empoisonné un riche septuagénaire en janvier 2005 dans une chambre de bonne du 16e arrondissement de Paris. Incarcérée à la prison des femmes de Rennes de 2007 à 2023, cette femme a demandé ce 6 décembre au tribunal administratif de condamner l'État à l'indemniser des "fouilles intégrales" qu'elle estime avoir injustement subies pendant son incarcération.
En avril 2012, elle avait vu sa condamnation aggravée par la cour d'assises d'appel de l'Essonne, en écopant de vingt ans de réclusion criminelle pour cet assassinat. Cette connaissance de la victime avait été rapidement inquiétée : elle avait retiré 32 000 € sur son compte quelques semaines avant les faits et un faux testament la désignait comme héritière du défunt, pour plus d'un million d'euros placés sur des assurances-vie.
Elle avait été écrouée à la maison d'arrêt des femmes de Rennes, connue pour accueillir les détenues purgeant de longues peines de réclusion criminelle. Passée par la maison d'arrêt pour femmes de Fleury-Mérogis, celle qui est aujourd'hui âgée de 69 ans a toujours clamé son innocence : elle avait même demandé "la révision" de son procès et tenu un blog dans lequel elle expliquait qu'elle ne tiendrait pas "dix ans de plus en prison".
Au cours de son incarcération à Rennes, cette Parisienne avait subi à plusieurs reprises des fouilles intégrales qu'elle jugeait "disproportionnées" et "attentatoires à sa dignité humaine" : elle a donc saisi le tribunal administratif de Rennes pour que le ministre de la Justice lui verse 100 € par fouille illégale - elle en dénombrait quatre au total. Dans une publication Facebook d’octobre 2023, elle annonçait d'ailleurs sa libération et expliquait avoir subi "beaucoup de souffrances" et de "harcèlement" à Rennes.
"L'administration pénitentiaire garantit à toute personne détenue le respect de sa dignité" fixe en effet le code pénitentiaire. "Les fouilles intégrales des personnes détenues doivent être justifiées par la présomption d'une infraction ou par les risques que leur comportement fait courir à la sécurité des personnes et au maintien du bon ordre dans l'établissement."
"Si les nécessités de l'ordre public et les contraintes du service public pénitentiaire peuvent légitimer l'application à un détenu de mesures de fouille (...) répétées, elles ne sauraient revêtir un caractère systématique", insiste le texte. "Elles doivent être justifiées (...) en tenant compte notamment du comportement de l'intéressé, de ses agissements antérieurs ou des contacts qu'il a pu avoir avec des tiers."
Les "fouilles intégrales" ne peuvent par ailleurs survenir qu'après des "fouilles par palpation" ou "l'utilisation de moyens de détection électronique". L'administration doit aussi "veiller (...) à ce que les conditions dans lesquelles elles sont effectuées ne soient pas (...) attentatoires à la dignité de la personne".
En l'occurrence, la détenue avait subi plusieurs "fouilles intégrales" pour rechercher "un téléphone portable" après avoir tenu "des propos laissant penser qu'elle possédait un tel objet". Elle s'était en effet "plainte de recevoir des notifications Facebook d'une autre détenue", a retracé le rapporteur public lors de l'audience du 6 décembre 2024, qui s'est tenue en l'absence de la principale intéressée et du ministre de la Justice. Aucun des deux n'était représenté par un avocat.
En décembre 2021, à son retour de l'Unité de vie familiale (UVF) dans "un appartement meublé situé dans l'enceinte pénitentiaire" sans "présence du personnel", elle avait encore une fois subi une fouille intégrale. Mais "il y a un risque d'introduction d'objets ou de substances interdites", a validé le rapporteur public.
Et "cette décision était limitée dans le temps et l'espace", a souligné le rapporteur public, qui n'y voyait "aucune atteinte à sa dignité". En juillet 2022, une nouvelle "fouille intégrale" était survenue : la détenue avait comparu "plusieurs fois" devant la commission disciplinaire, elle avait "cassé le téléphone de sa cellule" et était "en conflit" avec plusieurs autres détenues.
"Une simple fouille par palpation ne suffisait pas", a cette fois encore considéré le rapporteur public. De plus, "rien n'indique que la fouille s’est déroulée dans des conditions irrespectueuses" et elle était nécessaire au regard de "la petite taille des objets" recherchés. Au final, le magistrat a donc proposé de rejeter les trois requêtes introduites par cette femme qui n'a pas fait preuve d'un "comportement exemplaire en détention".
Les juges se prononceront d'ici une "quinzaine de jours", mais ils devront aussi se pencher sur la quatrième requête introduite par l'ancienne détenue et qui a dû être renvoyée.