Le rapporteur public a préconisé, lors d'une audience au tribunal administratif de Rennes, ce vendredi 3 mars 2023, d'annuler le permis de construire accordé par le maire de Larmor-Baden au groupe Giboire. Ce dernier envisage de construire un complexe hôtelier de luxe sur l'île Berder.
Le permis de construire accordé au groupe Giboire pour son projet d'hôtel de luxe sur l'île Berder avait déjà été suspendu par le tribunal administratif de Rennes le 12 avril 2022. Ce complexe hôtelier, de plus de 8.000 m2, est censé abriter 90 chambres avec piscine et spa.
Le projet avait pourtant officiellement été "abandonné" en juillet 2021, comme l'avait annoncé Michel Giboire au lendemain de l'annulation partielle du Plan local d'urbanisme (PLU) de la commune de Larmor-Baden par le tribunal administratif de Rennes. Mais cette annulation n'est pas définitive à ce jour : un pourvoi a été déposé devant le Conseil d'Etat.
En dépit de leur victoire en référé, la Fédération d'associations de protection de l'environnement du Morbihan, Les Amis des chemins de ronde du Morbihan, l'association Qualité de vie à Larmor-Baden et Les Amis du Golfe du Morbihan (AGM) restent donc sur leurs gardes et ont maintenu leur recours au fond contre le permis de construire.
"Une surface de plancher qui augmenterait de 45 %"
Ce vendredi 3 mars 2023, le rapporteur public a estimé qu'il était "indéniable" qu'il n'existait "aucun village ou secteur urbanisé" sur l'île mais seulement "quelques constructions dans la partie centrale".
Dans la mesure où "la surface de plancher va augmenter de 45 % sans parler de l'aire de stationnement de 80 à 100 places", le projet va donc engendrer, selon lui, "un très important changement de dimension". "Il ne peut pas être regardé comme un simple agrandissement mais bien comme une extension de l'urbanisation, dans un secteur particulièrement peu urbanisé" a-t-il expliqué lors devant le tribunal administratif de Rennes.
"Nous vous invitons à adopter la même position protectrice des espaces remarquables que la cour administrative d'appel de Nantes" a demandé le rapporteur public aux trois juges : il a préconisé "l'annulation totale du permis de construire", puisqu'il ne lui "paraît pas régularisable sans apporter un bouleversement tel qu'il changerait la nature même du projet".
Me Thomas Dubreuil, l'avocat de deux associations requérantes, a pour sa part relevé que la "proportion" de chaque construction était "très loin d'une enveloppe mesurée" : les extensions sont, pour chaque bâtiment, "systématiquement supérieures au bâtiment existant sur lesquelles elles viennent s'adosser". De plus, a-t-il fait remarquer, "sur le plan architectural, on est très loin de la qualification d'intégration architecturale".
"Valoriser l'existant" selon le groupe Giboire
"Dans l'imaginaire collectif, c'est une île reliée par un bois au continent, avec des boisements importants et une tour mauresque du XIXe siècle" a encore rappelé l'avocat spécialiste en droit de l'environnement, Cet espace qui doit rester cohérent".
L'avocate de la commune de Larmor-Baden a pourtant certifié que le permis de construire litigieux "ne vise pas à étendre l'urbanisation" sur l'île Berder : les constructions viendront simplement, selon elle, "s'adosser à un bâti existant".
"La thèse selon laquelle l'espace remarquable doit s'imposer à la partie bâtie de l'île n'est pas une évidence, a-t-elle insisté. Les deux rapporteurs publics qui se sont prononcés au tribunal administratif et à la cour administrative d'appel ont fait part de leurs hésitations sur le fait que "la partie bâtie" fasse "partie des espaces remarquables du site".
Me Marie-Bénédicte Lusteau, l'avocate du groupe Giboire, a elle présenté ce projet de "rénovation" et de "réinvestissement des bâtiments présents" comme "une manière de valoriser l'existant". "Il ne s'agit pas de transformer les lieux de manière radicale" a-t-elle indiqué. Selon elle, l'extension sera de "moins de 30 % et l'emprise des extensions n'impacte pas d'espace boisé".
Le tribunal administratif de Rennes, qui a mis sa décision en délibéré, devrait rendre son jugement dans deux semaines environ.
Si le permis de construire venait à être déclaré illégal, et que ce jugement était confirmé ensuite par la cour administrative d'appel de Nantes ainsi que le Conseil d'Etat, alors le groupe Giboire serait en droit d'introduire une nouvelle requête contre la commune de Larmor-Baden pour être indemnisé de ses divers préjudices.
(Avec CB/PressPepper)