En parvenant à guérir des souris atteintes d'un lupus (maladie inflammatoire chronique grave), des chercheurs de l'Inserm à Rennes espèrent développer un nouveau médicament pour soigner des femmes atteintes d'une forme particulièrement agressive de cancer du sein. Une start-up vient d'être fondée.

Chaque année, 50.000 nouveaux cancers du sein sont diagnostiqués en France, 2.000 en Bretagne. Parmi eux, 10 à 20% sont des cancers dits "triple négatifs", une forme particulièrement agressive. Ces cancers touchent des femmes jeunes et donnent plus facilement lieu à des rechutes et à des métastases.

Nom de code: CD 95 L

Dans son laboratoire de Rennes, Patrick Legembre et son équipe de recherche ont d'abord découvert qu'une molécule, la CD 95L, est surexprimée chez les femmes atteintes du cancer du sein "triple négatif". Cette CD 95L favorise la migration des cellules cancéreuses et donc l'apparition de métastases.

Un dénominateur commun avec le lupus

Dans un second temps, l'équipe de l'Inserm a établi que cette même molécule se retrouve également en plus grande quantité chez les patients qui souffrent d'un lupus, une maladie inflammatoire chronique. "Lorsqu'il fonctionne bien, le système immunitaire d'un individu reconnaît les cellules de son propre corps comme faisant partie de son organisme et les épargne. Mais, dans le cas des maladies dites auto-immunes, cette "tolérance du soi" est rompue, et le corps s'attaque lui-même. Le lupus est l'une de ces pathologies auto-immunes, qui touche à 90% les femmes. C'est la plus fréquente des affections dites rares, puisqu'elle touche entre 10 et 20 personnes sur 100.000. Selon les cas, le lupus peut dégrader des organes tels que la peau, le rein, le cerveau ou le poumon."

Des souris guéries

Or les chercheurs rennais sont parvenus à guérir des souris atteintes du lupus en leur injectant une nouvelle molécule. "Nous sommes parvenus à identifier une molécule capable de bloquer cette interaction. En l'injectant à des souris atteintes de lupus, nous avons pu stopper l'inflammation et guérir la maladie", explique Patrick Legembre, directeur de recherche de l'équipe OSS (Inserme/ Université de Rennes 1/ Centre de Lutte contre le Cancer Eugène Marquis).

Efficace contre le lupus,cet outil thérapeutique pourrait l'être aussi pour le cancer triple négatif. "Si on développe un médicament chez les patients lupiques, on pourra aussi rediriger ce médicament vers le cancer du sein triple négatif", espère Patrick Legembre, qui tempère toutefois: "Si nous avons étudié le lupus en premier lieu, c'est parce que l'expérimentation était plus simple pour cette pathologie. Maintenant (...) notre objectif est de réussir les manipulations pour le cancer du sein triple négatif, qui est beaucoup moins facile à modéliser".

Ecoutez les explications de Patrick Legembre, qui dirige l'équipe OSS de Rennes, à l'origine de cette découverte importante.

Du laboratoire au lit du patient

Avant d'aboutir à un médicament proprement dit, cette découverte réalisée en laboratoire, doit encore franchir plusieurs étapes:
- trouver le moyen de construire une molécule semi-artificielle dérivée de la molécule naturelle et capable de bloquer l'interaction du CD 95L.
- gérer le dépôt de brevet
- mener les tests préliminaires permettant de prouver l'efficacité du pré-médicament
"Une fois ces étapes franchies, on peut espérer disposer d'une molécule susceptible d'intéresser les industriels de la pharmaceutique, qui seuls disposent des ressources nécessaires pour développer le médicament proprement dit."

Une start-up, Aponostics, vient d'être créée notamment pour trouver les financements nécessaires. Plusieurs millions d'euros qui permettront peut-être de vaincre un jour certaines fomes de cancer du sein ET du lupus.

Dr Patrick Legembre, directeur de recherche Inserm OSS (interview réalisée en octobre 2013) ©France 3 Bretagne

 

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