La cour d'appel de Rennes a confirmé, ce mercredi 11 septembre 2024, la confiscation des biens qui avaient été saisis à un ambulancier de Malestroit (Morbihan) qui avait escroqué les organismes sociaux de plus de 200.000 €.
Le prévenu avait été dénoncé en décembre 2016 par la Caisse primaire d'Assurance maladie (CPAM) du Morbihan : l'organisme avait lui-même été alerté par le Centre hospitalier universitaire (CHU) de Rennes et l'Agence régionale de santé (ARS) de Bretagne.
Les fraudes de l'ambulancier
Plusieurs organismes sociaux s'étaient en fait aperçus que cet ambulancier réclamait, par exemple, le paiement de "factures" déjà remboursées à son autre structure, qu'il facturait aussi les "mêmes trajets à plusieurs établissements de santé", et parfois même avec des véhicules qui n'avaient "pas fait le transport". L'ambulancier avait encore immatriculé des véhicules "non agréés par l'ARS" ni "déclarés à la CPAM" ; il avait enfin employé des conducteurs non déclarés et lui-même exercé sans "carte professionnelle valide".
Le préjudice et la condamnation initiale
Au total, la CPAM avait chiffré son préjudice à 152 000 €, la Mutualité sociale agricole (MSA) à 44 000 € et la Sécurité sociale des indépendants (SSI) à 13 000 €, pour un montant total de 208 500 €, entre 2013 et 2017. En première instance, le prévenu, aujourd'hui âgé de 62 ans, avait été relaxé pour certains délits mais avait toutefois été reconnu coupable pour "escroquerie", "déclaration fausse ou incomplète pour obtenir une prestation indue (...)" et "exécution d'un travail dissimulé". Il avait écopé de six mois de prison avec sursis.
Surtout, le tribunal judiciaire de Vannes avait ordonné la confiscation d'un appartement de 28 m² situé à Chevreuse (Yvelines) d'une valeur de 118 000 €, et de trois assurances-vie pour un montant total de 26 500 €. Au total, son patrimoine immobilier avait été estimé à 672 000 €, sans compter les 320 000 € appartenant à une société civile immobilière (SCI).
Une personnalité particulièrement cynique
L'ambulancier avait donc fait appel : il espérait obtenir l'annulation de ces confiscations immobilières. Il ne s'était toutefois pas présenté à l'audience du 3 juillet 2024, contrairement à sa femme qui avait saisi un avocat : mariée sous le régime de la communauté, son épouse se retrouve elle aussi privée des biens acquis en commun avec son mari.
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La défense de l'épouse
Son avocat avait donc plaidé à l'audience qu'elle était "une propriétaire de bonne foi" : cette confiscation entraînait "une atteinte disproportionnée" au droit de propriété de cette "cadre infirmière". Elle souhaitait donc pouvoir récupérer l'appartement de Chevreuse dans la mesure où elle était "ignorante" de leur situation.
L'étendue du patrimoine du couple
Mais "l'enquête a établi que son épouse était gérante de la SCI (...) détenant notamment deux logements dans une maison d'habitation (...) à Malestroit", constatent les juges rennais dans leur arrêt en date du 11 septembre 2024. Le couple possède aussi une maison à Missiriac (Morbihan) estimée à 420 000 € et "huit lots d'immeuble dont un parking à Eaux-Bonnes (Pyrénées-Atlantiques)". Au total, leur patrimoine commun a donc été chiffré à 672 000 €.
La décision de la cour d'appel
"Au regard de la nature des faits reprochés à le prévenu, de la multitude des infractions commises par [son mari] qui démontrent une personnalité particulièrement cynique, sans aucun scrupule, (...) au détriment de la collectivité dans le seul souci d'un enrichissement personnel alimentant un train de vie confortable, de la durée particulièrement longue des faits dans le temps", soit "plus de trois années", et des "préjudices considérables ainsi causés aux victimes", la peine de confiscation "s'impose", concluent les juges rennais.
Le principal concerné n'avait "pas même cru devoir se présenter devant la cour pour présenter ses arguments et actualiser sa situation personnelle", remarquent-ils. S'agissant de son épouse, "le bien immobilier situé à Chevreuse ne constitue qu'une part infime du patrimoine des époux" et elle "n'y réside pas" ; elle "bénéficie en revanche toujours de l'usage de la maison (...) familiale située à Missiriac". Il n'existe donc pas de "caractère disproportionné de l'atteinte portée à son droit de propriété", en déduit la cour d'appel de Rennes.
SG/CB (PressPepper)