Il y a quelques jours, un père a été expulsé de la banque dans laquelle il venait de retirer de l'argent en raison du comportement de son fils, autiste. Les comptes des deux hommes ont été bloqués. La banque a rencontré la famille pour tenter de renouer les relations commerciales, en vain.
Loïc Croyal se souviendra de sa visite à la banque, en ce 10 août. Comme chaque mardi, il est venu, accompagné de son fils Fabien, pour retirer de l'argent à la Caisse d'épargne, à Rennes (35). "Quand je me suis présenté à l'accueil, Fabien a dégénéré, indique le père. Il a commencé à baisser son pantalon. Il a eu une envie pressante", relate-t-il.
Le père tente alors de maîtriser son fils, à plusieurs reprises. Mais Fabien baisse son pantalon devant deux employées de la banque. Les deux hommes sont expulsés des lieux sur-le-champ. Loïc exprime, quant à lui, son incompréhension : "C'est une agence dans laquelle nous nous rendons toutes les semaines depuis 25 ans et qui connaît mon fils !"
Quelques jours après les faits, la famille Croyal reçoit un courrier, par recommandé, les informant que le compte de Fabien allait être radié... ainsi que celui de son père, Loïc. "Concernant le fils, il y a peut-être débat, admet Me Jean-Guillaume Le Mintier, avocat de la famille. Mais pourquoi fermer le compte du papa ?" s'interroge-t-il.
Plainte déposée
Dans ce courrier, la banque indique laisser deux mois à Loïc et Fabien pour se retourner. Cependant, "en pratique, le délai de deux mois laissé par le courrier n'est pas réel, puisque aujourd'hui, ils ne peuvent pas retirer d'argent", s'indigne l'avocat."On a déposé une plainte pour discrimination, poursuit-il. Dans le cas présent, c'est pour le handicap." Dans cette plainte, deux actes de discrimination sont visés. "Le premier contre l'agence bancaire, acte commis en public. Le deuxième concerne la lettre recommandée, qui vise l'inconvenance : le handicap de Fabien ne convient pas à la banque. C'est un motif intolérable dans la société dans laquelle on vit", estime Me Jean-Guillaume Le Mintier.
"Faire amende honorable"
De son côté, la banque tient à nier tout acte de discrimination. "Ce qui s'est passé est une incivilité comme il y en a beaucoup, note Bruno Leclercq, secrétaire général de la Caisse d'épargne pour la Bretagne et les Pays-de-Loire. Mais cette incivilité-là frôlait l'atteinte à la pudeur ! Et les faits ne sont pas contestables", avance-t-il en indiquant que les vidéos des caméras de surveillance sont formelles.Une enquête a été ouverte et sera menée par la sûreté départementale. Ces vidéos seront visionnées et le personnel de l'agence sera entendu.
Toutefois, M. Leclercq a indiqué que "compte tenu de la situation de la famille, on regrette ce qui s'est passé. On est prêt à faire amende honorable". M. Croyal et les responsables locaux de la banque se sont rencontrés ce mercredi matin. Face à l'emballage médiatique, la banque a proposé à la famille de "renouer les relations commerciales", indique M. Leclercq, proposition rejetée par MM. Croyal.
Reportage : K. Veillard / A. Billet / P. Nau