Le 6 juillet le MEDEF élira son nouveau président. Deux candidats briguent la succession de Geoffroy Roux de Bézieux. Patrick Martin, l’actuel président délégué du syndicat de patrons, et Dominique Carlac’h, la vice-présidente de l’organisation. Peu connue du grand public, la Bretonne, ancienne championne de France du 400 mètres, compte bien faire entendre sa voix.
Ce jour de juin, en descendant du train en gare de Rennes, Dominique Carlac’h prend une grande bouffée d’air. Chacun sa madeleine. "Quand j’étais lycéenne, le samedi midi, je venais prendre le car, tout près d’ici, à la gare routière pour rentrer à Josselin. La gare, c’était le signal du retour à la maison", confie-t-elle en souriant.
La candidate à la présidence du Medef raconte volontiers son enfance à la ferme dans son Centre Bretagne. A 8 ans, elle conduit le tracteur de la ferme. Son grand-père éleve des pintades et des moutons. "Il disait, tout le monde fait des vaches et des poulets, cultivons notre différence", explique celle qui a bien retenu la leçon.
Des ailes aux pieds
La mère de Dominique Carlac’h est enseignante, son père, professeur de sports, travaille aussi sur l’exploitation familiale. Quand il va encadrer les activités sportives le mercredi après-midi, Dominique l’accompagne. Un jour, une des relayeuses est absente. Il décide d’aligner sa fille sur la course. Elle est en CM1, les autres sont élèves de 5ème. "J’étais la dernière équipière du relais, se souvient Dominique Carlac’h, quand j’ai pris le bâton, j’étais loin mais petit à petit, j’ai commencé à rattraper toutes les filles qui couraient devant moi et on a gagné. Alors mon père s’est dit qu’il y avait sans doute quelque chose à faire."
Dominique Carlac’h avait déjà pris l’habitude de battre les garçons dans les courses de l’école. Elle court, de plus en plus et de plus en plus vite. Après le collège, elle est inscrite en sport-étude à Rennes et très vite, elle intègre l’équipe de France.
Son entraineur lui répète régulièrement : "Fais ta course, ne regarde ni devant, ni derrière." Ce sera une des autres leçons qui est restée gravée.
A 15 ans, elle gagne le championnat de France du 400 mètres. Un an plus tard, elle termine 5ème au championnat du monde. Elle court avec une certaine Marie-José Perec qui deviendra bientôt triple championne olympique.
Dominique Carlac’h sent qu’elle n’est pas à la hauteur de l’athlète, elle s’éloigne doucement des pistes pour se consacrer à ses études. Hypokhâgne puis Sciences po.
Mais les pieds sur terre
"Le système éducatif breton marche très très bien, affirme-t-elle. On a beaucoup de réussite scolaire et je suis fière de l’enseignement que j’ai reçu ici."
A 24 ans, elle crée son entreprise de conseils spécialisée dans la stratégie et le financement de l’innovation, D&Consultants "ce n’était pas du tout dans l’agenda familial", lâche-t-elle en souriant. "Mais les Bretons sont très entrepreneurs". Elle installe ses bureaux à Montparnasse, "tout près de la voie Une qui me ramène à la maison."
En 2018, elle se lance dans une autre course, celle de la présidence du MEDEF. Le syndicat patronal a déjà été dirigé par une femme, Laurence Parisot entre 2005 et 2013. Cette fois, Dominique Carlac’h ne l’emporte pas, mais Geoffroy Roux de Bézieux fait d’elle sa vice-présidente.
Cette année, elle repart en campagne. "Fière de représenter les entreprises de France"." L’entreprise, c’est bien, un chef d’entreprise, ça apporte beaucoup de choses à la société", répète-t-elle. Elle entend renouer avec la croissance, allier performance et écologie et milite pour que les voix des patrons soient entendues.
"Il faut que l’on s’organise pour qu’il y ait des remontées du terrain en continu plaide-t-elle. J’ai envie que les patrons du Morbihan, des Côtes d’Armor, du Finistère ou d’Ille-et-Vilaine puissent se dire qu’ils sont entendus. Souvent, le Medef prend la température du terrain quand il vient faire une visite. Mais ce n’est pas à coup de visite qu’on peut prendre le pouls. Il faudrait que toutes les semaines, on ait une dizaine d’entreprises sur tel ou tel dossier. On serait alors un peu plus pertinents quand on va discuter avec le gouvernement. On pourrait dire, j’ai discuté avec une entreprise agroalimentaire du Finistère… c’est toujours plus percutant que de dire, voilà ce que l’on pense."
L’élection à la présidence du Medef aura lieu le 6 juillet. Dominique Carlac’h ne part pas en tête, mais elle a déjà prouvé qu’elle pouvait l’emporter contre tous les pronostics.