Un ancien étudiant en 4e année de médecine à Rennes (Ille-et-Vilaine) a été rejugé ce mercredi 23 mars 2022 devant la cour d'appel de Rennes pour "l'avortement illégal" qu'il aurait pratiqué sur sa compagne en avril 2014.
Un ancien étudiant en médecine à Rennes a été rejugé ce mercredi 23 mars 2022 devant la cour d'appel de Rennes pour "l'avortement illégal" qu'il aurait pratiqué sur sa compagne en avril 2014.
X. était en fait un étudiant de 4e année "brillant" : il était parvenu à passer la première année de médecine "en une seule fois", comme l'a rappelé le président de la chambre des appels correctionnels de Rennes.
Mais le jeune homme et sa compagne étaient également toxicomanes à cette période. Celui-ci se fournissait en médicaments par le biais d'ordonnances volées au cours de ses stages dans différents établissements médicaux.
En décembre 2016, ce jeune de 25 ans s'était déguisé "en interne" pour volé des médicaments au CHU de Rennes, "profitant des informations qu'il avait obtenues alors qu'il était étudiant".
Il avait tenté de forcer la porte de la pharmacie d'un bloc opératoire muni d'un pied de biche, mais avait été arrêté par les agents de sécurité, qui avaient prévenu la police.
Un nombre "impressionnant" de médicaments chez lui
X. avait déjà été condamné pour des faits similaires en octobre 2012 : il avait alors fait l'objet d'une "suspension administrative de la part du CHU" et était parvenu, avec l'aide de son avocat, Me Thierry Fillion, à éviter l'exclusion de la faculté de médecine de Rennes-1.
Mais de fait, "cela m'excluait parce que j'avais besoin du CHU pour valider mes stages", a précisé celui qui a donc du faire une croix sur sa carrière de médecin et s'est reconverti dans la recherche.
A l'époque, une perquisition menée au domicile du couple avait permis de retrouver "un nombre de médicaments et d'accessoires de médecine impressionnants, des ordonnances de méthadone, un tampon-encreur de médecin et deux dictaphones étiquetés du CHU".
Et, surtout, des "fiches Bristol" détaillant "une interruption volontaire de grossesse (IVG) par voie médicamenteuse" nommant sa compagne.
"Le protocole a vraisemblablement été efficace note X.", a retracé le président de la chambre, Alain Kerhoas, constatant que l'étudiant en médecine avait "suivi heure par heure les effets" de l'avortement médicamenteux.
Entendue "sans concertation possible" avec son compagnon placé en garde à vue, la compagne du prévenu avait spontanément déclaré à un policier avoir "fait un test de grossesse positif".
Le couple aurait ensuite "choisi de ne pas garder l'enfant", et X. aurait administré un "médicament rond et blanc" à sa compagne, dont elle ignorait tout. Mais cette dernière était finalement revenue devant ses déclarations initiales devant les policiers.
on ne sait même pas si elle était enceinte
X. - qui avait été condamné par le tribunal correctionnel de Rennes en 2020 à six mois de prison ferme et douze autres avec sursis probatoire pendant trois ans - avait donc fait appel du jugement de première instance : il reconnaît tous les faits sauf cet "avortement illégal", et donc "la mise en danger" de la vie de sa compagne.
"Je faisais des cas cliniques, j'écrivais tout un tas de trucs, mais jamais je ne l'aurais mise en danger", a-t-il répété lors de son procès en appel.
L'avocate générale a pour sa part estimé que cet "apprenti sorcier" avait bien "pratiqué cette IVG en connaissance de cause", "de 14h15 jusqu'à 6 h le lendemain matin", alors qu'il n'avait "pas les qualités de médecin" et qu'il faisait cela "hors d'un établissement hospitalier".
Elle a donc requis à l'encontre de X. un an de prison ferme et un an avec sursis probatoire, soit le double de la peine ferme prononcée en première instance.
Son avocat, Me Thierry Fillion, a pour sa part déploré l'usage par l'avocate générale de nombreux qualificatifs tels que "traitement ignoble" et "absence d'empathie", fustigeant "un portrait totalement surréaliste" de celui qui est désormais père de famille.
L'avocat rennais a fait remarquer à la cour que, concernant les deux infractions d'avortement illégal et de mise en danger de la vie d'autrui, il n'y a "pas d'élément probant suffisant pour considérer que les infractions sont avérées aujourd'hui" : il n'y a "pas de témoin", "pas d'hospitalisation" et "on ne sait même pas si elle était enceinte". La cour, qui a mis sa décision en délibéré, rendra son arrêt début mai 2022.