Le nombre de ces travailleurs, détachés par des entreprises européennes en Bretagne, est en forte augmentation. Les interventions contre la fraude sont également au plus haut.
Plus de 13 000 travailleurs détachés ont été envoyés en Bretagne en 2018 pour une mission temporaire par une entreprise européenne, d'après les chiffres de la direction régionale des entreprises de la concurrence, de la consommation, du travail et de l’emploi (Direccte). Une augmentation de 35 % en trois ans.
Les trois principaux pays d'origine sont la Pologne, la Roumanie et le Portugal. Ces salariés bénéficient des conditions de travail françaises, mais les cotisations sociales sont à régler dans le pays d’origine.
Manque de main d'oeuvre
Jean Guilbaud est le gérant des serres Les Jardins de Sévigné, près de Rennes. Avec une production de 1400 tonnes de tomates par an, il emploie 9 personnes en CDI et a recours à 24 saisonniers. Parmi eux, les deux tiers sont polonais ou espagnols. Mais tous ont un contrat de travail français. Il ne s'agit donc pas de travailleurs détachés.
Pour le maraîcher, par ailleurs président de l'union départementale des producteurs de légumes d'Ille-et-Vilaine, le recours aux travailleurs détachés peut être néanmoins très utile, face aux difficultés de recrutement dans un secteur sous tension.
Le recours aux travailleurs détachés n'est pas forcément systématique, mais il est important pour sécuriser certaines entreprises : sécuriser par rapport à l'absentéisme, sécuriser par rapport aux aléas administratifs. En fin de mois, on règle une facture et pas tout un tas de documents administratifs à faire.
Le bâtiment particulièrement concerné
C'est le secteur d'activité qui a le plus recours au travail détaché. Une forme de sous-traitance que permet à certains employeurs de gagner en compétitivité, admet Philippe Lelièvre, secrétaire général de la fédération du bâtiment et des travaux publics d'Ille et Vilaine.
Aujourd'hui, il n'y a pas de limites au travail détaché. On peux y recourir de façon très large. On a des exemples d'entreprises qui peuvent n'avoir que quelques salariés et faire un recours massif a du travail détaché.
Lutte contre la fraude
Le recours au travail détaché est parfaitement légal. Mais certains cassent encore plus les prix, par de la fraude. Face à ce fléau, les services de l'Etat se sont réorganisés depuis 2014 pour être plus efficaces. Résultat : 700 interventions (visites, contre-visites ou enquêtes) ont été menées par l’inspection du travail l’an dernier en Bretagne.
Cinq dossiers ont même été transmis au pénal depuis dix-huit mois dans la région. Dont une condamnation retentissante à 30 mois de prison ferme pour un employeur, en novembre 2017.
Dans la majorité des cas, la durée du travail est en cause, selon Alain Ollivier, responsable de l’unité régionale d’appui et de contrôle chargée de la lutte contre le travail illégal.
Des entreprises croient ou veulent croire que la rémunération sur une base de 35 heures leur permet, au même coût, de faire faire 60 à 70 heures hebdomadaires.