Faith Otasowie est agent de soin à l'Ehpad de Dol-de-Bretagne. En France depuis 2011, elle est visée par une OQTF, une obligation de quitter le territoire français. Ses amis et collègues se mobilisent contre cette décision qu'ils jugent inacceptable et injuste.
"Elle ne mérite pas ça. Elle ne mérite pas qu'on l'expulse". Valérie, comme Sylvie et Line présentesce mardi 21 mai à Dol-de-Bretagne, ne décolèrent pas. Pour celles qui sont collègues de travail dans l'Ehpad La Parentèle, l'obligation de quitter le territoire français qui vise Faith Otasowie est incompréhensible.
"Malgré le fait qu'elle n'a pas ses papiers, Faith a tous les autres droits pour rester avec nous", argumente Valérie. "C'est un bon élément. Tout ce qu'elle a fait avant, c'est pour s'en sortir, pour quitter son passé. Elle est dans un métier dans lequel tout se passe bien. Elle s'entend à merveille avec les résidents. Il n'y a jamais de souci avec eux."
Pour Sylvie, cette menace d'expulsion n'est, en plus, pas en accord avec le manque crucial de personnel dans les établissements recevant des personnes âgées : "Les Ehpad cherchent tous les jours des salariés. Or Faith est là depuis plus de 4 ans et à partir du 7 juin, elle pourrait être expulsée de France. Ce n'est pas logique alors qu'elle apporte son sourire et toute sa bonne humeur au quotidien, malgré ses problèmes. Elle est volontaire et ne rechigne pas à venir travailler s'il manque un personnel et même le week-end."
Visée par la loi Darmanin
C'est mi-avril que Faith Otasowie a reçu cette OQTF, "Un torchon de 8 pages qui décrit toutes les raisons pour lesquelles elle est, soi-disant, expulsable et doit retourner dans son pays où elle sera en danger" explique Nathalie Ugen, une amie et principal soutien de la Nigériane.
Cette OQTF, émise par la préfecture, celle-là même qui lui délivre tous les trois mois un récépissé (de demande de carte de séjour) lui permettant de travailler à la Parentèle, Faith la reçue suite à l'application de la loi Darmanin. Cette dernière réclame depuis janvier dernier l'expulsion de tout étranger sans papiers ayant été condamné par la justice.
Victime et coupable d'un réseau de prostitution
Or, Faith a purgé un an de prison il y a quelques années, reconnue coupable et victime d'un réseau de prostitution.
L'histoire de Faith en France commence en 2011, lorsqu'elle fait appel à une passeuse pour quitter le Nigéria, où en danger, elle doit laisser deux enfants. À l'époque, on lui dit qu'en France, elle pourra garder des enfants. La réalité est tout autre puisqu'elle se retrouve prise dans un réseau de prostitution avec une somme de 60 000 euros à rembourser, celle que lui a pris la passeuse pour rejoindre la France.
Elle arrive au bout de nombreux mois à sortir du réseau de prostitution mais doit revenir chez une amie qui en fait encore partie. Ensuite, elle se retrouve à répondre au téléphone aux jeunes femmes qui voulaient venir en France et qui tombent par la suite, malgré elles, dans le réseau. C'est pour cela que Faith sera jugée coupable et victime et qu'elle fera de la prison.
Pour autant, "ce passé qui la poursuit alors qu'elle n'est pas coupable de ce qui lui est arrivé, ne justifie pas cette OQTF qui est une injustice pour une femme qui se bat" estime son amie Nathalie.
"Pourquoi la France veut que je parte ?"
Une injustice que ressent de plein fouet Faith depuis la mi-avril. Elle se dit bien insérée dans la vie, a un fils de 7 ans, né en France, "qui n'est jamais allé en Afrique, qui ne parle que français et qui a toute sa vie et ses amis ici". Elle ne comprend pas ce qui lui arrive alors qu'elle avait un avis favorable de la commission départementale d'attribution de titre de séjour en 2022. Mais un avis soumis cependant à la signature du préfet d'Ille-et-Vilaine.
J'ai peur, je ne dors plus. À partir du 7 juin, je ne pourrais plus vivre, je n'aurais plus le droit d'aller travailler. Alors que j'attendais ma carte de séjour, je reçois cette OQTV. Toute ma vie est désorganisée.
Faith Otasowie,Immigrée nigériane menacée d'expulsion
Une pétition de soutien
En soutien à Faith et à son fils Gabriel, une pétition a été lancée par ses amis et collègues afin que l'OQTF soit abrogée et que Faith soit régularisée. Les soutiens espèrent également recueillir suffisamment de témoignages en sa faveur, afin de les transmettre à la préfecture.
À LIRE AUSSI : On est fous de joie", menacé d'expulsion malgré une intégration réussie, Alhassane va pouvoir rester en France
Un rassemblement de soutien est prévu le 30 mai devant l'école de son fils à Dol-de-Bretagne ainsi que le 12 juin devant l'Ehpad La Parentèle.