Don de rein : toujours plus de besoins

L’agence de biomédecine lance une campagne d’information sur le don de rein. En France, une personne sur dix est touchée par une maladie rénale, mais en 2020, pendant deux mois, les greffes ont été impossibles à cause de la Covid-19. Les médecins et les malades souhaitent donc sensibiliser.

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Il y a quelques jours, le 9 octobre, Pierre Rault a fêté le premier de ses deux anniversaires, celui de sa naissance, il y a 74 ans. Au printemps, il fêtera l’autre : celui de sa renaissance, le 24 mars 1995, il y a 27 ans, il a reçu une greffe de rein !

Ses reins avaient commencé à s’affaiblir alors qu’il avait à peine 20 ans. "On m’a dit à l’époque, que c’était peut-être une grippe ou une angine mal soignée qui était tombée sur mes reins."

Pierre était agriculteur, alors, évidemment, il n’avait pas le temps d’avoir mal. Et puis, un jour, alors qu’il travaillait dans un champ avec ses enfants, il a cru mourir. "L’herbe était haute, je ne pouvais plus respirer. Je me suis dit, si je tombe, ils vont mettre des heures à me retrouver. J’ai commencé à essayer de marcher. Je faisais 5 pas, et puis je tombais à genoux pour essayer de reprendre mon souffle, j’ai fait ça, sept ou huit fois pour atteindre la voiture et là j’ai klaxonné, klaxonné."
 


Dans l’heure, le médecin est formel : "Tes reins sont foutus". "Et comme ils ne jouaient plus leurs rôles de filtres, explique Pierre, mon sang s’empoisonnait tout doucement, mais très très sûrement."

Le lendemain, Pierre commençait les dialyses. Durant plusieurs mois, tous les deux jours, pendant quatre heures, les machines ont remplacé ses reins défaillants et ont nettoyé son sang.

Je faisais la traite le matin, je soignais les vaches, les petits veaux, et hop, je filais sous la douche pour filer à la dialyse.

Pierre Rault

 

Le coup de téléphone qui bouleverse tout

 

Et puis, un matin, alors que Pierre est dans la salle de traite, le téléphone a sonné à son domicile. A l’autre bout, un néphrologue de Saint-Brieuc, "Est-ce que vous êtes toujours d’accord pour une greffe ?"

Pierre n’a pas hésité une seconde. "Il faut que vous soyez à Pontchaillou à Rennes dans deux heures."

Le soir à 10 h, Pierre s’allongeait sur la table du bloc opératoire." Le lendemain matin, le chirurgien m’a dit, votre rein a pissé sur la table, ça veut dire qu’il a marché tout de suite". Pierre se l’est aussitôt approprié. "C’est devenu mon rein". Evidemment, Pierre pense de temps en temps à son donneur. Il ne sait rien de lui, c’est la loi, mais tous les 24 mars, il fête son autre anniversaire. Celui qui lui a permis de revivre.

 

Une petite histoire de la greffe

 

La première tentative de greffe de rein s’est déroulée à Lyon en 1906. Pendant quelques décennies, les chirurgiens ont tâtonné, essayé, essuyé plusieurs échecs. Et puis, dans les années 1960, la découverte de traitements anti rejet a permis à la médecine d’avancer à grands pas.

A Rennes, la première greffe de rein a eu lieu en 1972. Ces dernières années, le Centre Hospitalier Universitaire pratique entre 80 et 100 transplantations par an.  102 en 2018, 91 en 2019, et 69 en 2020.

Car, "la transplantation rénale, c’est tout simplement, le meilleur traitement en cas d’insuffisance rénale explique le docteur Léonard Golbin du CHU de Rennes. Après une greffe, les patients se sentent mieux et vivent plus longtemps."

"En mars 2020, il a fallu tout arrêter à cause de l’épidémie de Covid-19. La transplantation rénale est un travail d’ équipe, pour pouvoir prélever les donneurs décédés, on a besoin de médecins anesthésistes réanimateurs, de places en réanimation" détaille Léonard Golbin. "Le programme de greffes a ainsi été interrompu pendant deux mois."

En France, 2 595 greffes ont pu être réalisées en 2020 contre 3 643 en 2019.

 

Des demandes en hausse 

 

"La difficulté, c’est que la demande ne cesse de croitre analyse le médecin. L’allongement de l’espérance de vie, l’augmentation des problèmes d’hypertension artérielle et de diabète font qu’il y a de plus en plus de malades qui ont besoin d’un rein alors, même si on fait un peu plus de greffes, la liste des personnes en attente ne cesse de s’allonger. Aujourd’hui, entre 9 et 10 000 personnes sont inscrites sur le registre national et attendent que leur téléphone sonne."

En Bretagne, le temps d’attente est relativement court, entre un an et demi et deux ans. Mais il peut varier d’une histoire à l’autre et suivant les parcours peut durer beaucoup plus longtemps. Pour certains patients, le temps d’attente est parfois trop long. 600 personnes décèdent chaque année en France, faute de greffon.

"La campagne de l’agence de bio médecine est importante pour parler du don d’organes" témoigne Pierre Rault.

"Je sais que c’est difficile et douloureux quand on perd un proche, mais nous sommes tous des receveurs potentiels, on ne sait pas ce qui va arriver... Quand on refuse, qu’est ce qui dit que demain, ce n’est pas nous qui aurons besoin d’un rein, d’un cœur, ou d’un foie ?" interroge-t- il.
 


Donneur vivant

 

"Aujourd’hui, la meilleure solution pour tous ceux qui attendent, c’est la greffe de rein par donneur vivant démontre Léonard Golbin. Evidemment c’est très encadré par la loi de bio éthique de 2011. Le donneur doit être un proche avec qui on entretient un lien étroit, stable et avéré depuis au moins deux ans. Cela permet d’éviter des abus et des faux donneurs qui seraient en fait des vendeurs d’organes."

Mais quand un donneur vivant est d’accord, cela permet parfois d’éviter la dialyse et cela facilite l’opération.

"Quand un patient attend une greffe par donneur décédé, ni lui, ni les équipes médicales ne savent quand un greffon sera disponible. Cela peut arriver le dimanche soir, le jour de Noël, n’importe quand. Il faut donc tout organiser dans l’urgenceQuand les choses sont programmées, le donneur et le receveur rentrent presque en même temps au bloc opératoire. Le greffon est prélevé et aussitôt transplanté. Et donc, insiste le médecin, le greffon fonctionne plus longtemps. Car pour les transplantations par donneur décédé, les reins sont placés dans de la glace avant d’être implantés et cela a un impact sur la vie du greffon."

Aujourd’hui, en France 15% des greffes de rein se font grâce à un donneur vivant. A Rennes, chaque année, entre 5 et 10 patients bénéficient de ce présent extraordinaire. Parfois un père, une mère, un frère, une cousine, un ami. "On fait très attention à ne pas faire prendre de risque au donneur souligne Léonard Golbin, mais on peut très bien vivre avec un seul rein."

Pierre Rault confirme. Depuis 27 ans, il poursuit son petit bonhomme de chemin avec un rein qui est devenu le sien.

"C’est clair, sans lui, je n’aurais pas eu une aussi belle vie sourit-il. On dit parfois que notre deuxième vie commence le jour où on comprend qu’on n’en a qu’une." Le 24 mars, il boira un coup en pensant à son donneur et aux médecins qui lui ont offert ces 27 années d’existence.
 

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