La cour administrative d'appel de Nantes a rejeté le recours du ministère des Armées, qui voulait faire geler en urgence un jugement rendu en sa défaveur par le tribunal administratif de Rennes. Le ministère réclamait le remboursement sans délai des 22 682 euros de frais de scolarité que doit un ancien élève officier de Saint-Cyr Coëtquidan, devenu enseignant.
Admis en juillet 2014 à Saint-Cyr Coëtquidan, un ancien sous-lieutenant s'était vu réclamer le remboursement de 22.682 € de frais de scolarité : il avait exercé seulement cinq mois et sept jours au service de l'Etat en qualité d'officier de carrière, alors qu'en théorie il doit s'engager pour 6 ans minimum.
Le prévenu - qui s'était initialement engagé pour six ans minimum - avait en effet préféré passer le CAPES (Certificat d'aptitude au professorat de l'enseignement du second degré) en lettres modernes et devenir enseignant. Nommé en septembre 2017 comme professeur certifié, il avait passé avec succès son année de stage et avait été titularisé en 2018.
Or, un décret du 12 septembre 2008 précise que lors de leur admission en école, les élèves officiers de carrière s'engagent à servir "en cette qualité" entre six et huit ans. Même si le même décret prévoit qu'"au cours de cette période, la démission (...) ne peut être acceptée que pour des motifs exceptionnels."
Un remboursement qui devait être "différé" dans le temps
Les officiers ne satisfaisant pas à l'engagement prévu sont alors "tenus au remboursement des frais de formation". "L'action en remboursement des frais de formation est différée pour les officiers de carrière qui occupent un emploi permanent dans la fonction publique", précise le texte. "La dispense de remboursement (...) est définitivement acquise lorsque les intéressés justifient avoir accompli (...) des services de la durée nécessaire pour parfaire celle de l'engagement."
Sur cette base, le tribunal administratif de Rennes avait donné raison à l'ancien élève officier de Saint-Cyr, dans un jugement rendu le 18 janvier 2023. Il occupait un emploi permanent dans la fonction publique, estimaient les juges, et le requérant pouvait demander un remboursement différé.
Le ministère des Armées avait alors introduit le 29 mars 2023 une requête de sursis à exécution de ce jugement, afin de geler son exécution jusqu'au réexamen de l'affaire sur le fond.
Un risque de perte définitive des deniers publics
"Lorsqu'il est fait appel d'un jugement (...), la juridiction peut (...) ordonner qu'il soit sursis à l'exécution de ce jugement si les moyens (...) paraissent, en l'état de l'instruction, sérieux et de nature à justifier, outre l'annulation ou la réformation du jugement, le rejet des conclusions à d'annulation", explique la cour administrative d'appel de Nantes de façon générale.
Il faut aussi que l'appelant prouve que l'exécution de ce jugement de première instance "risque de l'exposer à la perte définitive d'une somme qui ne devrait pas rester à sa charge" dans l'hypothèse où il obtiendrait gain de cause en appel.
Mais, en l'occurrence, dans ce dossier-là, l'argument présenté par le ministère des Armées "ne paraît pas de nature à justifier (...) le rejet des conclusions à fin d'annulation accueillies par ce jugement" du tribunal administratif de Rennes, tranche le juge dans une ordonnance en date du 5 mai 2023 qui vient d'être rendue publique.
La cour administrative d'appel de Nantes se repenchera sur le dossier, cette fois-ci par le biais d'une formation collégiale de trois juges, d'ici quelques mois.
SG/IG (PressPepper)