Le gouvernement a dévoilé mardi matin un nouveau plan d'aide à l'agriculture, pour aider en particulier les céréaliers dont les récoltes ont été décimées par les intempéries du printemps, et les éleveurs toujours englués dans la crise.
Principale mesure annoncée par le Premier ministre Manuel Valls après une réunion à Matignon avec les organisations agricoles et les principales banques du secteur: l'Etat va garantir la moitié des prêts des agriculteurs en difficulté, afin de leur permettre d'emprunter auprès de leurs banques aux mêmes taux que s'ils étaient en bonne santé financière.
Face à une récolte céréalière en chute de près de 30% après les intempéries catastrophiques du printemps, qui vient s'ajouter à une crise persistante de l'élevage et du secteur laitier, l'exécutif avait promis un plan de soutien dès la fin juillet. Notamment en matière de refinancement bancaire, alors que de nombreux agriculteurs sont étranglés de dettes.
Plus d'aides à la reconversion
Le gouvernement va également augmenter l'enveloppe attribuée aux aides à la reconversion professionnelle des agriculteurs et mettre en place avec la Sécurité sociale agricole (MSA) des possibilités de remplacement gratuit pour les exploitants victimes d'épuisement professionnel ("burn out"), mais aussi davantage de retraites anticipées, a précisé le ministre de l'Agriculture Stéphane Le Foll lors d'une conférence de presse avec le Premier ministre.L'année blanche prolongée de deux mois
Autres mesures financières: l'"année blanche", c'est-à-dire le report de remboursement de prêts, va être prolongée de deux mois jusqu'à fin décembre. Et les céréaliers touchés par les inondations pourront bénéficier d'un dégrèvement supplémentaire, sur les prairies, de leur taxe foncière. "Il fallait ces mesures fortes pour répondre à la situation d'urgence créée par la conjugaison d'accidents climatiques et de crise de marché. Pour éviter des dépôts de bilan massifs et permettre aux exploitants agricoles de passer ce cap difficile", a jugé Manuel Valls.Entre 50 000 et 80 000 exploitants devraient bénéficier de la garantie publique, selon le gouvernement. Pour les agriculteurs qui peuvent justifier d'une baisse de 20% de leur excédent brut d'exploitation (chiffre d'affaires moins les charges ayant servi à la production de ce chiffre d'affaires) le coût de la garantie sera même pris en charge par l'Etat. Cette mesure est demandée depuis plusieurs mois par le premier syndicat agricole, la FNSEA, pour permettre aux agriculteurs de souscrire à de nouveaux emprunts ou de renégocier à la baisse leurs précédentes dettes.
Prise de conscience "importante"
Concrètement, l'Etat va abonder un fonds de garantie, via la banque publique bpifrance, à hauteur de 50 à 100 millions d'euros. Ces fonds doivent à leur tour permettre aux banques privées (Crédit Agricole, Crédit Mutuel et BPCE, les trois poids lourds du secteur agricole) de prêter 1,5 milliard d'euros. Les prêts devront être demandés avant le 31 décembre. Objectif: "que les taux d'intérêt soient les plus bas quelle que soit la situation de l'agriculteur", selon Stéphane Le Foll. En cas de non-remboursement, l'autre moitié des pertes restera à la charge des banques privées, afin d'éviter des effets d'aubaine.Le patron de la FNSEA, Xavier Beulin, a estimé "important" que le gouvernement prenne acte de la situation de crise, tout en demandant une clause de revoyure du dispositif dès la fin novembre. "J'espère que cela permettra des taux très faibles, inférieurs à 1%". Il a en revanche assuré que les mesures sociales n'étaient pas "suffisantes".
Les récoltes céréalières de 2016 ont été désastreuses, avec le rendement le plus bas depuis une trentaine d'années et une France qui va perdre son rang de premier exportateur européen de blé. La situation est aggravée par la faiblesse des cours mondiaux due aux récoltes records des autres grands pays producteurs: Russie, Ukraine et Etats-Unis. Les céréaliers étaient jusque-là plutôt épargnés par la grave crise qui frappe les éleveurs porcins et bovins et les producteurs de lait depuis 2014.
Le gouvernement avait adopté un premier plan de soutien à l'élevage français en juillet 2015, renforcé en septembre puis en janvier, qui comprenait des mesures pour un montant de 700 millions d'euros, auxquels se sont ajoutés 63 millions venant de l'Union européenne.