Le musée de la carte postale de Baud (Morbihan) invite l'artiste belge Un Faux graphiste à détourner les cartes postales de ces collections. Bercés de stéréotypes sur les Bretons, l'artiste belge tire un portrait absurde de la Bretagne d'hier et d'aujourd'hui dans l'exposition temporaire annuelle du musée, à voir jusqu'au 30 décembre.
De bien drôles de cartes postales ont pris place sur les murs du Carton voyageur, le musée de Baud (Morbihan). L'austérité des clichés en noir et blanc des années 1900 tranche avec les légendes comiques, souvent absurdes : "Penmarc'h : ces rodéos urbains qui terrorisent la population" ou encore "Le guetteur d'épave de jet-skis". Ces photographies ont été détournées par Un Faux graphiste, artiste belge connu pour ses montages photo et invité par l'exposition annuelle du musée de la carte postale.
"Ce sont des cartes traditionnelles dont il change les légendes, ça crée une blague singulière, décrit Julien Bardeille, directeur du Carton voyageur. Ça traite de sujets d'actualités, comme le mal-logement, la production porcine en Bretagne, et le traitement de l'image du Breton dans les années 1900."
L'anachronisme il était voulu par l'artiste. (...) Traiter des sujets actuels avec des visuels de l'époque, ça me semble important pour que le grand public ait un autre regard sur l'actualité.
Julien Bardeilledirecteur du Musée de la carte postale de Baud
Vieilles cartes, débat actuel
Au long de l'exposition, le visiteur tombe sur une corniche devenue parking, un calvaire transformé en antenne 5G ou encore une ronde de Bretons en costume traditionnel autour d'un radar routier.
"C'est sûr que sur Carnac ou Quiberon, c'est bétonné comme pas permis, il y a plus rien par rapport à Sarzeau qui est resté un peu plus sauvage. C'est vrai que la Bretagne sud s'est très betonné par rapport à la Bretagne Nord. Ce genre d'expo, ça peut faire réflechir à tout ça," concède Pierre, un visiteur.
"Je connaissais déjà son travail [celui d'Un Faux graphiste] via les réseaux sociaux. Et on reconnaît le bonhomme, c'est très sympa, plutôt drôle, glisse un autre visiteur, accompagné de sa fille. Ça me fait plutôt rire, c'est déjà un peu ce qu'il faisait lorsqu'il détournait Tintin avant qu'il ait des problèmes avec les ayants-droits d'Hergé. Il parle de trucs très actuels, j'ignore s'il y a un message derrière, ça relève plus de l'absurde. Et je suis carrément client."
Chapeau ronds, alcoolisme et bigouden
"La carte postale était produite essentiellement par des photographes qui se déplaçaient sur des évènements, des faits divers, puis allait chez un éditeur qui fabriquait les cartes spontanément, raconte Julien Bardeille. L'information, elle, etait traitée dans les médias officiels dix ou quinze jours après."
On peut se poser la question de la véracité de ces informations et aussi l'entretien des stéréotypes sur la population bretonne : on a des cartes montrant des alcooliques, des mendiants. (...) L'idée c'est de faire un parallèle avec l'actualité autour du traitement de l'information actuelle.
Julien Bardeilledirecteur du Musée de la carte postale de Baud
À la Belle époque, Paris persistait à mener "une politique d'annihilation des cultures locales et régionales, au profit de la grande culture de la nation française et du développement économique", soutient Julien Bardeille. Il y avait des préjugés très forts à l'encontre de la population bretonne, qui était surtout tournée vers la terre et la mer. Et donc considérés comme des gens de basse classe, peu cultivés. (...) On entretenait pas mal de stéréotypes et l'idée c'est d'en jouer pour faire de nouvelles blagues."
L'exposition temporaire du Musée de la carte postale s'est ouverte le 1er février, et regroupe les cartes postales détournées d'Un Faux graphiste, des cartes réalisées par une intelligence artificielle et les poteries de Manon Moy, céramiste à Lorient. Le vernissage aura lieu ce jeudi 22 février.
►Exposition "Bons baisers de Bretagne" au Carton voyageur-Musée de la carte postale au 3, rue Jean-Moulin à Baud (Morbihan). Tarifs : gratuit, 4 et 5 euros. Jusqu'au 30 décembre 2014.