Pêcheurs mitigés, ONG déçues: l'accord sur les quotas de pêche 2018, arraché de haute lutte dans la nuit de mardi à mercredi par les 28 Etats membres de l'UE, ne soulève pas un enthousiasme franc et massif.
"Dès l'ouverture du Conseil, la Commission a réitéré son intention d'atteindre le RMD (Le Rendement maximum durable) en 2018 au lieu de 2020 et d'introduire un moratoire de la pêche de l'anguille. Cette double approche a cristallisé les débats et laisse aux pêcheurs un goût amer", a indiqué le Comité national des pêches français (CNPMEM).
Des mesures pour préserver les stocks d'anguilles
L'UE a effectivement pour la première fois pris des mesures pour tenter de préserver les stocks d'anguilles. Les pêcheries devront fermer au moins trois mois consécutifs
entre le 1er septembre 2018 et le 31 janvier 2019, au moment de la période de migration : il sera alors interdit de pêcher les spécimens de plus de 12 cm dans les eaux de
l'Union et de ses voisins, y compris en mer Baltique. Andrew Clayton, de l'ONG Pew Charitable Trusts, a déploré des mesures "affaiblies", alors que la Commission recommandait un moratoire complet.
Pêche aux bars, les pêcheurs récréatifs pénalisés, pour Alain Cadec
Des restrictions supplémentaires s'appliqueront aussi pour la pêche du bar, déjà très encadrée pour cette espèce en difficulté, à la fois pour les pêcheurs professionnels et pour l'activité de loisirs. Pour les professionnels, les possibilités de pêche ont été augmentées à cinq tonnes par rapport au quatre tonnes que proposait la Commission européenne.
En revanche pour la pêche récréative, les "mesures sont à la fois sévères et incohérentes" explique Alain Cadec, député européen, en effet seul le pêcher-relâcher (no kill) sera autorisé durant toute l’année en Manche, alors que trois bars par pêcheur et par jour seront possible en Bretagne Sud et dans le Golfe de Gascogne. Il poursuit « En effet, nous manquons de données fiables quant à l’impact réel de la pêche récréative sur l’état des stocks. Les avis scientifiques sur le sujet sont donc le fruit de modélisations qui ne correspondent pas toujours à la réalité. De plus, il n’est pas cohérent de proposer des mesures différentes en Manche et en Bretagne Sud et dans le Golfe de Gascogne. Nous parlons d’un seul et même stock. La solution équitable que j’avais proposée à la Commission européenne était d’un bar par jour et par pêcheur au Nord comme au Sud. Il faut harmoniser les mesures pour la pêche du bar. Je ferai cette proposition pour le plan de gestion pour l’Atlantique.»
Des augmentations de quotas sur plusieurs "stocks de valeur"
A l'inverse, la Commission s'est félicitée de pouvoir annoncer des augmentations des quotas de pêche sur plusieurs "stocks de valeur", comme la langoustine en mer du Nord mais aussi en mer d'Irlande et en mer Celtique (+15% à 29.091 tonnes), les chinchards dans l'Atlantique Nord, quatre stocks de sole et trois stocks de plie dans les eaux du Nord-Ouest.
Mais "malgré le maintien ou l'augmentation de certains TAC, taux de capture (...) les pêcheurs français, plus particulièrement ceux des façades de la Manche, du Golfe de Gascogne et ceux exerçant en mer Celtique sont déçus des résultats de cette négociation", indique le Comité national des pêches (CNPMEM), marqué selon son directeur général, Hubert Carré, par des "négociations très, très difficiles". "La Commission européenne a fait un abcès de fixation sur l'anguille avec un moratoire. Les négociateurs épuisant leurs forces sur ce sujet, n'en avaient plus assez pour les autres sujets qui nous tenaient à coeur", a-t-il déclaré, désabusé.