En moins de deux semaines, quatre seniors sont morts par noyade sur les côtes bretonnes. Face à ces drames, le capitaine de frégate et porte-parole du Préfet maritime de l'Atlantique Céline Tuccelli rappelle que la baignade en Bretagne est loin d'être une activité anodine et donne ses conseils aux baigneurs.
Le 16 juillet dernier, à Larmor Plage dans le Morbihan, un homme de 85 ans parti nager est retrouvé inconscient par un groupe de baigneurs. Réanimé par les pompiers, l'octogénaire est finalement décédé à l'hôpital de Lorient.
Le lendemain des kayakistes retrouvent le corps d'un pratiquant de randonnée palmée de 65 ans au large de l'île Grande près de Pleumeur-Bodou, dans les Côtes-d'Armor. En début de semaine, le lundi 25 juillet, à quelques kilomètres de là, à Plougasnou dans le Finistère, c'est un homme de 65 ans qui est retrouvé noyé par l'hélicoptère de la gendarmerie après que sa femme ait donné l'alerte. Le lendemain, toujours dans le Finistère, à Camaret-sur-Mer, un homme de 72 ans perd la vie au large de la plage de Pen Hat, une plage interdite à la baignade en raison de sa dangerosité.
La baignade, une activité nautique mortelle
Si ces quatre drames concernent tous des seniors, cette tranche d'âge n'est habituellement pas prédominante dans les décès par noyade selon la Préfecture maritime de l'Atlantique mais ils interpellent :
"Le plus souvent, ce sont les proches qui ont donné l'alerte. En l'occurrence les épouses de deux victimes qui ne les voyant pas rentrer se sont dit que ce n'était pas normal. Lorsque les secours ont retrouvé les victimes, elles étaient déjà inconscientes. Cela peut laisser penser que ces deux personnes ont fait des malaises."
Pour cette tranche d'âge, le conseil de Céline Tuccelli est valable pour tous les sports :"Essayez d'être bien suivi par un généraliste. Il faut aussi avoir conscience de ses limites, avoir conscience qu'on vieilli, ne pas surestimer ses capacités."
Le danger des marées bretonnes
Mais la porte-parole de la Préfecture maritime tient surtout à rappeler que la baignade en Bretagne n'est pas une activité anodine.
Les gens n'ont pas conscience que la baignade est l'activité nautique la plus dangereuse qu'on puisse conduire. Elle occasionne plus de décès que le kite-surf, la planche à voile ou la plongée sous-marine. Et tout le monde n'a pas pas la même condition physique. Avec l'âge, on est peut-être en moins bonne santé et plus susceptible d'avoir un accident.
Céline Tuccelli, capitaine de frégate et porte-parole du Préfet maritime de l'Atlantique
Principal risque, les phénomènes liés aux marées de fortes amplitudes sur les côtes bretonnes.
Il faut rappeler aux gens qui ne sont pas de la région que plus les coefficients sont élevés, plus les courants sont puissants.
Céline Tuccelli, capitaine de frégate et porte-parole du Préfet maritime de l'Atlantique
Entre l'étal de pleine ou de basse mer où le courant est quasiment nul et la mi-marée quelques heures plus tard, les courants peuvent vite atteindre les deux nœuds.
Au-delà d'un nœud, si elle n'est pas championne olympique, une personne normalement constituée ne peut pas forcément contrer le courant. Elle se retrouve emportée et panique. C'est souvent ce qui provoque la noyade : on voit qu'on est emporté au large et on essaie de lutter contre le courant.
Céline Tuccelli, capitaine de frégate et porte-parole du Préfet maritime de l'Atlantique
"Là, on s'épuise. Si on a un petit facteur de risque cardio-vasculaire, arrive l'asphyxie, on commence à avaler de l'eau et on peut se noyer très rapidement."
Autre phénomène dangereux, les baïnes.
On les rencontre plutôt en Nouvelle-Aquitaine, mais elles existent aussi en Bretagne. "Ce sont des trous d'eau qui se remplissent et se vident en fonction des marées."
C'est ce qui semble avoir coûté la vie au baigneur de Camaret-sur-Mer. "Malheureusement pour ce monsieur, on est typiquement dans tout ce qu'il ne faut pas faire : cette plage est interdite à la baignade, elle est réputée dangereuse, elle est ouverte sur le large donc il y a régulièrement des vagues déferlantes. Sa noyade est intervenue à la mi-marée descendante, là où le courant est le plus fort avec des baïnes et un courant d'arrachement, c'est à dire que vous ne pouvez pas résister. N'importe quel nageur en bonne ou mauvaise santé va forcément être attiré vers le large."
Le réflexe à avoir dans ce cas ?
Se mettre sur le dos, ne pas lutter, se laisser entrainer vers le large, même si ça peut être un peu impressionnant. On va dériver vers une zone en dehors de la baïne et on va ensuite essayer de revenir vers la plage calmement dans une zone où il n'y a pas ce courant d'arrachement. Ce n'est pas du tout naturel comme réflexe, mais c'est ce qu'il faut faire.
Céline Tuccelli, capitaine de frégate et porte-parole du Préfet maritime de l'Atlantique
Des risques plus élevés d'hypothermie
Autre problème, en Bretagne, la température de l'eau dépasse rarement les 19°C. "L'hypothermie va être un phénomène aggravant. Vous allez forcément résister moins longtemps parce que vous avez froid. La solution, c'est d'avoir un vêtement à flottabilité positive comme un gilet néoprène. ça vous aide à flotter et cela vous protège aussi du froid."
Se baigner dans les zones surveillées
Dernier conseil : "Se baigner dans les zones surveillées. C'est vrai qu'il y en a assez peu. Mais si vous n'êtes pas en très bonne santé, si vous n'êtes pas un très bon nageur ou si vous êtes en famille avec de jeunes enfants, optez pour les zones surveillées et au lieu de nager vers le large, nagez parallèle à la côte toujours en vue d'un proche. Ce sont eux qui vont donner l'alerte s'ils constatent quelque chose d'anormal."
Chaque année, la Préfecture maritime de l'Atlantique comptabilise une vingtaine de noyades sur le littoral.