Vidéo de l'agonie d'un homme. "J'ai filmé par réflexe, sans réfléchir" : 15 mois de prison avec sursis pour non-assistance à personne en danger

Pour avoir filmé et diffusé la vidéo d’un homme agonisant dans le métro de Rennes plutôt que d’avoir essayé de lui porter assistance, le tribunal de Rennes a condamné une jeune femme de 18 ans à 15 mois de prison avec sursis et à un stage de citoyenneté.

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Nous sommes le lundi 29 mai 2023, aux environs de 23h15, dans les couloirs du métro Henri Fréville à Rennes. Smartphone en main, une jeune femme filme le sang qui recouvre les escaliers ainsi que l’agonie d’un homme qui tombe à ses pieds. Sur les images de vidéo surveillance la scène dure moins d'une minute. Sur les réseaux sociaux la séquence dure 10 secondes. Immédiatement envoyée, aussitôt repartagée. La vidéo de la jeune femme s’est répandue sur les réseaux à la vitesse de la 5G.

La victime, elle, n’a malheureusement pas reçu d'aide aussi rapidement. L’homme qui perd son sang, agressé à la machette, décède le long du quai du métro

Recroquevillée à la barre du tribunal

Fatimata S. 18 ans, petite et recroquevillée à la barre devant la Présidente du tribunal, peine à s’exprimer. Elle ne peut justifier pourquoi elle a préféré filmer, que venir en aide à cet homme. Elle regrette, assure d’une voix fluette qu’aujourd’hui elle agirait autrement.

Elle comparaît pour enregistrement, diffusion d’images portant atteinte à l’intégrité physique d’une personne, non-assistance à personne en danger et complicité de violence. Elle encourt 5 ans d’emprisonnement.

Sur un banc voisin, son petit ami de 22 ans, Bafode G. est également jugé pour diffusion de la vidéo ainsi que son amie Barik G, 20 ans, sœur du petit ami.

Une vidéo "impossible à bloquer"

Devant les enquêteurs de Rennes qui ont pu l'identifier grâce à la vidéo surveillance et au relevé de sa carte de métro, Fatimata S. avait reconnu avoir partagé la vidéo à son compagnon et à sa mère par message téléphonique.

L’enquête de police va révéler que la sœur du petit ami, Bafode G., l’aura partagée le soir même sur Snapchat.

Depuis “il est impossible de bloquer la diffusion de cette vidéo devenue virale" affirme la Procureure de la République qui fait face aux trois prévenus. Une Procureure qui rappelle que l’accusée principale a fait perdre des chances de survie à la victime en préférant filmer et partager cette vidéo plutôt que d’appeler immédiatement les secours.

Je n'ai pas réfléchi

Fatimata S.

Pour sa défense, la jeune femme évoque le sentiment de panique qui s'est emparé d'elle face à cette situation hors norme.  “J’avais peur, j'ai filmé par réflexe. Je n'ai pas réfléchi”.

Quand la Présidente du tribunal lui demande pourquoi elle a envoyé immédiatement cette vidéo, moins d’une minute après l’avoir filmée, la jeune femme semble rentrer dans sa coquille.

“Cette vidéo m’a traumatisée” assure-t-elle à la barre du tribunal. Lors de la projection des images de la caméra de surveillance du métro et de ses propres images, Fatimata S. pleure et évite du regard l'écran de projection.

Lire : Agonie de l'homme tué à la machette dans le métro de Rennes : la vidéo retirée de Twitter

Une attitude "dépourvue d'humanité" selon le ministère public

Le Parquet, pour mettre la jeune étudiante face à ses responsabilités, lui rappelle l’action d’un sans domicile fixe arrivé sur les lieux peu après elle. L’homme avait tenté en vain de ranimer par un massage cardiaque la victime après avoir utilisé ses vêtements pour stopper l’hémorragie. Fatimata S, présente la première, s’était éloignée sans lui venir en aide. Une attitude jugée comme “dépourvue d’humanité” par le ministère public.

Elle a agi à sa mesure.

Maître Maxime Tessier, avocat de Fatimata S.

Pour sa défense, face à l’accusation de non-assistance à personne en danger, Maître Tessier insiste sur le fait "qu’elle a agi à sa mesure". “Elle a provoqué les secours en parlant aux deux personnes qu’elle a immédiatement croisées”. Pour son avocat “la jeune femme n’a pas osé faire plus”. 

Face aux accusations de complicité de violence pour avoir filmé, l’avocat assure “qu’il est impossible de penser qu’il y a de la complicité”. Tout en précisant “qu’elle n’a pas filmé l’acte de l’agression mais sa conséquence”.

Son petit ami, Bafode G., qui, selon la Présidente a été "le premier dans cette affaire à avoir correctement réagi en demandant à Fatimata d’appeler les secours” reconnaît avoir lui aussi partagé la vidéo à sa sœur, à la demande de celle-ci. “J’étais choqué je devais en parler à quelqu’un”, se justifie-t-il. 

La soeur de celui-ci, Barik G., dans une attitude presque hostile, reconnaît avoir partagé la vidéo via SnapChat à ses proches par une “story privée”. Elle insiste sur le fait que personne n’a pu enregistrer sa vidéo et que la fuite ne vient pas d’elle. Ses sourires et son comportement ont été peu appréciés par l’avocate de la victime.

Prison avec sursis et un stage de citoyenneté

Relaxée pour complicité mais condamnée pour non-assistance la jeune femme à 10 jours pour faire appel d'un jugement clément.

Le Tribunal les condamne tous à effectuer un stage de citoyenneté et à des peines de prison avec sursis. 15 mois pour Fatimata S., 6 mois pour le frère et la sœur. Par cette condamnation la Présidente a expliqué vouloir leur donner une chance, leur permettre de comprendre leur geste et essayer de les ramener vers “le vivre ensemble nécessaire quand on vit en société".

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