C’est un projet un peu fou qui anime depuis 3 ans les habitants des 15 îles du Ponant. Grâce au travail d’une artiste-chercheuse et des artisans des îles, un verre a été conçu en utilisant les déchets et les ressources inexploitées de ces territoires. L’objectif est de créer une nouvelle filière du verre.
A pied ou en vélo, par tous les temps et toutes les saisons, Lucile Viaud et Clémence Berryer ont parcouru les îles du Ponant à la recherche de matériaux inutilisés, de déchets issus des entreprises insulaires.
Au terme de leur quête, elles ont cartographié une cinquantaine de matières inutilisées sur les îles. Cela peut être des coquilles de moules, du tartre de vin, des crottes de lapins, ou encore les résidus des microalgues cultivées sur Houat.
Ces déchets issus de l’activité des entreprises ou des artisans, Lucile Viaud les appelle les "coproduits" et cherche à les valoriser dans sa géoverrerie. Une démarche écoresponsable qui vise à utiliser les ressources d’un territoire pour créer un verre recyclable à l’infini et à l’identité propre. Un projet qu’elle a déjà expérimenté dans d’autres régions de France.
"Pour moi le matériau verre c’est un outil de médiation. C’est un matériau qui permet de raconter un territoire, de faire du lien entre les gens, de préserver la mémoire d’un lieu, donc c’est un prétexte pour aborder la question de l’insularité, la question de l’identité des îles du Ponant."
Cette initiative fait aussi l'objet d'un film réalisé par Gaëlle Royer / La Bordée.
Des cendres de fumaison de poissons pour faire du verre
Trois matières ont été choisies cette année pour composer ce verre insulaire. La chaux des filtres d’un scaphandrier de l’île d’Ouessant, le sable des travaux de logements sociaux sur l’île d’Hoëdic et les cendres de fumaisons de poissons.
Ces trouvailles permettre de créer un verre unique à la couleur "caramel au beurre-salé" comme le décrit Lucile Viaud : "par exemple, les cendres de fumaison de poisson c’est ce qu’on appelle un "fondant" dans le monde du verre, une matière indispensable qui permet la vitrification, et ce sont ces cendres qui ont apporté cette couleur particulière au verre des îles du Ponant."
Une teinte dans la masse qui s’est révélée en janvier dernier lors d’un rassemblement des trois verriers des îles pour faire naître ce nouveau matériau. Par la suite, les artisans pourront utiliser les autres coproduits pour créer des émaux ou un nouveau millésime de verre d’une toute autre teinte.
Créer des emplois sur les îles
L’objectif de ce projet est de faire sortir de terre une nouvelle filière du verre, propre aux îles du Ponant. Un verre qui permettra de créer des objets dans une perspective de tourisme durable.
Une initiative en collaboration avec l’association "Savoir-faire des îles du Ponant" qui regroupe 80 entreprises installées dans les quinze îles habitées du littoral atlantique: Chausey, Bréhat, île de Batz, Ouessant, Molène, Sein, Les Glénan, Groix, Belle-île-en-Mer, Houat, Hoedic, île-aux-Moines, île d’Arz, île d’Yeu et île d’Aix.
Un territoire de 16 000 habitants, et que plus de 3,5 millions de personnes viennent visiter chaque année, avec donc des enjeux touristiques majeurs. Plutôt que de revenir avec un souvenir fabriqué à l’autre bout du monde, les personnes de passage pourront acheter un objet propre aux îles du Ponant, créé sur place de A à Z, comme l’explique Aude Gaillard de l’association "Savoir-faire des îles du Ponant" : "C’est une démarche vertueuse qui met en valeur l’artisanat local, qui permet de préserver les ressources des îles et qui crée de l’emploi."
Quelques pièces sont déjà sorties du four, mais pour lancer une véritable production et faire naître cette filière, l’association a besoin de 15 000 euros avant le 12 juillet date de clôture du financement participatif.
L’exposition "Terre insulaire" est par ailleurs visible à l’Ecloserie de Houat tout cet été. Elle retrace les trois années de recherche pour créer ce verre des îles du Ponant.