Pédocriminalité dans l'Eglise. Le secret de la confession "peut être brisé dans des situations précises"

Alors que le rapport Sauvé fait état de plus de 300 000 victimes d'agressions sexuelles par des prêtres en France, la question du secret de la confession agite l'Eglise. En Bretagne, Jean-Eudes Fresneau, prêtre du diocèse de Vannes estime que ce secret doit être brisé pour protéger les enfants.

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Le secret de la confession est-il "plus fort que les lois de la République"? C'est en tout cas ce qu'affirme Monseigneur Eric de Moulins-Beaufort, le président de la Conférence des évêques de France. Dans un entretien accordé à Franceinfo, il explique que ce secret "ouvre un espace de parole libre qui se fait devant Dieu". 

Ces déclarations provoquent un débat, alors que le rapport Sauvé vient d'être publié. Les conclusions évoquent des agressions sexuelles au sein de l'Eglise, qui concerneraient plus de 300 000 personnes. Les victimes dénoncent un silence autour de comportements qui ont toujours existé.  

On ne peut pas divulguer ce qui nous a été confié 

Père Hebert

En Bretagne, la question du secret de la confession divise. Nos confrères du journal Le Monde rappellent ce que la loi contient à ce sujet. 

Ce dimanche, avant la messe à Rennes, les fidèles semblent tenir à ce principe. "On ne peut pas trahir le secret de la confession sinon il n'y a plus de confiance. Par contre, il peut peut-être s'instaurer un dialogue entre le prêtre et la personne qui vient se confesser. Le prêtre doit jouer un rôle à ce moment-là. Ils sont formés pour ça", estime Marie-Claude.

De son côté, Michelle pense que le secret peut être rompu. "Si quelque chose de très grave arrive, il faut le dire, il faut que ce soit dénoncé"

Pour le père Philippe Hebert, les propos de Monseigneur de Moulins-Beaufort insistent sur le fait que "le secret de confession est absolu dans l'Eglise, que personne, ni un prêtre ni un évêque ne peut décider de lui-même de le lever. C'est ce qu'il y a de plus intime dans la relation entre une personne et Dieu, une personne qui vient ouvrir son coeur devant le Seigneur et demander pardon pour ses pêchés." Il ajoute : "En aucun cas, le prêtre ne peut s'accorder la liberté d'aller révéler ce qui s'est dit dans la confession". 

Lui n'a jamais reçu de "confessions aussi graves". "Ce qui est certain, c'est que dans certains cas, quand la personne n'est pas disposée à assumer les conséquences de ses actes auprès de la justice, nous on est en droit en tant que prêtre de ne pas donner l'absolution". 

Un sacrement de pénitence qui doit évoluer 

Le père Jean-Eudes Fresneau travaille pour le diocèse du Morbihan, à Sarzeau. Cette question du secret de la confession, il en débat depuis 2017.

En 2019, il témoignait auprès du journal La Croix et évoquait cette crise (des abus sexuels) qui ronge l'Eglise. "Cette crise renforce la déchristianisation déjà à l’œuvre", admettait-il, gravement. "Lorsque nous évangélisons, nous sommes sans arrêt renvoyés à cela, avec raison."

Dans un tweet récent et après les paroles de Monseigneur de Moulins-Beaufort, il a réaffirmé une position. "Je suis prêtre catholique, je donnerai ma vie pour sauvegarder le secret de la confession mais je briserai le secret de la confession si c'est pour sauver la vie d'un enfant. Les sacrements sont au service de la vie et non de la mort". 

Joint par téléphone, il développe : "Cette question du secret absolu mérite une réflexion et pas simplement des décisions théologiques quasiment dogmatiques alors que ce n’est pas un dogme. C'est là où je diverge avec Monseigneur de Moulins-Beaufort". 

Il souligne : "L’Eglise catholique doit revoir sa copie et réfléchir aux enjeux que cela implique." Lorsqu'on l'interroge sur la rupture de confiance mise en avant, il rétorque. "Au contraire, plus on fera du sacrement de pénitence un endroit non seulement religieux mais aussi rationnel, plus on retrouvera de la confiance dans le sacrement, il faut remettre les choses à plat, remettre ce sacrement sur ses bons pieds".

Le secret n’est qu’un moyen pour servir la vie, si je dois sauver la vie d’un enfant en brisant le secret de la confession, je le fais. C’est une évidence humaine et chrétienne

Jean-Eudes Fresneau

Au-delà d'une réforme au sein de l'Eglise et selon Jean-Eudes Fresneau, les prêtres doivent aussi être davantage formés sur le plan juridique et civil, pour savoir comment réagir. Et si la situation le nécessite entraîner un signalement auprès de la justice.

Si la discipline de l’Eglise doit changer, cela sera quelque chose de très fort. Cela fait des siècles et des siècles qu’on pense la même chose. La réalité vient remettre en cause cette discipline. Ce n’est pas rien de changer des mentalités.

Jean-Eudes Fresneau

La remise en cause du secret absolu de la confession n'est pour lui qu'un des éléments qui permettra aux victimes "de se relever". L'Eglise doit penser "à la réparation y compris financière de ce qui a été vécu". Tout cela passera par une réforme des droits canoniques, pour rétablir les droits des victimes. 

 

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