La Bretagne est la première région émettrice d'ammoniac dans l'air : 17% des émissions nationales selon les dernières mesures d'AirBreizh. Outre les épandages, l'entreprise Timac Agro de Saint-Malo est pointée du doigt, et ce malgré les efforts effectués. Le point sur la qualité de l'air malouin.
NH3. Une formule que l'on surveille de près dans les mesures de l'air breton. L'ammoniac contribue en effet à la pollution de l'air aux particules fines et favorise les cancers et maladies cardio-vasculaires.
A la demande de l'Agence régionale de santé (ARS) l'association régionale de mesure de la qualité de l'air Airbreizh, a capté les quantités de ce gaz durant six mois, de novembre 2020 à mai 2021. Le résultat est clair : l'agriculture est responsable en Bretagne de 99% de ces émissions, mais du côté de Saint-Malo, une autre origine est pointée du doigt : l'usine de production d'engrais de Timac-Agro.
Quinze fois au-dessus des seuils
Cette dernière avait émis 46 tonnes d'ammoniac en 2019. "Surveillée depuis 2017, l'entreprise a émis jusqu'en avril 2020 des doses dépassant jusqu'à quinze fois les seuils autorisés" écrivait Caroline Trouillet dans son enquête pour Splann !
"Ici, la limite c'est 50. Et jusqu'à fin 2019, ça monte jusqu'à 12-15 fois les valeurs limites !" complète Rozenn Perrot, administratrice Eaux et Rivières à Saint-Malo, relevés à l'appui.
Depuis Timac Agro a été mise en demeure d'installer des capteurs et de corriger ses pratiques. Des travaux ont été réalisés. "Deux millions d'euros ont été investis sur une des usines de granulation en zone industrielle au sud de Saint-Malo afin d'abattre l'ammoniac pour qu'il ne soit pas rejeté en cheminée, explique aujourd'hui Alexandre Denis, le directeur usine du quai intérieur à Timac Agro Saint-Malo.
Et de fait, les résultats de la dernière campagne de mesure d'Airbreizh, parue la semaine dernière, indique que la moyenne conctatée sur le capteur de la zone industrielle (où se situe l'usine de production de Timac-Agro), est de 10,4 µg/m3, avec un pic maximal à 34,1 µg/m3. Donc sous le seuil maximal fixé par la Prefecture à Timac-Agro.
Pour un suivi partout et en continu
Et une commission de suivi a aussi été montée : l'entreprise, l'Etat et les associations vérifient régulièrement les données. Aujourd'hui la situation s'est améliorée, mais Rozenn Perrot nauance : "Pour que la préfecture rédige de nouveaux arrêtés, pour permettre à l'entreprise de sortir de ces mises en demeure, il fallait de toutes façons atteindre des résultats !"
Malgré ces efforts, les taux restent élevés dans l'ensemble de la cité corsaire. Dans la zone industrielle de Saint-Malo, la quantité d'ammoniac dans l'air est beaucoup plus importante qu'ailleurs : trois fois plus qu'à Rennes par exemple. Et le taux de mortalité par cancer précoce est 11% supérieur au reste de la région.
Eaux et rivières demande donc que la qualité de l'air malouin soit suivi partout et en continu. Les associations d'habitants réclament des mesures plus larges et tout au long de l'année, pour une meilleure qualité de l'air, même en bord de mer.
Seule une préconisation de l'OMS
Pour l'instant, il n'existe en France, aucun objectif, aucune obligation de réduction réglementaire concernant les quantitiés d'ammoniac dans l'air.
"Seul l'OMS (Organisation Mondiale de la Santé) a émis il y a peu un objectif de qualité sur les particules fines : objectif de diamètre inférieur à 2,5 à 5 microgrammes par mètre cube, précise Alain Laplanche, président d'Air Breizh. Aujourd'hui il n'y a à ma connaissance aucune ville importante française en-dessous de ce seuil. Pour information, Rennes est à 8,9 microgrammes par mètre cube, et Brest 6,9 !"
Il a donc encore des efforts à faire pour réduire les émissions d'ammoniac dans l'air.