Rennes: une sépulture du Couvent des Jacobins livre ses secrets

L'un des 800 sarcophages, découverts au Couvent des Jacobins de Rennes, a commencé à livrer ses secrets. La dépouille est remarquablement bien conservée. Les conclusions des premières analyses étaient présentées ce mardi au Musée de Bretagne. Rencontre avec Louise de Quengo, inhumée au XVIIe siècle.

Elle reposait depuis quatre siècles au Couvent des Jacobins. Louise de Quengo, Dame de Brefeillac, a re-commencé à "parler".

Exhumée l'an passé, à la suite de huit cents autres squelettes, lors des fouilles archéologiques menées sur le site du Couvent des Jacobins et du futur Palais des congrès de Rennes Métropole, la dame a été étudiée pendant plusieurs mois par des anthropologues toulousains.
Il faut dire que ses restes ont été mis au jour dans un état de conservation exceptionnel. Les premiers enseignements ont été présentés à la presse aujourd'hui au Musée de Bretagne à Rennes.

Placés dans des cercueils de plomb, les ossements ont échappé aux attaques acides des sols granitiques bretons. Au passage, il est plutôt rare que des sarcophages de plomb nous parviennent. En effet, à partir de 1789, les révolutionnaires s'en servaient pour fondre ce qu'ils appelaient les "balles patriotes". Or, le Couvent des Jacobins (le nom sous lequel étaient désignés traditionnellement les Dominicains en France), était à l'époque utilisé par l'armée comme magasin militaire.

Louise de Quengo, témoin du XVIIè siècle

L'examen et l'autopsie de la dépouille de Louise ont été confiés à un laboratoire toulousain, l'Amis "Anthropologie Moléculaire et Imagerie de Synthèse" en collaboration avec le service médico-légal du CHU de Toulouse. C'est d'ailleurs là que se trouvent toujours les restes de la Dame de Brefeillac.

- Rozenn Colleter anthropologue Inrap - Fabrice Dedouit radiologue - médecin légiste CHU de Toulouse - Equipe: K.Veillard, T.Bréhier, P.Nau

Que nous apprennent ces études sans précédent en Bretagne ?

Louise repose auprès du coeur de son mari
 

Elles donnent tout d'abord des précisions quant aux techniques d'inhumation pratiquées au XVIIe siècle, période à laquelle Louise a été enterrée. Ainsi que l'explique Stéphane Deschamps, conservateur régional à la Direction Régionale des Affaires Culturelles de Bretagne (Drac), "Louise a été écoeurée. Cela veut dire que son coeur a été retiré avant l'inhumation puis déposé dans un reliquaire à côté de son mari", Toussaint de Perrien, chevalier de Brefeillac, décédé en 1649 et probablement enterré dans le centre Bretagne. A l'inverse, le coeur de Toussaint de Perrien, repose au côté de sa femme Louise.
L'inhumation en plusieurs lieux de différentes parties du corps puise ses origines dans le Moyen Age. Les funérailles d'illustres personnages comme celles de Bertrand du Guesclin ou d'Anne de Bretagne en témoignent. Au regard de leur position, les époux de Brefeillac appartenaient assurément à l'élite rennaise de l'époque.

Une grande famille bretonne


En effet, le couvent, fondé en 1369 par les Dominicains de Dinan, était particulièrement renommé jusqu'au XVIIème siècle en raison du tableau Notre-Dame de Bonne-Nouvelle, oeuvre de dévotion qui attirait de nombreux pélerins. De nombreux notables bretons se font enterrer sur le site. C'est le cas de Louise de Quengo, qui appartenait à une grande famille de la région.

Louise témoigne de la pratique chirurgicale au Moyen-Age


Après le scanner de l'intégralité du corps, l'autopsie et l'analyse de l'ADN  ont permis de connaître l'état de santé général de la défunte. Louise de Quengo a succombé, vers 60 ans, à une infection pulmonaire probablement la tuberculose. Ces recherches apportent aussi de précieuses informations sur les pratiques médicales de l'époque. Les ligatures observées à l'emplacement du coeur prélevé témoignent d'une réelle maîtrise de la pratique chirurgicale

Des vêtements de religieuse

Enfin, les vêtements de Louise de Quengo nous sont également parvenus dans un état de conservation remarquable. "La défunte était vêtue d'un habit de religieuse: chasuble, cape, robe de bure brune en sergé de laine grossier, chemise en toile, jambières ou chausses en sergé de laine et mules en cuir à semelles en liège.(...) Un suaire recouvrait son visage et deux bonnets et uen coiffe, maintenue par un bandeau, couvraient sa tête." Pour Stéphane Deschamps de la Drac, deux hypothèses peuvent expliquer ce costume. "Il était fréquent, dans les élites laïques, d'être enterrée en habits de religieuse. A moins que Louise n'ait adopté la vie monacale à la fin de sa vie"


Cet ensemble vestimentaire est appelé à être restauré avant d'être exposé au public.
En outre, lorsque les études scientifiques seront terminées, la dépouille de Louise de Quengo sera ré-inhumée probablement au cimetière du Nord à Rennes.

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